Le Danemark se dote d’un gouvernement social-démocrate
Le Danemark se dote d’un gouvernement social-démocrate
Par Anne-Françoise Hivert (Malmö (Suède), correspondante régionale)
Au terme de trois semaines de négociations, la leader des sociaux-démocrates, Mette Frederiksen a annoncé qu’elle formerait un gouvernement minoritaire, avec le soutien au Parlement de ses alliés traditionnels du centre et de la gauche.
Mette Frederiksen, chef de file des sociaux-démocrates et nouvelle première ministre danoise, le 6 juin à Copenhague. / FABIAN BIMMER / REUTERS
Et de trois. Après la Suède et la Finlande, les sociaux-démocrates reviennent aux affaires au Danemark. Le 5 juin, le parti à la rose est arrivé en tête aux législatives, devant les libéraux du premier ministre sortant, Lars Lokke Rasmussen. Les négociations, débutées dès le lendemain avec les sociaux-libéraux (Radikale Venstre), le Parti socialiste du peuple et la Liste de l’unité, ont fini par aboutir un peu après minuit, mercredi 26 juin, débouchant sur la signature d’un accord de dix-huit pages.
A 41 ans, Mette Frederiksen devient la plus jeune première ministre de l’histoire du royaume et la seconde femme à occuper le poste. La leader sociale-démocrate dirigera un gouvernement minoritaire. Avec 25,9 % des voix le 5 juin, soit le cinquième score le plus bas du parti depuis 1905, ses chances de réussir semblaient minces. Mercredi 26 juin, les éditorialistes du pays étaient bien obligés de constater qu’après avoir pacifié son parti, divisé à son arrivée, Mette Fredriksen venait de réaliser un tour de force, en obtenant le soutien nécessaire pour former un gouvernement minoritaire.
Le texte, signé par les leaders des quatre partis de centre gauche, est plus qu’un programme. Il s’agit d’une déclaration d’intention, intitulée « Une direction juste pour le Danemark ». Il annonce la fin de la « politique des symboles » et met la barre à gauche, en prévenant que toutes les promesses « ne pourront être réalisées immédiatement » et devront l’être « dans le cadre d’une politique économique responsable ».
L’avenir du modèle social
Principale priorité du gouvernement : la lutte contre le changement climatique. L’objectif est de réduire de 70 % les émissions de CO2 d’ici à 2030 par rapport à 1990, ce qui va requérir « des efforts très importants pendant toute la période gouvernementale et devra être mené de manière équilibrée socialement ». Parmi les mesures évoquées : l’interdiction de la vente de voitures à moteur thermique d’ici à 2030 et une conversion au vert du secteur agricole.
L’avenir du modèle social danois avait également dominé la campagne électorale. L’accord prévoit une série de dispositifs afin de réduire la pauvreté et les inégalités sociales. D’ici un an, une commission spéciale devra présenter des mesures en ce sens. En attendant, le gouvernement va débloquer entre 250 et 300 millions de couronnes (33 et 40 millions d’euros) par an pour venir en aide aux familles en difficultés.
Au printemps, des dizaines de milliers de Danois s’étaient mobilisées sur les réseaux sociaux et dans la rue pour exiger une augmentation du personnel dans les crèches et maternelles. Le gouvernement s’engage à limiter le nombre d’enfants pour chaque pédagogue et promet des embauches proportionnelles à la croissance démographique.
Politique migratoire
Mais le principal point d’achoppement des négociations portait sur la politique migratoire, depuis que les sociaux-démocrates ont adopté une ligne très restrictive, au nom de la défense de l’Etat-providence. Les trois partis de centre gauche réclamaient des assouplissements. Ils en obtiennent plusieurs, dont l’annulation du projet d’envoyer des migrants délinquants sur l’île de Lindholm au sud du pays, ainsi que le relogement des familles en attente d’expulsion hébergées dans l’ancienne caserne militaire de Sjaelsmark.
Anticipant les critiques de la droite et du Parti populaire danois, Mette Frederiksen a souligné qu’il était « possible de mener une politique de l’immigration sévère, tout en le faisant de façon intelligente ». De son côté, le premier ministre sortant, Lars Lokke Rasmussen, fustige un projet « non financé et vague ».
Le futur gouvernement prévoit d’investir 10 milliards de couronnes (environ 1 340 000 000 d’euros) supplémentaires dans l’Etat-providence d’ici 2025, sans dire quels impôts seront augmentés. Rien non plus sur la baisse de l’âge de départ en retraite pour les professions les plus pénibles, promise par Mette Frederiksen pendant la campagne.