En Allemagne, une ministre accusée de plagiat lors de la rédaction de sa thèse
En Allemagne, une ministre accusée de plagiat lors de la rédaction de sa thèse
Par Thomas Wieder (Berlin, correspondant)
Franziska Giffey, membre du SPD et chargée de la famille, rejette les allégations.
La ministre allemande de la famille, Franziska Giffey, en avril 2018 à Berlin. / JOHN MACDOUGALL / AFP
La ministre allemande de la famille, Franziska Giffey, membre du Parti social-démocrate (SPD), s’est-elle rendue coupable de plagiat en rédigeant sa thèse de doctorat ? C’est ce que soupçonne la plate-forme collaborative VroniPlag Wiki, spécialisée dans la traque au plagiat dans les travaux universitaires, qui a passé au crible la thèse de science politique soutenue par Mme Giffey à l’Université libre de Berlin, en 2010, sous le titre : « La Voie de l’Europe vers les citoyens. La politique suivie par la Commission européenne pour faire participer la société civile ».
Selon VroniPlag Wiki, dont les investigations ont été révélées, vendredi 8 février, par le Spiegel, des cas de plagiat auraient été identifiés sur 49 des 265 pages de ce mémoire. Dans quelques cas, il s’agirait de purs copiés-collés de travaux dont l’auteur n’est pas mentionné. Dans d’autres, il s’agirait de références attribuées de façon indue à telle ou telle source. Troisième cas de figure : des citations partiellement déguisées. Après avoir cité un extrait d’article ou de livre, Mme Giffey en aurait ainsi recopié d’autres passages plus ou moins à la lettre, en omettant les guillemets.
Interrogée par le Spiegel, la ministre a rejeté ces accusations. Assurant qu’elle avait « rédigé ce travail en toute bonne foi », elle a également annoncé qu’elle s’en remettrait au jugement de son ancienne université, à laquelle elle a officiellement demandé une expertise. Dans le pire des cas, celle-ci pourrait décider de lui retirer son titre de docteur.
« Lacunes évidentes »
Agée de 40 ans, Mme Giffey occupe une place singulière sur la scène politique allemande. Encore inconnue du grand public lors de son entrée au gouvernement, en mars 2018, cette ancienne maire de Neukölln, un quartier populaire de Berlin, est devenue, en moins d’un an, l’une des figures les plus populaires de l’équipe d’Angela Merkel, au point d’être aujourd’hui considérée comme une possible future présidente du SPD, un parti en pleine crise de leadership. Seule ministre – avec la chancelière – à avoir grandi en ex-Allemagne de l’Est, elle s’est notamment distinguée en étant la première membre du gouvernement à se rendre à Chemnitz (Saxe), le 31 août 2018, cinq jours après les premières violentes manifestations d’extrême droite provoquées par la mort d’un Allemand poignardé lors d’une altercation avec des demandeurs d’asile.
C’est la quatrième fois qu’un ministre de Mme Merkel est accusé de plagiat. A deux reprises, de telles affaires s’étaient conclues par des démissions après que les ministres visés se virent retirer leur titre de docteur par leurs anciennes universités, ce qui arriva aux conservateurs Karl-Theodor zu Guttenberg (défense, CSU), en 2011, et Annette Schavan (éducation, CDU), en 2013. Dans un cas, la ministre visée a finalement été blanchie et a pu conserver son poste : il s’agit de Mme von der Leyen (CDU), mise en cause par VroniPlag Wiki en 2015, deux ans après sa nomination à la défense, mais à qui la faculté de médecine de Hanovre a finalement décidé de ne pas retirer son doctorat, malgré l’identification dans sa thèse de « lacunes évidentes » dans l’attribution de certaines références.