La ministre des sports, Roxana Maracineanu, à l’Assemblée nationale, le 21 mai. / THOMAS SAMSON / AFP

Face à une crise sans précédent dans le monde sportif, la ministre des sports, Roxana Maracineanu, a promis mardi 21 mai une « large concertation » avant d’arbitrer sur le sort de ses agents, les conseillers techniques sportifs (CTS), dont le gouvernement entend confier la gestion aux fédérations.

L’annonce de ce projet, début avril, via la fuite d’une note ministérielle, avait remis le feu aux poudres, sept mois après une première crise provoquée par l’objectif de Matignon de supprimer 1 600 postes chez les agents publics du sport, soit le nombre de conseillers techniques sportifs.

« Aucun cadre technique détaché d’office »

Symboles du rôle et de l’engagement de l’Etat français dans le sport, les CTS sont des fonctionnaires placés auprès des fédérations pour les aider sur le haut niveau et les pratiques de masse. Directeurs techniques nationaux (DTN), entraîneurs nationaux ou conseillers techniques nationaux ou régionaux, ils sont réputés essentiels dans nombre de petites et moyennes fédérations sportives, mais leur statut public est souvent remis en cause.

Depuis quelques semaines, le mot-clé « #touchepasamoncts » défilait sur les réseaux sociaux, repris par des médaillés olympiques, pendant que certains arboraient des brassards rouges sur des compétitions internationales.

« Je ne passerai jamais en force, aucun cadre technique ne sera donc détaché d’office » dans les fédérations, a lancé Mme Maracineanu, mardi, lors des questions au gouvernement. Pas sûr, cependant, que l’annonce permette de calmer la fronde.

Car, dans la foulée, les députés ont adopté un article du projet de loi sur la fonction publique permettant le détachement d’office. « La parole n’engage que la ministre actuelle » sur les CTS, se sont inquiétés des députés à l’instar de l’ancienne ministre des sports Marie-George Buffet (PCF). Le ministère des sports, interrogé par l’AFP, n’entend pas non plus revenir sur la décision de supprimer le concours qui permet de devenir CTS.

Pour calmer le jeu, Roxana Maracineanu a annoncé « une large période de concertation sur la question des moyens humains » dans le sport. « Les CTS sont au cœur de ces préoccupations, et je souhaite qu’ils s’engagent sur ces sujets », a-t-elle déclaré, énumérant « le contrôle », « l’éthique », « la transparence des flux financiers », « l’intégrité », « le statut de l’entraîneur et la place des sportifs au sein des fédérations ».

Craintes autour des compensations financières

Pour elle, le sujet doit rester lié à la création récente de l’Agence nationale du sport, qui voit l’Etat partager certaines de ses prérogatives avec les collectivités territoriales, le mouvement sportif et des représentants des entreprises. Un modèle plus efficace pour le gouvernement, mais qui incarne le désengagement de l’Etat pour ses détracteurs.

Pour animer et cadrer la concertation, la ministre a nommé deux « tiers de confiance » : l’ancien gymnaste et « lui-même CTS » Yann Cucherat, aujourd’hui adjoint aux sports du maire de Lyon, Gérard Collomb, et un « haut fonctionnaire », magistrat à la Cour des comptes passé par la Fédération française de football et le PMU, Alain Resplandy-Bernard.

« Ils me remettront un rapport dans le courant du mois d’octobre, je n’arbitrerai qu’après avoir pris connaissance des préconisations », a ajouté la ministre, sans dire que le gouvernement renonçait au projet de confier la gestion des CTS aux fédérations.

Au-delà de l’opposition d’une majorité d’agents – un collectif revendiquait 1 300 CTS –, le projet suscite aussi les craintes de fédérations qui redoutent que les compensations financières de l’Etat ne durent qu’un temps.

« Pendant qu’on fait des rapports, les CTS disparaissent », a réagi le président de l’association des DTN (AsDTN) Philippe Bana, pour qui « le marionnettiste du sport se trouve à Bercy ». Sans remplacement des départs à la retraite, le corps des CTS perdrait 25 % de ses effectifs en cinq ans et 50 % en dix ans.