Jacques Duchemin, « historien » de 86 ans, tient à la main un article qu’il a découpé dans Valeurs actuelles. « C’est vraiment un de mes magazines préférés », dit-il. Le vieil homme a lu dans les pages de l’hebdomadaire qu’un militant du parti Les Républicains (LR), Erik Tegnér, organisait, mercredi 5 septembre, une soirée dans le 5e arrondissement de Paris pour lancer sa campagne en vue de devenir président des Jeunes républicains. Son mantra : unir les droites, de LR au Rassemblement national (ex-FN), en passant par le parti Debout la France de Nicolas Dupont-Aignan. Jacques Duchemin n’est pas jeune, et il n’est pas militant LR non plus, mais l’idée lui plaît : « Quand j’ai vu l’article, je me suis dit que j’allais essayer d’y passer. »

Un peu plus de 200 personnes ont suivi le même chemin, et se sont rendues sur la péniche où le militant de 24 ans a donné rendez-vous. Tireuses à bière, musique de bar lounge, cathédrale Notre-Dame en arrière-plan, logo soigné, nombreux journalistes présents… Les gros moyens sont de sortie. « Cela nous a coûté entre 5 000 et 10 000 euros », assure le directeur de campagne d’Erik Tegnér, qui refuse de se montrer plus précis. Cet argent, ils l’ont trouvé, dit-il, auprès « de généreux donateurs, de tous les bords ». Le panel des invités, lui, est un camaïeu des droites extrêmes, entre le député RN du Nord Sébastien Chenu, l’ancien conseiller de Marine Le Pen Paul-Marie Coûteaux, ou encore l’ex-ministre de la défense Charles Millon, qui travaille depuis vingt ans à tenter d’abattre les murs entre droite et extrême droite.

Coterie

Nicolas Dupont-Aignan – soutien de Mme Le Pen au second tour de la présidentielle en 2017 – a aussi fait le déplacement pour défendre cette idée d’union. « C’est un long chemin, mais c’est le seul possible pour créer une alternative au mirage Macron », plaide le député de l’Essonne. Le rendez-vous n’est clairement pas un événement LR : il tient plus de la coterie de la droite hors les murs, ce courant de pensée identitaire qui se languit du retour éventuel en politique de Marion Maréchal. On croise sur la péniche des proches de l’ancienne députée FN du Vaucluse, ou encore le directeur de l’Institut de formation politique, cette école de toutes les droites dont la jeune femme s’est inspirée pour lancer son propre institut, à Lyon.

Un seul élu LR, adjoint à la mairie de Clichy (Hauts-de-Seine), a fait le déplacement. Le parti de la rue de Vaugirard ne soutient pas l’idée d’une alliance avec l’extrême droite. Son président, Laurent Wauquiez, n’entend pas sévir pour autant contre Erik Tegnér. « Je ne fonctionne pas par l’exclusion et l’anathème, a-t-il déclaré sur RTL, le 28 août. Il y a des débats et les adhérents des Républicains tranchent. »

Le scrutin pour élire le président des Jeunes républicains doit en théorie avoir lieu le 13 octobre, mais aucun guide électoral n’a pour l’heure été publié. Un rapport devait être remis, jeudi, à M. Wauquiez, pour l’éclairer dans son projet de refonte du mouvement. Les conditions pour pouvoir se présenter pourraient être précisées à l’issue du prochain bureau politique du parti, le 18 septembre. Selon plusieurs sources, deux militants proches du patron de LR, Aurane Reihanian et Omar Ben Abderahmen, tiennent la corde pour grimper sur le fauteuil de président des jeunes. « Ce sont les deux qui se détachent. Tegnér, il ne représente pas grand-chose à part lui-même », tranche un wauquiéziste.