Arte, vendredi 28 juin à 13 heures, documentaire

La brièveté de ce documentaire, dépassant de peu la demi-heure, n’enlève rien à son intérêt. Tourné dans différents quartiers londoniens, ce reportage dresse un tableau peu reluisant de la cohabitation hommes-femmes dans la ville. Une enquête datant de 2016 soulignait que 85 % des femmes britanniques assuraient avoir été victimes d’agressions ou de harcèlement sexuel dans l’espace public. Depuis, même si la vague #metoo est passée par là et que les langues se sont déliées, la frontière entre drague et harcèlement semble toujours aussi difficile à distinguer pour certains mâles locaux.

En 2017, à force d’entendre les témoignages de copines et d’inconnues, Eliza Hatch, âgée de 22 ans, a eu l’idée d’un projet original : photographier les femmes, parfois très jeunes à l’époque des faits, sur les lieux de leur agression, en donnant d’elles l’image non pas de victimes mais de femmes reprenant le pouvoir sur leur agresseur. Rapidement, les témoignages s’accumulent : Eliza a posté plus de 120 photos sur son site, souvent splendides, accompagnées à chaque fois d’un court texte explicatif.

« Culture de la drague »

Agressée sur l’escalator d’une station de métro par deux hommes, Lucy, photographiée par Eliza, témoigne face caméra : « Depuis, je ne me sens plus à l’aise dans les transports publics. Quelque chose s’est cassé ». Autre témoignage, celui de Leïla, elle aussi prise en photo par Eliza. Cette ancienne étudiante d’Oxford, agressée verbalement dans la rue devant de nombreux témoins, esquisse un triste sourire : « Les gens regardaient sans rien faire ! Flirter doit se faire avec respect. Et le harcèlement n’est jamais respectueux… »

Outre ce projet photographique original, ce court documentaire braque un coup de projecteur sur deux autres actions : celle menée par un « coach en séduction » qui tente de faire comprendre à des hommes la différence entre drague et harcèlement, travaux pratiques dans la rue à l’appui. Une autre initiative, intitulée Good Night Out, vise à sensibiliser le personnel des pubs, boîtes de nuit et salles de concert, au harcèlement que peut subir, dans ces lieux de sorties nocturnes, la clientèle féminine. Les séances de formation sont financées par les établissements eux-mêmes. Une initiative nécessaire, car selon Lucy : « On vit encore dans une société très sexiste. Cette culture de la drague est en grande partie responsable du sentiment d’impunité chez les hommes. »

Londres et le mouvement #metoo, de Nils Casjens (All., 2018, 35 min). Dans le cadre d’Arte regards. www.arte.tv