Réunis en assemblée, des « gilets jaunes » rejettent toute consigne commune pour les européennes
Réunis en assemblée, des « gilets jaunes » rejettent toute consigne commune pour les européennes
Par Aline Leclerc
Les 235 délégations rassemblées à Saint-Nazaire ce week-end ont publié lundi cinq appels communs évoquant revendications, actions et convergences.
Discours introductif à la séance plénière lors du deuxième jour de la seconde assemblée générale des assemblées de Gilet Jaunes à la maison du peuple de Saint Nazaire les 05-06 et 07 Avril 2019 introductif à la séance plénière lors du deuxième jour de la seconde assemblée générale des assemblées de Gilet Jaunes à la maison du peuple de Saint Nazaire les 05-06 et 07 Avril 2019 / THEOPHILE TROSSAT POUR "LE MONDE"
A l’issue d’un rassemblement de trois jours à Saint-Nazaire (Loire-Atlantique) ce week-end, 700 « gilets jaunes » représentant 235 groupes locaux de toute la France, ont publié plusieurs « appels » communs, lundi 8 avril. Le résultat de travaux menés collectivement depuis vendredi, et qui sera soumis au vote des groupes locaux.
Le premier texte est un appel « général », à l’adresse du « peuple dans son ensemble ». Ces « gilets jaunes » évoquent leur combat « contre les politiques d’extrémisme libéral » et « pour la liberté, l’égalité et la fraternité ». Ils y dénoncent « l’escalade répressive du gouvernement » et déplorent que face « aux aspirations convergentes des “gilets jaunes” et autres mouvements de luttes, le gouvernement panique et oppose une dérive autoritaire ».
Si les revendications sont toujours très nombreuses et diverses au sein du mouvement, l’appel en retient deux principales : « L’augmentation générale des salaires, des retraites et des minimas sociaux » et « des services publics pour toutes et tous ». Disant s’inscrire dans la durée, les « gilets jaunes » réunis à Saint-Nazaire évoquent par ailleurs un combat contre « un système global » pour lequel « il faudra sortir du capitalisme ».
Face à la baisse de mobilisation constatée dans les manifestations comme sur les ronds-points, ils appellent également à une « semaine jaune » d’actions à partir du 1er mai.
Des institutions « antidémocratiques » et « ultralibérales »
Quatre autres « appels » ont été publiés. Consacré aux élections européennes, l’un d’entre eux dénonce « le caractère antidémocratique et ultralibéral des institutions européennes ». « Le Parlement européen que nous élisons n’a même pas le pouvoir de proposer une loi ! La Commission européenne décide de tout sans aucun contrôle démocratique », fustige ce texte.
Alors que depuis plusieurs semaines, sur les pages Facebook de certains « gilets jaunes », dont le médiatique Eric Drouet, monte l’idée de s’accorder sur un même vote pour contrer la liste La République en marche-MoDem, cette « assemblée des assemblées » qui « ne reconnaît aucun leader autoproclamé », fait le choix « de ne donner aucune consigne de vote ou même de participation à ces élections » et condamne « toutes les tentatives de constitution de liste politique au nom des “gilets jaunes” ». Mais elle suggère de faire de cette période électorale une grande période de sensibilisation contre les institutions européennes.
Pour l’annulation des peines des « gilets jaunes » condamnés
Persuadés de la convergence entre leur combat et les combats écologiques, ces « gilets jaunes » insistent dans un troisième texte sur « l’urgence environnementale, sociale et démocratique ». « La taxe carbone est l’exemple parfait de la fausse écologie punitive qui cible les gens qui ne sont pas responsables, estime le texte. Or, il y a des responsables et des pollueurs à qui s’attaquer directement par des actions coordonnées. » Il invite à créer un nouveau « mouvement social écologique populaire ».
Les « gilets jaunes » réunis à Saint-Nazaire dénoncent, dans un quatrième appel, la « répression policière et judiciaire » du mouvement. « Ce que nous vivons aujourd’hui est le quotidien des quartiers populaires depuis des décennies. Maintenant, l’autoritarisme se généralise à toute la société », estiment-ils. Ils demandent « l’annulation des peines » des personnes condamnées depuis le début du mouvement – plus de 2 000 selon le ministère de la justice, qui précise que 40 % ont été condamnés à de la prison ferme.
Ils invitent notamment à rejoindre l’appel à manifester contre la loi anticasseurs lancé pour ce samedi 13 avril par plus de cinquante organisations dont la Ligue des droits de l’homme.
Enfin, un dernier texte plaide pour la création, dans chaque commune de France « d’une ou plusieurs assemblées citoyenne et populaire » dans l’idée d’une « réappropriation du pouvoir politique ». Une troisième « assemblée des assemblées » est d’ores et déjà annoncée pour le mois de juin.