A la Maison Blanche, le 15 février. / EVAN VUCCI/AP

Un chef de cabinet fragilisé, des dénégations contestées par le FBI qui précipite une enquête du Congrès, des conseillers dépourvus des accréditations requises… La Maison Blanche renoue depuis une semaine avec le désordre qui avait marqué les premières semaines au pouvoir de Donald Trump, premier président depuis des décennies à être dépourvu de toute expérience gouvernementale ou législative.

Le trouble créé par la démission précipitée, le 7 février, d’un bras droit du président, Rob Porter, mis en cause pour des violences conjugales par ses deux anciennes épouses, a placé le « chief of staff » (secrétaire général) de Donald Trump, John Kelly, sur la défensive. L’ancien général des marines avait été nommé à ce poste stratégique en juillet pour mettre de l’ordre dans une Maison Blanche livrée aux clans. Mais il est aujourd’hui fragilisé par sa gestion de cette démission.

Dans un premier temps, la Maison Blanche s’est en effet mobilisée pour défendre le conseiller, qui entretient par ailleurs une relation avec la directrice de la communication de la présidence, Hope Hicks. Il a ainsi pu plaider sa cause devant quatre journalistes sélectionnés pour l’occasion.

Son départ a ensuite été publiquement regretté par John Kelly. Ce dernier s’est ravisé après la publication d’une photo prise à l’époque des faits montrant le visage tuméfié de la première épouse de Rob Porter. La porte-parole de la Maison Blanche, Sarah Huckabee Sanders, a plaidé la bonne foi en assurant que le chief of staff n’avait pas été informé des antécédents du conseiller, qui lui avaient valu un signalement à la police.

Discordance

Une thèse remise en cause par la police fédérale. Car l’épisode a révélé que Rob Porter ne disposait pas d’une accréditation en bonne et due forme au terme d’un enquête du FBI, comme c’est la pratique, mais seulement d’une autorisation temporaire. Au cours d’une audition au Sénat, mardi, le directeur de la police fédérale, Christopher Wray, a assuré que ses services avaient rendu leurs conclusions en juillet 2017, augmentées de précisions apportées en novembre et en janvier.

Cette discordance a précipité l’annonce de l’ouverture d’une enquête de la commission de la Chambre des représentants chargée du suivi de l’action gouvernementale. Cette commission est présidée par un républicain, Trey Gowdy, élu de Caroline du Sud. D’anciens proches de Donald Trump écartés par John Kelly ont publiquement demandé sa démission. La porte-parole de la Maison Blanche, Sarah Sanders, a quant à elle maintenu sa version des événements en assurant que le service de sécurité interne de la présidence n’avait pas fait remonter les informations du FBI à temps.

Entre-temps, un autre conseiller chargé de la rédaction de discours, David Sorensen, a lui aussi démissionné, le 9 février, également pour des faits de violences conjugales. Un troisième, George David Banks, membre du Conseil économique national rattaché à la présidence, a suivi le même chemin mercredi après avoir été informé qu’il n’obtiendrait pas son accréditation pour avoir indiqué avoir consommé de la marijuana.

Ces départs vont accentuer un turn-over exceptionnellement élevé au sein de l’administration, selon des études concordantes, au terme de sa première année au pouvoir. Kathryn Dunn Tenpas, de la Brookings Institution, a ainsi noté que la moitié des douze postes les plus stratégiques ont changé de titulaires avec Donald Trump, contre un seul pour Barack Obama pendant la même période, et aucun pour George W. Bush.

« Prenez tout ce que vous entendez [sur le fonctionnement de la Maison Blanche] et multipliez par cinquante », dit Reince Priebus

Selon la chaîne d’information CNN, une trentaine de conseillers, dont le propre gendre du président, Jared Kushner, ne disposeraient toujours pas d’accréditations définitives, un nombre jugé plus élevé que la moyenne, comparé aux administrations précédentes, et qui pourrait s’expliquer par le profil du personnel de cette nouvelle administration. Pour composer ses équipes, Donald Trump a en effet refusé de puiser dans le vivier des conseillers chevronnés passés par des équipes républicaines précédentes et qui s’étaient majoritairement prononcé contre lui pendant les primaires du Grand Old Party.

Dans la nouvelle édition du livre que l’écrivain et documentariste Chris Whipple consacre au poste de chief of staff (The Katekeepers, Broadway Books, non traduit), le premier titulaire du poste, Reince Priebus, dresse un constat sans fard des six mois passés aux côtés du président. « Prenez tout ce que vous entendez [sur le fonctionnement de la Maison Blanche] et multipliez par cinquante », assure ce cacique du Parti républicain selon des extraits publiés par le magazine Vanity Fair.

Pour ne rien arranger, un avocat du président, Michael Cohen, a été contraint de reconnaître au New York Times, le 13 février, avoir versé personnellement, juste avant l’élection présidentielle, une somme de 130 000 dollars à une actrice de cinéma pour adulte, Stephanie Clifford. L’avocat ne précise pas le motif de ce versement, mais il pourrait s’agir d’une contrepartie financière au silence de cette dernière comme l’avait avancé le Wall Street Journal dans une série d’articles publiés en janvier.

Connue à l’écran sous le nom de Stormy Daniels, elle aurait eu une relation avec Donald Trump peu de temps après la naissance de son dernier fils, Barron, en 2006. L’actrice a laissé entendre le lendemain que l’aveu de l’avocat la libérait de ses obligations.