Un groupe de soldats Sud-Coréens se prépare à l’arrivée du convoi amenant une délégation dans le village de Panmunjom, dans la zone démilitarisée à la frontière avec le Nord. / ED JONES / AFP

De hauts représentants des deux Corées se sont retrouvés mardi 9 janvier pour leur premier face-à-face officiel en plus de deux ans, focalisant sur les prochains jeux Olympiques d’hiver après les tensions provoquées par les ambitions nucléaires de Pyongyang.

Ces pourparlers font suite à la main tendue le jour du Nouvel An par le dirigeant nord-coréen Kim Jong-Un, qui a évoqué une participation de Pyongyang aux jeux de Pyeongchang, en Corée du Sud.

Séoul a répondu par une proposition de dialogue à haut niveau, et la semaine dernière le téléphone rouge entre les deux voisins a été rétabli après près de deux ans de silence.

La délégation sud-coréenne s’est rendue en convoi sur le lieu des discussions, à Panmunjom, village frontalier où fut signé le cessez-le-feu de la guerre de Corée (1950-53), dans la zone démilitarisée (DMZ) qui divise la péninsule.

A un check-point menant à la DMZ, en fait l’une des frontières les plus militarisées du monde, un groupe de manifestants brandissait une pancarte leur souhaitant bonne chance.

Réchauffer les relations

Avant de quitter Séoul, le chef de la délégation sud-coréenne, le ministre de l’Unification Cho Myung-Gyun, a déclaré que les entretiens porteraient sur les JO mais aussi sur d’autres moyens de réchauffer des relations intercoréennes glaciales.

« Nous ferons de notre mieux pour que les jeux Olympiques et Paralympiques de Pyeongchang soient un festival de la paix et que cette rencontre soit le premier pas vers l’amélioration des relations intercoréennes », a dit le ministre.

Selon le ministre, la délégation nord-coréenne a traversé à pied la ligne de démarcation de Panmunjom pour se rendre aux entretiens, qui se déroulent à la Maison de la paix, côté sud-coréen.

Séoul s’efforce de présenter la compétition comme une « Olympiade de la paix », mais pour que l’expression prenne son sens, la participation du Nord est essentielle.

« Pom-pom girls »

Depuis deux ans, la situation sur la péninsule s’est considérablement dégradée, le Nord menant trois nouveaux essais nucléaires et multipliant les tirs de missile.

Si Pyongyang confirme sa participation, l’une des grandes questions sera de déterminer si les athlètes des deux pays et leur entourage feront une entrée commune lors des cérémonies d’ouverture et de clôture, comme à Sydney en 2000, à Athènes en 2004 et lors des jeux d’hiver de Turin en 2006. La taille et la composition de la délégation nord-coréenne, de même que son hébergement, qui devrait être financé par Séoul, devraient aussi être débattus.

Les Nord-Coréens pourraient loger sur un navire de croisière à Sokcho, à environ une heure de route des jeux, ce qui permettrait de surveiller étroitement leurs allées et venues.

La Corée du Nord ne dispose que d’une poignée d’athlètes qualifiés, si bien qu’elle devrait envoyer au Sud un imposant contingent de pom-pom girls, prédisent les analystes. Lors de compétitions sportives passées au Sud, des centaines de jeunes et avenantes supportrices nord-coréennes avaient ainsi créé l’événement. « Pour obtenir le résultat souhaité et attirer l’attention, la Corée du Nord devra dépêcher son escadre de reines de beauté », dit An Chan-Il, chef de l’Institut mondial des études nord-coréennes et réfugié du Nord.

Les médias sud-coréens ont laissé entendre que Pyongyang pourrait envoyer d’éminents représentants, dont la petite sœur de Kim Jong-Un, Yo-Jong, haute dirigeante du parti unique au pouvoir.

M. Cho, la personnalité sud-coréenne chargée des relations avec le Nord, est un vétéran. Il participe aux discussions depuis 1990, y compris le dernier sommet Nord/Sud de 2007.

« Au-delà de l’olympisme »

La partie nord-coréenne est dirigée par Ri Son-Gwon, le chef du Comité pour la réunification pacifique de la Corée. M. Ri a jusqu’ici surtout participé à des discussions militaires et est connu pour avoir claqué la porte après seulement quelques minutes d’entretiens en 2010, lorsqu’il avait démenti tout rôle de Pyongyang dans le torpillage d’un bâtiment de guerre sud-coréen.

Au-delà de l’olympisme, chaque partie pourrait évoquer des thèmes qui lui tiennent particulièrement à cœur, ce qui pourrait être beaucoup plus problématique, relèvent les analystes. Séoul veut poser la question d’une reprise des réunions entre les familles séparées par la guerre. Pyongyang a rejeté de précédentes propositions en ce sens. Le Nord va vraisemblablement vouloir évoquer la fin définitive des exercices militaires conjoints entre Séoul et Washington.

Les Etats-Unis et la Corée du Sud ont accepté la semaine dernière de reporter les manœuvres Foal Eagle et Key Resolve jusqu’à l’après-JO dans le but d’apaiser les tensions.

Le président américain Donald Trump s’est félicité ce week-end de la reprise des discussions et a espéré qu’elles aillent « au-delà » des JO. Il s’est aussi dit prêt à s’entretenir avec M. Kim, à rebours de sa rhétorique volontiers belliqueuse et insultante à l’égard du leader nord-coréen. « Cela ne va pas se faire du jour au lendemain », a toutefois affirmé l’ambassadrice américaine à l’ONU, Nikki Haley.