Hommage aux victimes du forcené de Munich, devant le centre commercial Olympia. | Peter Kneffel / AP

L’enquête sur la tuerie de Munich a largement progressé ce week-end et ce lundi, avec l’arrestation d’un jeune homme suspecté de complicité avec David Ali Sonboly, l’auteur de la tuerie qui s’est donné la mort après avoir tué neuf personnes.

  • D’où provenait l’arme utilisée à Munich ?

Selon la police de la ville, le pistolet utilisé par David Ali Sonboly, un Glock 9 mm, a vraisemblablement été acheté en ligne, sur un site de vente du Dark Net. Les sites du Dark Net ne sont pas indexés dans les moteurs de recherche : pour y accéder, il faut utiliser un navigateur spécifique, appelé Tor, qui permet de surfer de manière anonyme en ligne. Il faut également connaître l’adresse du site, puisqu’il n’existe pas de moteur de recherche. On trouve sur le Dark Net des sites de tous types, et notamment des boutiques en ligne qui proposent à la vente des objets illégaux (armes, drogue…).

  • Ces sites permettent-ils d’acheter des armes de façon totalement anonyme ?

Non. Ils offrent une certaine discrétion, notamment pour l’administrateur du site, mais ces mesures de protection sont loin d’être infaillibles. Douanes et polices du monde entier sont déjà parvenues à faire fermer plusieurs très gros sites de ventes de produits illégaux du Dark Net et à en interpeller les administrateurs. En 2013, le FBI avait ainsi fait fermer la première version du site Silk Road, surnommé « l’eBay de la drogue », après une opération de très grande ampleur. Son administrateur est aujourd’hui en prison, et les polices du monde entier continuent d’arrêter des revendeurs que la saisie des serveurs de Silk Road a permis d’identifier – la police norvégienne a ainsi interpellé en avril quinze personnes accusées de gérer d’importants réseaux de revente dans le pays.

L’acheteur, qui règle dans la majorité des cas en BitCoins, une monnaie virtuelle réputée anonyme, n’est pas non plus totalement à l’abri, notamment parce qu’il faut bien donner une adresse de livraison pour recevoir la marchandise, ce qui limite en bonne partie l’anonymat dont il peut jouir.

  • David Ali Sonboly aurait-il pu se procurer son arme sans avoir recours au Dark Net ?

Oui – d’ailleurs la police de Munich, très prudente depuis la tuerie dans les informations qu’elle diffuse, précise ne pas être certaine que David Ali Sonboly est passé par ce canal pour se procurer l’arme utilisée dans la tuerie. Il s’agissait en effet d’une arme dite « neutralisée », à savoir une arme réelle dont l’utilisation a été rendue impossible (en perçant le canon, en rendant son mécanisme hors service… plusieurs techniques existent). La vente de ces armes est alors légale sans grandes formalités – principalement à destination des collectionneurs ou des accessoiristes de cinéma ou de théâtre, et il est possible de s’en procurer sur des sites spécialisés qui ne sont pas hébergés sur le Dark Net. Le chef de la police de Munich a d’ailleurs affirmé dimanche que l’arme utilisée était un « pistolet de théâtre ».

Les techniques utilisées pour la neutralisation rendent théoriquement l’arme totalement inutilisable – mais des spécialistes dotés d’un équipement professionnel peuvent parvenir à les remettre en état de fonctionnement dans certains cas. Fin 2015, après les attentats de Paris, la Commission européenne a d’ailleurs durci le règlement encadrant ces armes, pour harmoniser les techniques de neutralisation. Jusqu’à il y a peu, les pays de l’UE n’avaient pas tous le même standard concernant ce qui constitue une neutralisation effective.

Le ministre de l’intérieur allemand, Thomas de Maizière, a cependant dit dans un entretien au quotidien Bild qu’il n’excluait pas de durcir à nouveau la législation allemande, déjà très stricte, sur l’accès aux armes à feu.

  • Comment a-t-il pu acheter 300 munitions ?

C’est, avec l’identité de la personne qui a remis le Glock 9 mm en état de fonctionnement, la principale question qui reste en suspens, et sur laquelle les enquêteurs allemands n’ont pas encore apporté d’explications. Le jeune homme avait dans son sac à dos environ 300 munitions 9 mm, alors qu’en Allemagne, l’achat de munitions est lui aussi très sévèrement encadré – il faut disposer d’une autorisation de détention pour pouvoir en acheter.