Optimiser sa mémoire pour mieux réviser
Optimiser sa mémoire pour mieux réviser
Vous avez la sensation de ne plus arriver à apprendre ne serait-ce qu’une seule notion supplémentaire ? Pas de panique, peut-être n’avez-vous tout simplement pas la bonne méthode !
Retenir le plus efficacement possible, tel est le but des révisions. Pour compléter les conseils méthodologiques de vos enseignants, nous avions consulté en 2015 le spécialiste français de la mémoire, Alain Lieury. Ce scientifique, auteur de plusieurs livres, dont Une mémoire d’éléphant et Le livre de la mémoire (Dunod), vous explique à nouveau comment optimiser votre organisation de révision pour booster votre mémoire.
Que se passe-t-il quand on apprend ?
Tout apprentissage ou souvenir correspond à des connexions entre neurones, un peu comme les connexions électriques dans votre maison. Or ces connexions ne s’établissent pas par magie, mais se construisent biologiquement par la poussée (comme des racines de plantes) de milliers de ramifications, les dendrites. Et la loi des neurones, c’est la répétition. C’est en répétant qu’on apprend. Il n’y a pas de miracle.
J’ai envie de vous poser la question qui hante tout lycéen, collégien ou étudiant. Comment évite-t-on le trou noir le jour de l’examen ?
Pour éviter le « trou noir », il faut bien ranger ses connaissances. Et cela se fait en révisant. Il faut avoir accès très vite à des connaissances succinctes rangées dans sa mémoire de court terme (ou mémoire de travail) qui vont renvoyer dans notre mémoire de long terme.
En fait, on a deux mémoires : la mémoire à court terme ne dure que vingt secondes, elle ne sert donc qu’à organiser les informations, par exemple les infos qui vont ensemble, pour les stocker « intelligemment » dans la mémoire à long terme. Si c’est bien fait, ce petit fichier renverra automatiquement à une bibliothèque plus complète. La mémoire immédiate est un fichier à sepet cases. C’est-à-dire à peu de place. Pour bien s’installer dedans, une leçon doit être résumée à un plan. Idéalement trois titres et quatre sous-titres. Il faut donc que l’élève ou l’étudiant fasse une fiche.
Ou emprunte les fiches, déjà toutes faites, de son camarade ?
Non. Un lycéen doit faire lui-même ses fiches car c’est un excellent exercice qui permet un travail de va-et-vient entre mémoire à long terme et mémoire à court terme. C’est-à-dire qui permet d’apprendre vraiment.
Où vont se ranger les définitions qu’on apprend en sciences, en maths ou en histoire ? Comment bien les apprendre ?
Notre mémoire à long terme se compose de deux « bibliothèques » spécialisées pour les mots. L’une permet de retenir l’orthographe (mémoire lexicale), l’autre le sens (mémoire sémantique). Pour faire entrer une des multiples définitions qu’un lycéen doit apprendre, la principale méthode est la répétition, le fameux apprentissage par cœur, qu’il faut réhabiliter. Il faut en général un nombre de répétitions moitié moindre que le nombre de mots à apprendre : dix répétitions pour vingt mots. Si les mots sont difficiles phonétiquement, il faut les subdiviser en syllabes pour mieux les apprendre, Xénophon, mycellium. C’est particulièrement le cas en chimie pour les molécules complexes, comme le fameux Acide desoxyribonucléique en acide-desoxy-ribo-nucléique (ribo étant la contraction d’un sucre, le ribose)…
Une fois qu’on connaît les mots, il faut aussi les comprendre : c’est le but ! Comment optimiser cette phase ?
La mémoire sémantique enregistre des abstractions, des idées, des concepts. Sa structure est hiérarchique comme dans une arborescence. Par exemple, un aigle est classé dans la catégorie des oiseaux, elle-même classée dans la catégorie des vertébrés, puis des animaux. Il faut donc faire des fiches bien structurées, des plans, des schémas, des arborescences.
On a aussi une mémoire visuelle, qui fait qu’on « photographie » son cours, non ?
Cette croyance est fausse. Les mémoires sensorielles existent bien, mais elles sont éphémères. La mémoire sensorielle visuelle ne dure qu’un quart de seconde, la mémoire auditive deux secondes et demi. L’impression de « voir » la page d’un livre vient d’une autre mémoire, la mémoire imagée.
Qu’est-ce que cette mémoire imagée et comment l’utiliser ?
Cette mémoire fabrique des images mentales durables, mais reconstruites. Donc, fixer un schéma ou une carte de géographie pour les photographier est une illusion totale. La meilleure méthode est l’apprentissage multi-essais. Par exemple, vous apprenez en répétant les mots de la carte pendant une minute, puis vous reproduisez sur une feuille la réponse sans regarder le modèle ; puis vous réapprenez pour un deuxième essai pendant une minute la carte, et ainsi de suite jusqu’à reproduction parfaite. On parle de surapprentissage lorsque le critère de reproduction est plus difficile, par exemple trois essais consécutifs sans erreur. Le surapprentissage est plus sûr pour réussir, évidemment.
Existe-t-il des aliments meilleurs que d’autres pour notre mémoire ? Le poisson, comme disaient nos grands-mères ?
Comme les neurones sont de vrais « usines », il leur faut de l’énergie. Cela signifie bien s’alimenter, avec des protéines (viande, poisson, œuf), mais aussi tous les nutriments essentiels, des lipides, des sucres, des vitamines et des minéraux. À l’inverse, il faut supprimer tout ce qui est nocif pour le cerveau : l’alcool (qui détruit les neurones et une structure qui enregistre les souvenirs), le tabac (qui réduit la fluidité sanguine cérébrale), et les drogues, y compris le cannabis, qui déséquilibrent les échanges chimiques entre les neurones.