Des déjeuners, des conciliabules, d’innombrables coups de téléphone. Depuis qu’ils ont découvert, atterrés, les mauvais résultats de leur liste aux élections européennes, les élus Les Républicains (LR) de Paris ne cessent de discuter entre eux, autour d’une question clé : comment éviter un naufrage aux prochaines élections municipales ? Quelle tête de liste choisir pour que la droite classique, qui a longtemps tenu Paris et contrôle encore neuf arrondissements sur vingt, ne se retrouve balayée en mars 2020 ?

A ce stade, les divergences de vues sont telles que la droite est menacée d’explosion. La scission du groupe Les Républicains et indépendants (LRI), principale force d’opposition au conseil municipal, pourrait intervenir dès cette semaine. Une réunion de tous les élus parisiens LR et apparentés est prévue mercredi soir.

Elle pourrait déboucher sur la création d’un groupe dissident, autour de Pierre-Yves Bournazel, un député qui a déjà quitté LR afin de se rapprocher des macronistes au sein d’Agir, et veut faire une campagne hors des partis pour les prochaines municipales. Plusieurs figures parisiennes, comme Claude Goasguen ou Philippe Goujon, sont tentées de le rejoindre.

Ne resteraient dans le groupe LRI actuel que les responsables réticents à l’égard de Pierre-Yves Bournazel, et les partisans de Rachida Dati, l’ancienne ministre sarkozyste qui avait le soutien de l’ancien président du parti, Laurent Wauquiez, pour conquérir Paris.

D’autres élus encore pourraient vouloir rejoindre La République en marche (LRM), le parti présidentiel, arrivé nettement en tête à Paris le 26 mai, avec 32,9 % des voix. « Si vous avez l’étiquette LR, vous êtes carbonisé, alors qu’avec celle de LRM, ça vous fait 20 points de plus immédiatement », calcule un élu parisien de droite, qui confesse ne pas avoir voté aux Européennes pour la liste de son parti, menée par François-Xavier Bellamy.

Dissensions idéologiques

L’éclatement en vue de la droite parisienne tient en partie à une question de personnes : Rachida Dati compte beaucoup d’ennemis dans son propre camp, Pierre-Yves Bournazel est perçu comme plus rassembleur. Mais, comme au niveau national, les dissensions sont aussi idéologiques. L’ex-ministre de la justice incarne une ligne droitière. Le député du 18e arrondissement se veut plus centriste, plus humaniste et ouvert sur les questions de société. « Une partie des troupes, dont je fais partie, ne se reconnaît pas dans la ligne droitière, celle que défendait Laurent Wauquiez », confirme Florence Berthout, maire du 5e arrondissement et présidente actuelle du groupe LRI au conseil de Paris.

Politiquement, enfin, la question des alliances constitue une ligne de fracture. Rachida Dati représente une opposition résolue tant à la maire socialiste Anne Hidalgo qu’à Emmanuel Macron. D’autres se montrent plus souples. Interrogé vendredi 31 mai sur Sud Radio, le député LR Claude Goasguen a ainsi évoqué une possible alliance entre LR et LRM pour les municipales : « Si on peut avoir un candidat unique, ça serait l’idéal à Paris pour battre Mme Hidalgo », la maire PS sortante.

Le député Benjamin Griveaux, l’un des principaux candidats à l’investiture LRM à Paris, a refusé de saisir cette main tendue. « On ne construit pas un projet contre quelqu’un ou sur des haines recuites, a-t-il déclaré dans Le Parisien. Claude Goasguen, ou Philippe Goujon [maire LR du 15e arrondissement], défendaient les couleurs de François-Xavier Bellamy haut et fort. Quatre jours après, ils veulent faire alliance avec nous pour garder des postes. Ils n’ont rien compris de ce qu’attendent les Parisiens ! »