La BCE rachète les dettes des groupes du CAC 40
La BCE rachète les dettes des groupes du CAC 40
LE MONDE ECONOMIE
Lundi 18 juillet, l’institut monétaire européen a dévoilé la liste des dettes d’entreprises qu’il rachète, dans l’espoir de soutenir l’activité et les prix. Les grands groupes français sont privilégiés.
Le suspens est enfin levé. Lundi 18 juillet, la Banque centrale européenne (BCE) a dévoilé la liste des obligations d’entreprises qu’elle a commencé à racheter le mois dernier. Au total, l’institution a acquis pour 10,427 milliards d’euros de dettes privées entre le 8 juin et le 15 juillet. Si le montant par entreprise et par pays n’est pas connu, une chose est sûre : selon les analystes, les grands groupes tricolores arrivent en tête.
« Ce n’est pas une surprise : le marché obligataire français est le plus gros de la zone euro, devant l’Allemagne, les Pays-Bas et l’Italie », explique Maxime Sbaihi, économiste chez Bloomberg Intelligence.
Dans le détail, la BCE a ciblé une bonne partie du CAC 40 : Axa, Total, Danone, Sanofi, Orange, Pernod Ricard ou encore Air Liquide et Schneider Electric ont vu une partie de leur dette rachetée par l’institution. Le luxe est également prisé, avec LVMH et Kering, tout comme l’énergie avec Engie et Total. Hors CAC 40, sont présents La Poste, JC Decaux ou EDF. Les groupes allemands, comme BMW, BASF et Daimler, ont également été privilégiés par la BCE.
Taux négatif
Celle-ci s’est lancée dans le rachat de dettes privées en complément de celui de dettes publiques, entamé en 2015. Au total, ces programmes représentent un volume de 80 milliards d’euros par mois, dont seule une petite partie est consacrée aux obligations d’entreprises (3 à 6 milliards par mois environ). Les dettes privées éligibles doivent être notées au moins « BBB – » par l’une des trois grandes agences de notation, afin de garantir leur qualité. Les titres de banques et de filiales de banques sont exclus, mais pas ceux des assureurs.
Objectif ?
« En rachetant la dette de grands groupes, la BCE cherche à faire baisser leurs coûts de financement et, par contagion, celui d’entreprises plus petites », explique Jean-François Robin, chez Natixis.
A première vue, cela fonctionne : depuis que ce programme a été annoncé, les taux obligataires privés ne cessent de baisser. Un quart des titres d’entreprises de la zone euro s’échangent même à taux négatif !
Une efficacité contestée
En outre, « ces achats augmentent la quantité d’euros en circulation et contribuent à tirer la monnaie unique à la baisse face au dollar », explique Pascale Seivy, chez Pictet WM. De quoi augmenter un peu les prix des produits importés, aidant ainsi la BCE à tirer l’inflation vers sa cible de 2 %.
Certains économistes restent néanmoins dubitatifs quant aux effets d’une telle mesure sur la croissance. Les PME, qui n’empruntent pas sur les marchés obligataires, mais auprès des banques, n’en profitent que très indirectement, tandis que les grands groupes, qui se financent sans problème, n’avaient pas tellement besoin d’un tel coup de pouce.
De plus, une poignée de titres rachetés par la BCE, notamment en Italie, sont classés en catégorie spéculative par deux agences de notation sur trois. « L’institut monétaire prend des risques inconsidérés », redoute ainsi l’institut allemand IFO. Ce que la BCE réfute, avançant qu’elle passe sérieusement au crible tous les titres qu’elle cible. Et que les dettes privées ne représentent qu’une part infime de ses achats…