Kalachnikov veut faire des voitures électriques
Kalachnikov veut faire des voitures électriques
L’ambition affichée du groupe russe est de concurrencer l’Américain Tesla.
AFP PHOTO / HO / Kalashnikov media
Du légendaire fusil d’assaut AK-47 à une incursion remarquée dans le domaine des véhicules électriques, en passant par les drones et les yachts, le fabricant d’armes russe Kalachnikov connaît une transformation sans précédents dans son histoire bicentenaire.
C’est avec stupéfaction que les visiteurs d’un forum militaire dans la région de Moscou ont pu découvrir la semaine dernière une petite voiture bleu pastel, au design vintage léché inspiré d’un rare modèle de l’époque soviétique. Avec sa nouvelle « supervoiture électrique » CV-1, Kalachnikov a réussi à faire bruisser la Toile, essuyant au passage quelques moqueries face à l’ambition affichée de concurrencer l’Américain Tesla.
Si la réaction a été vive, c’est que l’écart entre l’image du groupe et cette voiturette est grand : le fabricant est connu pour ses armes de guerre, et le nom de l’inventeur du AK-47 – Mikhaïl Kalachnikov – est devenu synonyme de fusil d’assaut dans le monde entier, et l’arme de choix d’innombrables conflits et guerres civiles.
Aujourd’hui, Kalachnikov produit 95 % des armes légères russes et exporte dans 27 pays, tandis que son célèbre fusil, que le groupe qualifie sobrement de « plus grand fusil du XXe siècle », en est bientôt à sa cinquième génération.
Casquettes et parapluies
Fondée en 1807 à Ijevsk (1 300 kilomètres à l’est de Moscou), l’usine Ijmach a subi une série de bouleversements depuis 2013, quand Rostec – la holding publique qui la contrôle – l’a fusionnée avec une fabrique voisine, Ijmekh, et a renommé l’ensemble du nom de son plus célèbre employé, Mikhaïl Kalachnikov, mort fin 2013 à 94 ans.
L’un des derniers actes publics du créateur du fusil le plus vendu au monde avait été de dénoncer auprès du président Vladimir Poutine le déclin de l’entreprise, une mauvaise gestion et les bas salaires des ouvriers.
Après l’arrivée d’actionnaires privés en 2014, de nouveaux modèles ont été présentés (fusils d’assaut, de chasse, armes de poing…), un changement d’image opéré avec le lancement de vêtements, de couteaux et d’accessoires, et l’accent a été mis sur les exportations malgré les sanctions américaines frappant l’entreprise à cause de la crise ukrainienne. Désormais, casquettes, parapluies et fusils en plastique sont disponibles dans des boutiques de « souvenirs » Kalachnikov.
Résultat de ces changements : Kalachnikov a annoncé en janvier 2017 une hausse de 30 % de ses effectifs avec 1 700 embauches pour répondre à la hausse de ses exportations. A la suite de l’introduction des sanctions le visant, Kalachnikov a transformé sa nouvelle filiale destinée à lui ouvrir le marché américain en entreprise distincte, Kalashnikov USA, fabriquant ses propres armes.
En février 2017, l’Etat devient minoritaire : le conglomérat géant militaro-industriel Rostec cède la majorité des actions au directeur général du groupe Alexeï Krivoroutchko, déjà actionnaire. Ce développement croissant de produits civils est d’ailleurs en ligne avec celui de Rostec, qui veut faire passer la part de son activité civile à 50 % d’ici à 2025, en s’appuyant notamment sur l’export.
Moto électrique en 2019
Avec ses nouveaux modèles de véhicules électriques, Kalachnikov se lance dans un secteur promis à un bel avenir mais qui n’en est qu’à ses balbutiements en Russie. Cet été, le groupe a fourni 30 motos et trois-roues électriques à la police pendant la Coupe du monde de football.
« L’année prochaine, nous lançons la vente de notre première moto électrique », a annoncé Vladimir Dmitriev, PDG par intérim depuis qu’Alexeï Krivoroutchko a pris un poste au ministère de la défense. « Nous parlons d’électro-mobilité, car nous comprenons que tôt ou tard le moteur va disparaître », a affirmé Olga Boïtsova, directrice commerciale pour les produits civils.
En 2018-2019, le groupe devrait également commencer à fournir des motos et voitures électriques aux Emirats arabes unis. Quand au prototype d’inspiration vintage, doté d’une autonomie de 350 km, il est susceptible d’être modifié et on ignore si et quand il serait lancé sur le marché.