L’enseignement supérieur peut-il accueillir les enfants du « baby-boom » de 2000 ?
L’enseignement supérieur peut-il accueillir les enfants du « baby-boom » de 2000 ?
Par Eric Nunès
Face au choc démographique que subira l’enseignement supérieur jusqu’en 2025, le think tank Terra Nova appelle à ne pas faire de l’université la seule variable d’ajustement.
La vague des bébés nés en 2000 est aujourd’hui à la porte de l’enseignement supérieur. Un afflux que les démographes ont prévu de longue date. « Demain, les bacheliers seront plus nombreux encore », avertissait Frédérique Vidal, ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation, le 30 octobre lors de la présentation du « plan étudiants » du gouvernement. Tous « trouveront leur place », assurait la ministre. Encore faut-il savoir laquelle, interroge le think tank Terra Nova dans une note publiée vendredi 10 novembre, qui esquisse des préconisations.
Un choc démographique
Entre la rentrée 2011 et celle de 2016, le nombre de bacheliers de l’année qui ont fait leur entrée dans l’enseignement supérieur est passé de 420 000 à 480 000, soit un bond de 14 %. Et la progression s’accentue : après des hausses annuelles de 10 000 étudiants à l’entrée des études supérieures, les prévisions oscillent entre 28 000 et 33 000 étudiants de plus pour la seule rentrée 2018, avant une progression du même ordre en 2019.
Outre la croissance démographique, cet afflux massif est notamment le « résultat de la décision politique prise sous le premier septennat de François Mitterrand de tendre à 80 % d’une classe d’âge au niveau du baccalauréat », rappelle le think tank.
Manque de places croissant et tirage au sort
Jusqu’à maintenant, ce sont les universités qui ont « absorbé l’essentiel de l’augmentation » du nombre d’étudiants. Alors que les filières sélectives (IUT, STS qui mènent au BTS, classes prépas, etc.) ont des effectifs constants ou en légère hausse, les licences « ont vu leurs effectifs entrants augmenter de plus de 20 % entre la rentrée 2013 et la rentrée 2016 » avec en corollaire un manque de places croissant et l’apparition du tirage au sort pour limiter l’afflux d’étudiants dans les filières sous tension.
Plusieurs scénarios sont envisageables, selon Terra Nova : si la tendance actuelle se poursuit, ce sont les universités qui joueront le rôle de variable d’ajustement et qui devront absorber 30 000 étudiants en plus, soit une croissance de 15 %.
Mais le think tank suggère la mobilisation de l’ensemble des filières pour limiter la charge supplémentaire pour les universités. Alors que celles-ci sont souvent un choix par défaut des bacheliers professionnels, qui y obtiennent des taux de réussite très bas, les auteurs préconisent de créer un minimum de 4 000 places supplémentaires dans les sections de techniciens supérieurs, ces filières qui préparent au BTS étant souvent le premier vœu d’orientation des bacs pro.
Pour que les bacheliers technologiques puissent continuer à se diriger comme aujourd’hui à 48 % en STS et 15 % en IUT, « il faudrait créer 5 000 places supplémentaires en STS, et 1 500 en IUT », estime également Terra Nova, pour qui il s’agit d’un minimum. Conjugué à un maintien des effectifs en classes préparatoires en grandes écoles (CPGE) et autres filières « prestigieuses », « on aboutirait à une augmentation de seulement 20 000 étudiants supplémentaires en licence ». Ce qui représente déjà l’équivalent d’une université de taille moyenne à construire… à chaque rentrée universitaire.