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« La seule vraie difficulté que j’ai rencontrée est d’entendre mes voisins mâcher goulûment des gâteaux pendant les épreuves ! », s’amuse Samir, 17 ans qui a répondu à l’appel à témoignages du Monde Campus sur comment concilier ramadan et épreuves du bac. Ce lycéen, qui passe son bac scientifique à Bois-Colombes (Hauts-de-Seine), a choisi de respecter le mois de jeûne.

Même quiétude pour Mohamed, aspirant bachelier parisien, qui bénit en outre la météo maussade qui épargne les étourdissements liés à la chaleur : « Les conditions climatiques rendent le jeûne tout à fait supportable, explique-t-il. Je ne suis certes pas dans des conditions optimales pour passer le bac mais j’ai bien travaillé durant l’année. De plus cette difficulté supplémentaire est comme un challenge, je donne le meilleur de moi-même et le jeûne m’aide à penser à ceux qui affrontent cette faim tous les jours. »

Une organisation drastique

Comme Samir et Mohamed, ces candidats se doivent d’observer une organisation millimétrée pour s’astreindre aux horaires du jeûne et des prières et ne pas faire de faux pas sur le plan scolaire. « Lorsque j’ai appris que les épreuves du bac tombaient en même temps que le ramadan, j’ai paniqué, se souvient Noela, 16 ans, élève en terminale S à Pau. J’ai organisé mon planning de façon très rigoureuse : moins de pauses et plus de travail. Les premiers jours ont été difficiles mais j’ai appris à m’habituer et, pendant les épreuves, les maths prennent le dessus sur la faim ! »

« Pour mon premier repas, je me lève aux environs de quatre heures du matin, décrit Houssam, le début du jeûne coïncidant avec les premières lueurs de l’aube. Je prépare un repas riche en protéine et en sucre, puis je me rends à mes épreuves. Je profite de l’après-midi pour dormir un peu et je me couche vers 22 h 30. » Pour décrocher son baccalauréat, il est néanmoins prêt à rompre le jeûne : « Je garde au cas où sur ma table une bouteille d’eau, des biscuits sucrés et un fruit. Mais pour le moment tout se passe bien, malgré quelques nuits d’insomnies. »

« Notre premier conseil à nos élèves est de prendre soin d’eux, leur réussite dépend de leur forme physique, qu’ils doivent optimiser, explique au Monde Younès Yousfi, directeur du collège-lycée musulman Ibn Khaldoun, à Marseille. Et s’il est trop dur pour eux de concilier les examens et le ramadan, nous leur expliquons qu’ils ont la possibilité de rompre le jeûne, ce qui est admis religieusement parlant. »

Labor omnia vincit improbus

Pour Tarek, qui passe son bac ES pour la deuxième fois, le ramadan a été un obstacle à sa concentration. « Pour ce qui est du sommeil, ça peut se révéler très problématique, raconte le jeune homme. L’année dernière, je faisais le ramadan et je n’avais pas dormi avant les épreuves du matin, ça a été difficile à gérer… Cette année, je repasse le bac en candidat libre et je rate quatre jours de jeûne afin d’assurer mes épreuves. »

Une situation que comprend parfaitement Reda, en terminale scientifique : « Chaque individu est unique et a sa propre expérience du jeûne », confie celui qui se qualifie comme « un élève avec beaucoup de facilités. […] Pour certains, le ramadan représente une contrainte et une accumulation de fatigue, pour ma part, ayant passé l’oral de latin dès le premier jour du ramadan, je dirais Labor omnia vincit improbus [un travail acharné vient à bout de tout]. »

A cœur vaillant, rien d’impossible, telle est également la devise de Ryan, étudiant dans un lycée militaire, qui cumule cette année défilés, entraînements, épreuves du bac et jeûne. « Nous sommes 8 sur 350 à faire le ramadan dans mon lycée, et le soir, certains de mes supérieurs viennent nous voir pour nous poser des questions, ce qui permet un échange. » Et pour amadouer ses camarades qu’il réveille parfois en se levant au milieu de la nuit, Ryan a trouvé la parade : « Je leur offre des gâteaux et des bonbons, ça redonne le sourire à tout le monde ! »

De quoi patienter dans la bonne humeur jusqu’aux résultats du bac le 4 juillet et la rupture du jeûne, le 6.