« On a battu le record historique de Rennes » : une journée caniculaire en Bretagne
« On a battu le record historique de Rennes » : une journée caniculaire en Bretagne
Par Nicolas Legendre (Rennes, correspondance)
La température a franchi la barre des 40 °C en début de semaine, et pourrait aller encore plus haut à Rennes.
Infographie LE MONDE
Mardi 23 juillet, dans l’après-midi, le centre-ville de Rennes semblait vidé de ses badauds, partis chercher la fraîcheur en bord de mer ou calfeutrés à domicile, volets clos. Le fort vent de sud charriait un air brûlant comme on en avait rarement respiré dans les parages. Ici comme ailleurs en Bretagne, cette journée fut celle des extrêmes barométriques. Les capteurs de la station météorologique locale ont relevé 40,1 °C. « On a battu le record historique de Rennes depuis le début des mesures, en 1945 », indique Franck Baerer, responsable du service études et climatologie à Météo-France Ouest.
Le précédent maximum avait été atteint le 5 août 2003, quand le mercure avait grimpé jusqu’à 39,5 °C. Dans la région, dotée de nombreux microclimats mais caractérisée par une ambiance océanique aux hivers doux et aux étés généralement frais, des records de chaleur pour un mois de juillet sont tombés partout ou presque depuis le 22 juillet. Il a fait 35,9 °C à Saint-Brieuc et 38,8 °C à Pleslin-Trigavou (Côtes-d’Armor). Il fallait se rendre sur l’île de Batz (Finistère) pour trouver, à 17 heures, une température digne d’un début de printemps sur la Côte d’Azur (22,8 °C).
Dans ce contexte, les services de l’Etat se disent « mobilisés et vigilants ». Outre les aspects sanitaires – aucun décès lié à la chaleur n’a été signalé, ces derniers jours, dans la région –, le front des incendies est particulièrement scruté. « Lundi soir, on a eu connaissance d’un risque noir, c’est-à-dire extrêmement important, s’agissant des feux de forêt », indique Augustin Cellard, directeur de cabinet de la préfète de Bretagne. La « capacité de réponse opérationnelle » a été renforcée dans la foulée.
Au total, dix-huit feux de prairie et de champ ont été signalés en Ille-et-Vilaine durant la journée de mardi. Trente-trois hectares sont partis en fumée. Depuis le début de la semaine, dans le département, les pompiers ont éteint trente-quatre feux d’aires naturelles concernant plus de 60 hectares, essentiellement liés à des activités agricoles.
« Etat de crise sécheresse »
Dans un autre registre, la préfecture, qui assure un suivi du niveau des cours d’eau et des nappes phréatiques, a récemment placé en « état de crise sécheresse » la partie sud de l’Ille-et-Vilaine, soit 85 communes. L’arrêté entraîne diverses interdictions, dont celle d’arroser les pelouses. « Jusqu’à mi-juin, les précipitations étaient à peu près normales, explique M. Baerer. La sécheresse est donc importante, mais peu durable pour l’instant, comparée par exemple à l’épisode de 1976, durant lequel il n avait pas plu d’avril à juillet. »
Les agriculteurs, pour autant, doivent d’ores et déjà composer avec une situation exceptionnelle. En Ille-et-Vilaine, premier département laitier de France, la crainte d’un manque de fourrage commence à hanter les esprits. Loïc Guines élève cent vaches laitières sur 130 hectares en conversion biologique, à Saint-Marc-sur-Couesnon, aux confins de la Bretagne et de la Normandie. Mardi soir, ses animaux étaient « comme sonnés » : « Les vaches n’ont pas mangé comme d’habitude. Elles étaient moins vives et avaient le cœur qui battait un peu plus vite. »
Les prim’holstein de M. Guines n’ont, par ailleurs, pas mis le museau dehors depuis trois semaines : « Les prairies sont grillées. Il n’y a plus assez d’herbe pour bien les alimenter. On a encore assez de fourrage vert, qu’on récolte dans des champs situés plus loin, pour quinze jours. Mais on tape aussi dans les stocks d’hiver. S’il nous vient 30 ou 40 mm d’eau d’ici dix à quinze jours, on pourra sauver une partie de l’année. Mais si la sécheresse continue et que l’automne est aussi sec que celui de l’année dernière, alors ce sera difficile… »