Coupe du Monde 2018 : au Maroc, la fête sur fond de défaite
Coupe du Monde 2018 : au Maroc, la fête sur fond de défaite
Dans les rues de Rabat, les cafés ont fait le plein pour le premier match du Maroc, battu sur le fil par l’Iran dans les arrêts de jeu.
Dans un café de Rabat, pendant la rencontre Maroc-Iran, vendredi 15 juin. / Mosa'ab Elshamy / AP
Ils y auront cru jusqu’au bout. Jusqu’à ces maudits arrêts de jeu et ce but contre son camp d’Aziz Bouhaddouz. Une victoire sur le fil de l’Iran (1-0) qui n’aura toutefois pas gâché cette journée exceptionnelle de football pour le royaume chérifien.
Dès le milieu de journée, Rabat avait pris des airs de fête en ce jour de l’Aïd el-Fitr, la cérémonie qui clôt le mois de ramadan. Dans les rues du centre-ville, les enfants déambulaient en étrennant les beaux habits offerts pour l’occasion. Pour tout le monde, le dress code était au rouge et vert, les couleurs de l’équipe nationale. Il fallait bien cela : le Maroc n’avait pas participé à une Coupe du monde depuis vingt ans.
En se qualifiant contre la Côte d’Ivoire en novembre, les Lions de l’Atlas ont permis à la jeune génération de rêver. C’est le cas de Fatima Zahra, 18 ans. Elle porte le sweat blanc frappé du logo des Lions et dit ne rater aucun match de ses champions. « Ils peuvent aller loin dans cette compétition, jusqu’en huitièmes [de finale] au moins », espère-t-elle. Venue regarder le match de ce vendredi avec quatre de ses copines au café La Capitale, sur l’avenue Mohammed-V, elle multiplie les selfies en attendant le coup d’envoi.
Dans les cafés de la capitale marocaine, l’hymne national est entonné à tue-tête, surtout la devise finale « Allah, Al-Watan, Al-Malik » (Dieu, la patrie, le roi). A chaque occasion de but, même minime, encouragements et cris fusent. Les bras se lèvent, les mains s’agitent dans l’air. Le public est mélangé : hommes d’un certain âge, adolescentes de sortie, groupes d’amis. Le jeu marocain de la première mi-temps enthousiasme. A tel point qu’Amina pronostique un 3-0 : « ils vont marquer juste à la fin de la première mi-temps, puis deux buts par la suite. Inch’Allah. » La mère de famille a ceint ses boucles noires d’un fichu vert à pois blanc et porte un tee-shirt rouge. A ses côtés, sa fille, 18 ans, a inscrit au marqueur sur un polo rouge « vive le Maroc ». Elle n’était pas née, lors de la dernière participation marocaine en 1998, sa mère, oui. « Je ne suis pas vraiment le foot, avoue Amina, mais là évidemment, nous sommes marocaines, alors, on supporte notre équipe. »
Une maladresse dans la dernière minute
A la deuxième mi-temps, la nervosité monte d’un cran : le signal devient mauvais, l’image se brouille. A l’écran, la chemise blanche d’Hervé Renard se pixélise, se mélange au gazon. Pas de transmission pendant de longues minutes. Ça revient, ça repart. Un grand gaillard vêtu aux couleurs marocaines s’adresse à l’assemblée et appelle à rester motivé. Des écouteurs dans les oreilles, il continue à suivre le match à la radio. A la coupure suivante, il lance, farceur : « On a marqué ! » Les spectateurs rient jaune.
Dans les ultimes minutes des prolongations, le but de Bouhaddouz, une tête mal maîtrisée contre son camp, signe la victoire de l’Iran. Cris stridents du premier étage. La plupart des clients quittent le café sans attendre le coup de sifflet final. Amine, la vingtaine, garde tout de même le sourire : « ils n’ont pas su s’adapter au jeu iranien. Et contre le Portugal, ça risque d’être encore plus difficile, mais j’espère quand même qu’on va gagner. » Sous les arcades qui longent l’avenue, Brahim, la quarantaine, débâche tristement son stand de friandises qu’il avait recouvert le temps du match. Il se souvient avoir assisté au Mondial au même endroit en 1998. Il enrage contre ce geste maladroit dans la dernière minute alors qu’« ils ont dominé la première mi-temps, même si l’Iran était plus fort dans la seconde ».
Pas question toutefois de gâcher l’atmosphère festive qu’on est venu trouver au centre-ville. Des familles se promènent, enjouées en ce jour férié aux accents de fête foraine. On achète aux enfants des bonbons et des ballons. Les pétards qui claquent font envoler des escouades de pigeons et des vuvuzelas continuent de sonner, têtues. Rendez-vous le 20 juin pour le match contre le Portugal.