Campagne de presse « Et si la solution était sous nos yeux » de la FNCPA. | FNCPA

Si vous souhaitez faire des études qui vous mèneront tout droit à Pôle emploi, choisissez l’université ! C’est, en filigrane, le message que fait passer une campagne de communication du Fonds national de promotion et de communication de l’artisanat (FNPCA), lancée sur l’ensemble du territoire depuis le 1er juin, alors que près de 700 000 lycéens finalisent leur orientation postbac. Sur l’une des affiches, on lit en lettres rouges : « Quand la fac est finie, on cherche », et en caractères bleus : « Quand l’apprentissage est fini, on trouve ».

De la publicité comparative sur la professionnalisation des deux filières, en somme, qui a fait grincer quelques dents au sein des universités. Depuis vingt ans, celles-ci ont en effet intégré la formation en alternance dans leurs cursus et, même si cela est peu su, elles sont désormais le principal poumon du développement de l’apprentissage.

Moins d’apprentis sauf dans l’enseignement supérieur

En 2012, en début de quinquennat, François Hollande s’était engagé à atteindre 500 000 contrats d’apprentissage en cinq ans. Une promesse qui fait écho à d’autres engagements pris avant lui – en 1993, puis en 2005 – et qui ne sera probablement pas davantage tenue.

Le flux actuel dépasse juste 400 000 contrats, et le nombre d’apprentis est en repli constant, sauf dans l’enseignement supérieur où l’apprentissage se porte bien. Après l’Essec, un des établissements pionniers, la majorité des écoles de commerce développent ces formations. Ils étaient 138 000 jeunes, à la rentrée 2013, à effectuer leur apprentissage dans le supérieur, représentant 32,5 % du total des apprentis, en hausse de 95 % depuis 1995, selon le secrétariat d’Etat chargé de l’enseignement supérieur.

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Durée : 03:01

Pour la seule région Ile-de-France, on compte pas moins de 162 formations dans 17 établissements, dont 10 universités, qui accueillent 3 400 élèves. « L’apprentissage est présent dans tous les secteurs de l’enseignement supérieur, y compris la recherche », souligne Jean-Pierre Dudezert, directeur du centre de formation d’apprentis (CFA) privé Formasup Paris.

Enseignants, chefs d’entreprise et étudiants répondent à l’unisson : l’issue d’une formation supérieure en alternance, c’est l’emploi

Pourquoi un tel succès ? Enseignants, chefs d’entreprise et étudiants répondent à l’unisson : l’issue d’une formation supérieure en alternance, c’est l’emploi. « L’apprentissage ne permet pas seulement d’acquérir des connaissances, mais également des compétences. C’est ce que demandent les employeurs. A la fin de leur formation, les étudiants sont embauchés en trois mois », affirme Yves Cimbaro, président de l’Association nationale pour l’apprentissage dans l’enseignement supérieur (Anasup).

Une enquête du Centre d’études et de recherches sur les qualifications (Céreq), publiée le 17 mai, le corrobore : passer par l’apprentissage facilite l’insertion professionnelle. Quel que soit le niveau de formation – DUT, licence, master professionnel ou grande école –, le taux de chômage des apprentis est significativement inférieur. A titre d’exemple, « pour les diplômés d’un master professionnel par la voie scolaire, le taux de chômage est de 16 %, contre 10 % pour ceux issus de l’apprentissage », pointe le Céreq.

Symbiose

Pour coller au mieux aux besoins des entreprises, grandes écoles et universités conçoivent leurs formations en partenariat avec le tissu économique local. Chambres de commerce, chambres des métiers, entreprises donnent le « la » de leurs besoins. « Nous établissons le contenu et le format des formations en fonction de la demande du marché », reconnaît Yves Cimbaro. Et côté entreprise, « lorsqu’une université vient nous proposer un apprentissage, nous regardons toujours dans quelle mesure nous pourrons placer des jeunes dans nos sociétés », confirme Richard Skrzypczak, directeur adjoint chargé de l’enseignement et de la formation à la chambre de commerce et d’industrie de la région Ile-de-France.

Le succès de l’apprentissage tient en effet à la symbiose que le système permet entre l’offre et la demande. D’un côté, des entreprises qui ont besoin d’anticiper et de préparer leurs besoins humains, de l’autre, « les universités qui doivent s’adapter pour que les entreprises poursuivent le recrutement d’apprentis », note François Germinet, président de l’université de Cergy-Pontoise. Un établissement qui compte 1 600 apprentis et 2 000 étudiants en alternance.

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L’apprentissage, « c’est une opportunité, martèle Pauline Escande-Gauquié, maître de conférences à l’université Paris-Sorbonne Celsa. C’est un contrat de travail, un salaire et la possibilité de se voir confier des missions professionnalisantes que l’on ne confierait pas à un stagiaire ». On est loin du stage café-photocopieuse. L’apprenti est un rouage de l’entreprise.

« Lorsque nous arrivons sur le marché du travail, nous sommes prêts, nous connaissons l’ensemble des métiers de la chaîne », témoigne Amandine Hornebeck, en master 2 de politique éditoriale à Villetaneuse-Paris-XIII. Lorsqu’un employeur demande un recrutement avec un ou deux ans d’expérience, les apprentis peuvent les afficher sur leur CV, ce qui n’est pas le cas pour les candidats des filières traditionnelles. « L’apprentissage est un tremplin », résume Pauline Escande-Gauquié.

Alors, pourquoi opposer université et apprentissage ? « La cible de cette campagne, ce n’est pas les étudiants en apprentissage, mais les idées reçues que les jeunes, comme leurs parents, ont sur les métiers manuels », explique Antoine Monnin, directeur du FNPCA. Bien que maladroite, sa campagne de communication montre qu’il est nécessaire de changer l’image d’un apprentissage qui serait réservé aux jeunes en échec. Le développement de filières d’excellence au sein des universités et des grandes écoles y contribue.