Voyeurisme sexuel et mini-caméras : la Corée du Sud veut régler le problème du « molka »
Voyeurisme sexuel et mini-caméras : la Corée du Sud veut régler le problème du « molka »
Par Philippe Mesmer (Tokyo, correspondance)
Le tournage de vidéos volées dans les lieux publics ou à la maison, y compris à caractère pornographique, est une pratique répandue dans le pays.
Une mini-caméra installée dans un sèche-cheveux, à Séoul en Corée du Sud, où deux hommes ont été arrêtés pour avoir filmé les ébats de couples dans des motels à leur insu et les avoir mis en ligne. / - / AFP
Les affaires de caméras-espions n’en finissent plus d’empoisonner l’actualité sud-coréenne. En plein scandale impliquant l’acteur et chanteur Jung Joon-young, star de la K-Pop, arrêté jeudi 21 mars pour avoir filmé ses ébats avec des jeunes femmes sans leur consentement avant d’en partager le contenu sur un forum de discussions, la police a interpellé deux hommes accusés d’avoir installé des caméras dans 42 chambres de 30 motels d’une dizaine de villes de province.
Les modèles miniatures, dont l’objectif ne dépassait pas un millimètre, étaient dissimulés dans des décodeurs, des supports pour sèche-cheveux ou encore des prises de courant. Ces caméras permettaient d’enregistrer à distance des vidéos par la suite diffusées à travers un serveur basé à l’étranger.
Des dizaines de milliers de Coréennes contre le « molka »
Les deux « voyeurs » auraient vendu à une centaine d’utilisateurs d’un site dédié 803 vidéos, impliquant près de 1 600 personnes, pour lesquelles ils auraient empoché près de 7 millions de wons (5 500 euros). Le réseau a fonctionné du 24 novembre 2018 au 2 mars 2019. En juin 2018, la police avait arrêté plusieurs personnes pour des faits similaires. Cette fois-là, les vidéos n’avaient pas été mises en ligne.
Les motels sont particulièrement ciblés car ils proposent, dans des décors parfois kitchissimes, pour quelques heures et souvent pour quelques dizaines de milliers de wons, un moment intime à des couples en quête de discrétion, voire d’aventures. IIs s’ouvrent aujourd’hui à une activité d’hôtellerie plus traditionnelle, mais restent principalement fréquentés par les étudiants ou des personnes entretenant une relation extraconjugale.
L’enchaînement des révélations sur les affaires de vidéos tournées sans consentement traduit l’ampleur d’un phénomène de moins en moins accepté en Corée du Sud. L’année 2018 a été marquée par la mobilisation de dizaines de milliers de Coréennes contre le « molka », le tournage de vidéos par des caméras miniatures installées dans les lieux publics ou à la maison et ensuite mises en ligne.
La lutte contre ce fléau s’intensifie
Le gouvernement a réagi en décidant d’intensifier la lutte contre ce fléau. La Corée du Sud sanctionne de cinq ans de prison et de 30 millions de wons (23 300 euros) d’amende la diffusion d’images sans accord. Celle de contenus pornographiques peut conduire en prison pour un an et expose à 10 millions de wons (7 800 euros) d’amende.
En janvier, la cofondatrice – avec son mari et deux autres personnes ayant la nationalité australienne – du site de partage de vidéos pornographiques Soranet a été condamnée à quatre ans de prison, 1,4 milliard de wons (un peu plus d’un million d’euros) d’amende et à quatre-vingts heures d’éducation à la prévention des violences sexuelles.
Connue sous le pseudonyme de Mme Song, elle a animé ce site de 1999 à 2016, fermé par les autorités alors qu’il comptait près d’un million d’utilisateurs, dont certains auraient organisé des viols en réunion dont les images étaient ensuite partagées. Il servait également au « revenge porn », l’exposition, par vengeance, des photos de son ex-partenaire sexuel(le).
Corée du Sud : la police en campagne contre le voyeurisme sexuel
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