Manifestation contre le projet de loi travail : « On s’en souviendra en 2017 »
Manifestation contre le projet de loi travail : « On s’en souviendra en 2017 »
Par Adrien de Tricornot
Pendant qu’était examinée la motion de censure du gouvernement, les manifestants défilaient une nouvelle fois à Paris.
Manifestation contre le projet de loi de réforme du code du travail, place des Invalides à Paris, le 12 mai. | GONZALO FUENTES / REUTERS
La nervosité des services d’ordre syndicaux positionnés à l’avant du cortège était palpable, boulevard Raspail à Paris, dès le début de la manifestation contre le projet de loi de réforme du code du travail, mercredi 12 mai. Le but était d’éviter que des casseurs ne cherchent l’affrontement et ne fassent dégénérer à nouveau la manifestation. C’est ce qui s’est en partie produit pourtant. Mais cela n’a pas empêché le défilé d’un cortège épais d’opposants à la loi, depuis Denfert-Rochereau jusqu’aux Invalides, mobilisés contre le recours à l’article 49, alinéa 3, de la Constitution (dit 49-3) par le gouvernement pour faire passer son texte en force.
Au départ du défilé, William Martinet, président de l’Union nationale des étudiants de France (UNEF), dénonçait à propos de l’usage du 49-3 un « déni de démocratie » et une « fracture » entre le gouvernement et les attentes des jeunes.
« Le gouvernement va trop loin : le projet de loi est contesté dans l’opinion, par le mouvement social et au Parlement. Le passage en force de cette façon est toujours un aveu de faiblesse. »
De plus, le gouvernement s’était engagé le 11 avril « à introduire un amendement pour rendre obligatoire la surcotisation des CDD », dit-il. Position qu’il a abandonnée depuis pour renvoyer à une négociation entre partenaires sociaux. « C’est une déresponsabilisation qui n’est pas acceptable », proteste William Martinet, qui continue à demander le retrait du projet de loi : « Avec ce qu’on appelle “l’inversion de la hiérarchie des normes”, il mène à un projet de société avec toujours plus de concurrence et toujours plus de précarité. »
Nuages de gaz lacrymogène
Telle était aussi la tonalité chez les manifestants, parmi lesquels de nombreux jeunes venus crier les mêmes slogans que depuis le début de la mobilisation : « Assez de cette société qui n’offre que le chômage et la précarité » ; « Les jeunes répondent : résistance ! » ou « Derrière la loi travail se cache le capital » Le tout, aussi, au son entraînant de percussions brésiliennes du Batucada et avec l’esprit potache et joyeux, comme ces jeunes qui brandissaient une pancarte « free hugs CRS » (« étreintes libres avec les CRS »), avec des cœurs dessinés. Mais il y avait aussi des silhouettes cagoulées et mobiles, venues en découdre et rechercher l’embrasement qui ferait résonner les slogans antipolice.
Et, une fois de plus, des incidents ont éclaté sur le parcours. Et la riposte a encore consisté en l’envoi de nuages de gaz lacrymogène. Presque une habitude pour les jeunes manifestants qui se sont immédiatement mis leurs écharpes et ont sorti les collyres... Avec la pluie, la fin de la manifestation dans ce grand nuage de lacrymogène les rendait amers. Comme cette étudiante : « Indignée : à chaque fois, c’est la même chose : l’ambiance est super et on se retrouve pris dans cet engrenage. »
Oppressées par la nuée des lacrymogènes lors de l’arrivée aux Invalides, des manifestantes filaient aussi, parapluie à la main, chercher plus loin un peu d’air, non sans lancer : « C’est honteux ! » ou « On s’en souviendra en 2017. »
Selon le ministère de l’intérieur, les manifestations de ce jour n’ont mobilisé que 55 000 personnes au niveau national — les chiffres des syndicats n’ayant pas encore été communiqués, sinon à Paris, où ils revendiquent... 50 000 manifestants.