Pourquoi trouver un portefeuille bien garni incite davantage à l’honnêteté
Pourquoi trouver un portefeuille bien garni incite davantage à l’honnêteté
LE MONDE ECONOMIE
Des universitaires de Zurich, du Michigan et de l’Utah ont « perdu » volontairement, dans 355 villes à travers 40 pays, des portefeuilles plus ou moins remplis afin de mesurer le civisme de leurs concitoyens. Les résultats de l’enquête, publiés jeudi 20 juin dans la revue « Science », ont surpris les chercheurs.
Les portefeuilles étaient tous identiques : en plastique transparent, ils contenaient des cartes de visite avec une adresse e-mail, une liste de courses, une clé et, dans certains cas, des billets et des pièces équivalents à une somme allant de 13,45 dollars et 94,15 dollars. / CHRISTIAN ZUND / AFP
En cherchant à mesurer l’honnêteté des citoyens à travers le monde, une équipe de chercheurs des universités de Zurich, du Michigan et de l’Utah est parvenue à une heureuse conclusion : l’être humain s’avère finalement beaucoup plus civique qu’on aurait pu le croire.
L’étude a été menée à une échelle inédite. Dans 355 villes à travers 40 pays, les chercheurs et leur équipe ont volontairement « perdu » plus de 17 000 portefeuilles afin de recenser combien seraient rendus. La méthode était la suivante : des membres de l’équipe de recherche, déclarant avoir trouvé un porte-monnaie par terre, les ont remis aux comptoirs de cinq types d’institutions présentes dans tous les pays (banques, théâtres ou musées, bureaux de poste, hôtels, commissariats), demandant à l’employé de l’accueil de s’en occuper, en prétextant une urgence pour partir aussitôt.
Tous identiques, en plastique transparent, les portefeuilles contenaient des cartes de visite avec une adresse e-mail, une liste de courses, une clé et, dans certains cas, des billets et des pièces équivalents (en pouvoir d’achat et en monnaie locale) à 13,45 dollars ; dans d’autres cas, il n’y avait pas d’argent. Aux Etats-Unis, au Royaume-Uni et en Pologne, l’expérience a également été réalisée avec la somme de 94,15 dollars.
Les résultats de l’enquête, publiés jeudi 20 juin dans la revue Science, ont surpris les chercheurs : dans 38 pays sur 40, plus le montant contenu dans le portefeuille augmentait, plus les employés qui l’avaient réceptionné contactaient son propriétaire pour le lui rendre.
En moyenne, tous pays confondus, 40 % des porte-monnaie sans argent ont été rendus, contre 51 % pour ceux contenant la plus petite somme d’argent (13,45 dollars), et 72 % pour les plus fournis (94,15 dollars). Une démonstration implacable que l’être humain n’est pas toujours mû par son intérêt personnel.
De grands écarts en matière de civisme
Pour les chercheurs, ces travaux révèlent que l’altruisme, le souci de l’image que l’on a de soi et la répugnance à se voir comme un voleur peuvent être plus forts que l’intérêt financier à conserver l’argent trouvé dans un portefeuille.
« Quand il y a de l’argent, les gens ont soudain l’impression de voler, et l’impression est encore plus forte quand le montant augmente », a indiqué à l’AFP Christian Zünd, doctorant à l’université de Zurich.
Au-delà de cette tendance générale, le classement par pays traduit de grands écarts en matière de civisme. La Suisse arrive à la première place des pays les plus honnêtes, devant la Norvège. Dans ces pays, les portefeuilles ont été rendus dans 70 % des cas. Viennent ensuite les Pays-Bas, le Danemark, la Suède et la Pologne. La France occupe la dixième position sur quarante. En queue de classement, figurent le Pérou, le Maroc et enfin la Chine, pays où moins de 10 % des portefeuilles sans argent ont été retournés, et un peu plus de 20 % quand le porte-monnaie contenait pièces et billets.