Ouverture du procès de la rixe de Sisco en Corse
Ouverture du procès de la rixe de Sisco en Corse
Le Monde.fr avec AFP
Le procureur général a rejeté jeudi matin la demande de dépaysement du procès formulée par les avocats de l’un des cinq protagonistes de la rixe de Sisco.
La plage de Sisco en Corse, le 14 août. | PASCAL POCHARD-CASABIANCA / AFP
Le procès de la rixe de Sisco ouvre jeudi 15 septembre après midi au tribunal correctionnel de Bastia. Le tribunal doit juger trois frères marocains et deux habitants du village du Cap Corse pour respectivement violences en réunion avec armes et violences en réunion.
Le 13 août, une altercation entre des adolescents qui se baignaient sur une plage de Sisco, et quatre frères d’une famille marocaine soupçonnés d’avoir voulu « privatiser » la plage où ils se baignaient avec femmes et enfants, avait dégénéré en une bagarre d’une extrême violence, impliquant une quarantaine de villageois appelés en renfort. Cinq personnes avaient été blessées, dont un habitant de Sisco, d’origine tchèque, blessé par un coup de fusil harpon. Une centaine de gendarmes et policiers avaient été nécessaires pour ramener le calme dans la petite crique.
Dépaysement rejeté
L’épisode avait entraîné une manifestation tendue à Bastia, le lendemain : 500 personnes avaient défilé aux cris de « Aux armes ! » et « On est chez nous ! » dans un quartier populaire où certains pensaient que les familles marocaines impliquées vivaient.
La demande de dépaysement hors de Corse du procès a été rejetée, a annoncé jeudi matin le procureur général. Cette demande avait été formulée par Mes Philippe Ohayon et Ouadie Elhamamouchi, les avocats de Jamal Benhaddou, l’un des prévenus, accusé d’être à l’origine des incidents. Ces derniers invoquaient la « sérénité des débats », la « sûreté des prévenus » et « l’immixtion du politique » dans cette affaire. En début d’après-midi, maître Ohayon annonçait qu’ils ne déposeraient pas de recours contre le rejet de leur demande de dépaysement.
Dans la foulée de cette décision, les dirigeants nationalistes du Conseil exécutif et de l’Assemblée de Corse Gilles Simeoni et Jean-Guy Talamoni, et le maire (PS) de Sisco Ange-Pierre Vivoni ont lancé un appel commun au calme : « Il est essentiel que l’audience se tienne dans un contexte serein et apaisé, dans et hors du Palais de justice ».
#Sisco plusieurs centaines de personnes réunies en soutien aux siscais à l'extérieur https://t.co/P0f73ovdWX
— FTViaStella (@France 3 Corse)
Le parti indépendantiste Corsica libera – dont le président de l’Assemblée de Corse, Jean-Guy Talamoni, est un des dirigeants –, qui avait déjà apporté son soutien aux deux villageois de Sisco, Lucien Straboni, 50 ans, et Pierre Baldi, 22 ans, a appelé à un nouveau rassemblement à Bastia jeudi. Le parti a dénoncé « la prétention grandissante des petits caïds de quartiers ».
L’un des trois frères Benhaddou – Mustafa – a déjà été condamné pour outrage, transport d’armes et des délits liés aux stupéfiants.
Polémique sur le burkini
Si les faits du 13 août eux-mêmes sont assez clairs pour Nicolas Bessone, procureur de la République à Bastia – une « tentative violente de privatisation de la plage de la part des Benhaddou, suivie d’une réaction disproportionnée de certains habitants de Sisco, sans islamisme ni xénophobie » –, l’affaire a suscité un vif émoi dans l’opinion.
Elle est venue se greffer à la polémique née de l’interdiction du burkini dans plusieurs municipalités françaises, alors même qu’aucun des protagonistes n’en portait à Sisco – une confusion accrue par l’arrêté municipal prohibant le port ostentatoire de vêtements religieux pris peu après les faits par Ange-Pierre Vivoni, maire (Parti socialiste) du village de 1 200 habitants, une décision validée ensuite par le tribunal administratif de Bastia, qui a pris le contre-pied du Conseil d’Etat et mis en avant la rixe pour justifier sa décision.
L’affaire est aussi intervenue quelques mois après l’agression de pompiers dans un quartier populaire d’Ajaccio le soir de Noël, qui avait été suivie d’une manifestation émaillée de slogans racistes et du saccage d’une salle de prière musulmane.