Affaire Weinstein, pratiques sur les tournages… la réponse de Tarentino à Uma Thurman
Affaire Weinstein, pratiques sur les tournages... la réponse de Tarentino à Uma Thurman
Le réalisateur américain est revenu, dans une interview au site « Deadline Hollywood », sur les critiques adressées par son actrice phare.
Depuis la publication, samedi 3 février, d’un article du New York Times (NYT) intitulé « Voilà pourquoi Uma Thurman est en colère », le réalisateur américain Quentin Tarantino fait l’objet d’interrogations sur son silence au sujet d’agressions sexuelles commises par son producteur, Harvey Weinstein, et sur son comportement sur des plateaux de tournage. Quentin Tarantino s’est finalement décidé à s’exprimer, lundi, et à « tout expliquer » au magazine en ligne américain Deadline Hollywood.
Dans un entretien au NYT, Uma Thurman, actrice vedette de Pulp Fiction (1994) et Kill Bill (2003), revenait en détail sur les violences sexuelles de Harvey Weinstein, dont elle a été victime. « Il m’a poussée, il a essayé de se jeter sur moi, de se déshabiller », accusait-elle notamment. Quentin Tarantino, qui avait parlé au début de l’affaire Weinstein de « révélations », avait finalement reconnu mi-octobre avoir été au courant depuis de longues années des agissements du producteur. Le réalisateur assure à Deadline Hollywood « avoir demandé à Harvey de s’excuser auprès d’Uma », après avoir appris que la comédienne avait été agressée par le producteur.
Mais, dans cette interview, Uma Thurman dénonce également les pratiques du cinéaste. Il ne s’agit pas ici de violences sexuelles mais, selon elle, du sadisme dont le réalisateur a fait preuve sur ses tournages.
« Plus grands regrets de ma vie »
Dans son interview à Deadline Hollywood, Quentin Tarantino revient longuement sur un épisode du tournage de Kill Bill, au cours duquel Uma Thurman avait eu un accident de voiture. Le réalisateur l’avait, selon elle, obligée à prendre le volant d’une voiture décapotable à la sécurité douteuse pour rouler à plus de 60 km/h sur une route sinueuse, sans doublure. Selon l’actrice, Tarantino lui avait ordonné :
« Atteins plus de 60 km/h sinon tes cheveux ne voleront pas au vent correctement, et je te la ferai refaire. »
« Aucun de nous ne considérait cette scène comme une cascade, il suffisait de conduire », se défend le réalisateur dans l’interview, et ajoute ne pas avoir brusqué l’actrice pour qu’elle accepte de tourner la scène.
A propos de la vitesse de la voiture, Tarantino reconnaît « avoir eu tort » mais dit ne pas avoir forcé Uma Thurman à prendre le volant :
« Je lui ai dit qu’elle pouvait le faire, que c’était une ligne droite, qu’il n’y avait pas de risque. Elle m’a répondu “Ok”. Parce qu’elle croyait en moi et me faisait confiance. (…) Je lui ai dit qu’il n’y avait pas de risque. Alors qu’il y en avait. »
La route n’était en fait pas parfaitement droite, elle dessinait un « S », et Uma Thurman perdit le contrôle de la voiture, et finit dans un arbre. « C’est l’un des plus grands regrets de ma vie et de ma carrière », confie le réalisateur, expliquant que par la suite « la confiance était rompue » avec l’actrice.
Uma Thurman's "Kill Bill" Car Crash
Durée : 01:48
Etouffées par les mains de Tarantino
Dans le reste de l’interview à Deadline Hollywood, Quentin Tarantino évoque également les scènes de crachat au visage, ou de strangulations auxquelles il a lui même participé, expliquant que l’idée d’une chaîne autour du cou de l’actrice était « une suggestion d’Uma », et, pragmatique, l’explique par un souci de réalisme : « Si tu veux que mon visage devienne rouge, et que les larmes me montent aux yeux, alors dans ce cas il faut m’étrangler. »
Une scène similaire dans un autre film de Tarantino, Inglourious Basterds (2009), impliquait l’actrice d’origine allemande Diane Kruger. Et cette fois encore c’est le réalisateur qui avait pris en main la scène, et étranglé lui-même la comédienne. Diane Kruger s’était exprimée en 2009 sur cette scène :
« Je me fais étrangler, ce qui était très bizarre car on le ressent quand quelqu’un vous étouffe, donc c’était une journée de boulot particulière. Le plus drôle, c’est qu’on voit les mains de Quentin sur le plan serré. (…) Je dois dire que c’était très étrange de me faire étrangler par le réalisateur. »
Tarantino s’est, par le passé, déjà justifié d’avoir voulu jouer la scène lui-même, et il réitère dans l’interview donnée à Deadline Hollywood, mettant, encore une fois en avant le réalisme de la scène : « Quand j’ai réalisé Inglourious Basterds, je suis allé voir Diane et je lui ai dit : “Ecoute, je dois t’étrangler. Si c’est juste un type qui pose ses mains sur ton cou, sans appuyer, (…) ça aura l’air d’un étranglement classique de film, (…) et tu n’aura pas cet air paniqué qui arrive quand on te prive d’air. Je te demande la permission de juste… t’étrangler, avec mes mains, en gros plan.” »
A la suite des propos tenus par Uma Thurman, Diane Kruger est venue sur son compte Instagram apporter son soutien au réalisateur en rappelant à quel point tourner avec lui avait été un moment de « pur bonheur ». « Il m’a traitée avec le plus grand respect et n’a jamais abusé de son pouvoir ni ne m’a forcée à faire quoi que ce soit qui m’aurait mise mal à l’aise », assure l’actrice.
« Combien d’images de femmes qui montrent un abus ? »
Sur son compte Instagram, Uma Thurman est, quant à elle, revenue sur ses accusations lundi et notamment sur l’accident de voiture dont elle a été victime, en affirmant ne pas croire « à un acte intentionnel » du réalisateur qui « a beaucoup regretté et a toujours des remords sur cet événement malheureux ». Elle ajoute qu’il lui a remis les images de l’accident « en sachant bien que cela pourrait lui faire du tort ».
A la suite de l’article du NYT, plusieurs personnalités du milieu du cinéma, ont réagi pour condamner les pratiques de Quentin Tarantino. L’une des premières accusatrices de Harvey Weinstein, Asia Argento, s’était fendue d’un tweet dans lequel elle déclarait notamment : « Weinstein et Tarantino, quel duo ! Un violeur en série et un quasi meurtrier. » L’actrice américaine Jessica Chastain a déclaré pour sa part : « Je continue de visualiser Tarantino crachant au visage d’Uma et l’étranglant avec une chaîne pour Kill Bill. Combien d’images de femmes dans les médias célébrons-nous qui montrent un abus ? Quand est-ce que c’est devenu la mode dans l’industrie du “divertissement” ? »
Les interrogations autour de Quentin Tarantino ne devraient pas s’interrompre tout de suite. Mercredi 7 février, le réalisateur a été rattrapé par des propos tenus dans une ancienne interview, en 2003. Le site Jezebel a exhumé un échange entre l’animateur de radio Howard Stern et Quentin Tarantino, dans lequel le réalisateur répond à propos du cinéaste Roman Polanski que ce dernier « n’a pas violé une fille de 13 ans. Il a eu un rapport sexuel avec une mineure. Ce n’est pas un viol ». Il ajoute que selon lui un viol « implique de la violence ».
Roman Polanski est accusé d’avoir drogué Samantha Geimer, 13 ans à l’époque des faits, et de l’avoir violée au domicile de l’acteur Jack Nicholson, à Los Angeles, en 1977. Dans cette interview de 2003, Tarantino assure que Samatha Geimer « voulait » cette relation puisqu’elle « sortait » avec lui.