Le portrait chinois d’Emily Loizeau
Le portrait chinois d’Emily Loizeau
Propos recueillis par Jérôme Badie
Chaque semaine, une personnalité répond à un questionnaire de Proust revisité par « L’Epoque ». La chanteuse, qui sort son quatrième album, « Mona », s’est prêtée à l’exercice.
Emily Loizeau. | MICKY CLÉMENT
Auteure, compositrice, interprète, Emily Loizeau sort le 27 mai son quatrième album, Mona (Polydor), réalisé en résidence au Centquatre, à Paris. Artiste à l’univers onirique et poétique, elle y raconte l’histoire d’une enfant, Mona, qui naît avec le « masque de la vieillesse et qui flétrit à vue d’œil », et, en parallèle, celle d’un bateau bombardé pendant la seconde guerre mondiale. Deux destins qui prennent l’eau… A l’aise en français comme en anglais, Emily Loizeau, 41 ans, mixe avec justesse les deux langues dans ses chansons. Elle sera en concert à La Cigale le 10 novembre et, en attendant, elle dévoile ici ses engagements et ses colères, sans pour autant sombrer dans le pessimisme.
Vous êtes un tweet en 140 caractères max.
Réfléchir au sens d’une vie désirable #NuitDebout.
Vous êtes une photo qui disparaît une fois consultée.
Moi au réveil, cherchant désespérément un peigne.
Vous êtes un complot ou une fausse rumeur.
Il paraîtrait que Vladimir Poutine a un tout petit zizi.
Vous êtes la fonction d’un robot intelligent.
Je suis l’humanisme.
Vous êtes une application mobile idéale.
Le mode « avion ».
Vous êtes une lanceuse d’alerte.
Je dénonce la composition des repas de cantine de nos enfants : présence de pesticides, d’OGM, de mercure, etc. #nosenfantsnousaccuseront
Vous êtes un réseau social.
Doctissimo. Plus sérieusement, il y a des réseaux sociaux super-intéressants, mais il y a aussi le réel. En ce moment, place de la République, après 18 heures : parler en vrai, s’écouter en vrai, se voir, échanger, réfléchir ensemble, prendre ce temps, rester éveillé et garder espoir pour demain.
Vous êtes un geste pas écolo.
A peu près chaque chose de mon quotidien, tant que la France ne nous proposera pas 100 % d’énergie renouvelable. Mais ça va changer !
Vous êtes un sandwich.
Je suis composée d’à peu près n’importe quoi, tant que c’est local et raisonné, et que cela n’a pas traversé la planète dans un film plastique pour finir dans un sandwich triangle dégueulasse, fourré avec des agents de saveur qui piquent les yeux pour que ça n’ait pas juste le goût de carton, le tout pour, au minimum, 5 euros.
Vous êtes un mot à la mode insupportable.
« Selfie » : terme conceptuel accolé au truc que tu fais depuis que tu as 12 ans avec ton appareil jetable, qui reste aujourd’hui tout aussi inintéressant mais devient un must que tu imposes à tout le monde y compris à ceux que tu ne connais pas. Non mais sérieusement : mourir sous les yeux de ses enfants en prenant un « selfie » au bord d’une falaise, c’est pas la mort la plus con du monde ?
Vous êtes un smiley ou un emoji.
Disons qu’en ce moment, globalement, je suis fâchée. Atterrée et fâchée. Mais si ce smiley peut aussi exprimer la joie, alors ça va, parce que j’ai décidé de croire que je peux agir joyeusement pour demain. Sinon, c’est foutu.
Vous êtes une série TV.
« L’Abécédaire de Gilles Deleuze », pour la quête de sens, et « Six Feet Under », parce que c’est juste tellement extrêmement bien.
Vous êtes « made in France » ou « tout à 10 euros » ?
Je suis « made in France » ou récup’recyclée.
Vous êtes Tinder ou fin de soirée arrosée ?
Tin-quoi ?
Vous êtes un hashtag.
#appeldecalais.