Teddy Riner pose devant le score vierge du Japonais Daiki Kamikawa, en février 2011, après avoir gagné le Tournoi de Paris. | © Regis Duvignau / Reuters / REUTERS

Vendredi 12 août, Teddy Riner entrera en lice dans l’immense Arena Carioca 2 de Rio pour décrocher un deuxième titre olympique. Cela fait presque six ans que l’octuple champion du monde n’a plus perdu de combat. La dernière défaite en date remonte au 13 septembre 2010. Ce jour-là, le Français, épuisé par sa compétition quatre jours auparavant où il s’était emparé d’un quatrième titre mondial chez les + de 100 kg, affronte en finale des Mondiaux toutes catégories le Japonais Daiki Kamikawa. Le match, extrêmement serré, tourne à l’avantage du Nippon, qui remporte le titre aux drapeaux. Excédé, en pleurs, le colosse guadeloupéen envisage d’arrêter la compétition avant de se raviser : désormais, il jure qu’il ne se fera jamais plus « voler son bifteck par les arbitres ». Pari tenu.

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Si quelques judokas ont parfois réussi à le déstabiliser ces dernières années, aucun n’a véritablement été en mesure de l’inquiéter au point de remettre en cause sa suprématie. Le Monde, par compassion envers les adversaires du maître des lourds, leur livre quelques astuces un brin farfelues, sans toutefois les avoir testées, pour en venir à bout.

  • RÉTABLIR LES SAISIES AUX JAMBES

Teddy Riner combat le Russe Alexander Mikhalin aux Mondiaux de 2008 toutes catégories à Levallois. | FRANCK FIFE / AFP

En 2008, lassée de combats qui s’apparentent de plus en plus à des matchs de lutte, la Fédération internationale de judo (FIJ) interdit toute saisie directe aux jambes. Seules les saisies en position défensive, après garde installée, sont autorisées. Après avoir constaté que cette règle ne dissuadait en rien les judokas de venir chercher les jambes, pour contrer sur te-guruma par exemple, la FIJ décide de les bannir une bonne fois pour toutes en 2012. Fini les kata-guruma et autres techniques inscrites pourtant dans le Gokyo (le répertoire de toutes les techniques élaboré par l’inventeur du judo Jigoro Kano), la moindre saisie dans les cannes sera désormais sanctionnée d’un hansoku-make, soit l’élimination pure et simple du combat.

Si un adversaire de Teddy Riner pouvait à nouveau aller le chercher aux jambes, peut-être trouverait-il une ouverture pour marquer en se jouant de l’allonge de l’octuple champion du monde.

  • RÉTABLIR LE KOKA

Teddy Riner, au sol, face au Japonais Ryu Shichinohe en finale des championnats du monde à Tcheliabinsk, en Russie, en août 2014. | VASILY MAXIMOV / AFP

Le koka était jadis le plus petit avantage du judo. Il était accordé par l’arbitre au combattant qui avait réussi à faire tomber son adversaire sur les fesses. L’effet pervers de cet avantage, c’est que beaucoup de judokas, dans des matchs très serrés et fermés, ne se contentaient que de lui pour gagner. Pas des plus folichons pour le spectacle, ni des plus esthétiques pour l’amateur de ippons, l’avantage roi qui met immédiatement fin au combat. En 2008, la FIJ décide de supprimer cet avantage pour engager les combattants à se livrer davantage. Toutefois, en 2014, en finale des championnats du monde à Tchliabinsk (Russie), si le koka avait encore été de mise, le Japonais Ryu Shishinohe aurait peut-être remporté le titre face à Riner. Alors qu’il était mené de trois pénalités, le Nippon avait lancé un o-uchi-gari qui avait fait tomber le Français sur le postérieur. Le problème, c’est que Riner aurait sûrement gagné par la suite, comme il le confiait au Monde en mai 2015 : « S’il avait marqué, j’aurais mis la boîte (ippon) derrière ou je l’aurais fait sanctionner. Je fais souvent ce genre d’exercice avec mon entraîneur Frank Chambily où je dois marquer sur trente secondes. » Et jusqu’à maintenant, personne n’a pu y résister.

  • AUTORISER LE DOPAGE

L’Ouzbek Abdullo Tangriev, vainqueur du combat contre le Cubain Oscar Brayson en quarts de finale des JO 2008, à Pékin. | PEDRO UGARTE / AFP

Du haut de ses 2,04 mètres pour 145 kilos, Teddy Riner est un adversaire intimidant, comme le confiait au Monde le responsable de l’équipe de France masculine Stéphane Frémont : « Ce n’est pas évident de combattre contre Teddy, car il y a une dimension psychologique imposée par son palmarès. Il faut être prêt à l’affronter. Sinon tu es mort. Son torse, ses bras dégagent une telle énergie ! Il a un côté tueur et il peut se permettre de décider ce qu’il va placer. » C’est d’ailleurs cette perspective effrayante qui fit fuir le Coréen Kim Sung-min en finale du Tournoi de Qingdao (Chine), le 22 novembre 2015. Eliminé pour non-combativité, le malheureux perdant s’était fait sermonner par le vainqueur sur le podium. « Teddy lui a demandé pourquoi il ne tentait pas crânement sa chance. Le Coréen lui a répondu : Tu ne te rends pas compte, je ne peux rien faire », rapporte Stéphane Frémont. Une semaine plus tard, au Grand Prix de Jeju (Corée du Sud), les deux adversaires se rencontraient une nouvelle fois en ­finale. Kim Sung-min a bien tenté de suivre à la lettre les conseils de son bourreau. Mais le combat s’est achevé prématurément sur un ippon brutal. Et le Coréen de constater une nouvelle fois la puissance de ce mur auquel se heurte le judo japonais depuis de nombreuses années.

Pour se donner un peu de baume au coeur, rien de tel qu’une petite piquouse… En l’occurrence un joint pour l’Ouzbek Abdullo Tangriev, l’un des rares judokas à avoir battu Teddy Riner (aux JO de Pékin en 2008), interdit de compétition pendant deux ans après avoir été contrôlé positif à la marijuana en 2012. Mais comme l’affirmait Thierry Rey, champion olympique des - de 60 kg en 1980 à Moscou et commentateur des JO de Rio pour Canal+, « même un Japonais dopé n’y arriverait pas ».

  • AUTORISER LES SUMOS À PARTICIPER AUX JO

Au premier tour des JO de Londres, le Polonais Janusz Wojnarowicz, 168 kg, avait eu le malheur de croiser la route de  Teddy Riner. | EMMANUEL DUNAND / AFP

Euh non, en fait c’est déjà le cas…

  • DÉBAUCHER SATOSHI ISHII DU MMA

Teddy Riner et Satoshi Ishii aux JO de Pékin en 2008. | TOSHIFUMI KITAMURA / AFP

Teddy Riner et Satochi Ishii, c’est l’histoire d’une longue rivalité. Depuis qu’ils sont juniors, les deux judokas ont l’habitude de se croiser dans les grands championnats. Et, bizarrement, le Français et le Japonais n’ont pas eu l’occasion de s’affronter en senior. Aux JO de Pékin, en 2008, alors que Teddy Riner, champion du monde en titre, est stoppé dès les quarts de finale par l’Ouzbek Abdullo Tangriev, Satoshi Ishii trace sa route pour finalement remporter le titre. Une rivalité qui augure de formidables batailles à venir entre les deux hommes. Le hic – parce qu’il y en a forcément un –, c’est qu’aussitôt après avoir décroché le titre suprême des lourds, le Japonais décide d’embrasser une carrière en mixed martial arts (MMA). Furieuse, la Fédération japonaise de judo décide d’exclure son champion, qui ne retrouvera jamais le chemin des tatamis. Mal lui en a pris. Annoncée comme prometteuse, la carrière d’Ishii en combat libre s’est avérée un désastre. Si Riner a, un temps, pensé « venir affronter Ishii sur son propre terrain » en 2009, il s’est vite ravisé. Sa mère, Marie-Pierre Riner, lui a fait promettre que jamais il n’irait s’aventurer dans une cage. Même pour deux millions de dollars, le montant qu’on lui avait proposé pour un combat.

  • FAIRE SORTIR DE SA RETRAITE TONG WEN

La Chinoise Tong Wen, tout heureuse d’avoir gagné le titre olympique en 2008 à Pékin. | KAZUHIRO NOGI / AFP

Eu égard à ses nombreux titres mondiaux et à sa médaille d’or olympique remportée chez les lourdes (+ de 78 kg ; elle en pesait en fait 130) en 2008 à Pékin, on surnomma à juste titre Tong Wen la « Teddy Riner au féminin ». C’était avant que la Chinoise ne se fasse pincer par la patrouille antidopage qui trouva des traces de clenbutérol (un anabolisant utilisé notamment pour soigner les chevaux...) dans son urine au soir de son cinquième titre mondial, en 2009, à Rotterdam. Pour sa défense, l’athlète invoqua en toute bonne foi qu’elle avait ingéré trop de cuisses de poulets élevés aux antibiotiques. Malgré sa défense bancale, la judoka fut réhabilitée un an plus tard par le Tribunal arbitral du sport (TAS), qui décela un vice de procédure. Par inadvertance, l’échantillon B avait été ouvert… donc inutilisable. En 2011, sous les sifflets du public parisien à Bercy, la Chinoise subtilisa un sixième titre mondial, et une médaille de bronze olympique à Londres, avant de disparaître totalement de la circulation. Aujourd’hui âgée de 33 ans, Tong Wen, même nantie de son palmarès exceptionnel, aurait peu de chances face à Teddy Riner, qui n’a jamais caché son inimitié pour elle : « Quelqu’un qui se dope, je ne suis pas sûr qu’il se soit “mis minable” à l’entraînement. Aux championnats du monde à Paris, dans la salle d’échauffement, on n’a pas arrêté de siffler Tong Wen. Elle a gagné, certes, mais elle n’a pas un palmarès sain. C’est ce qui fait que personne ne se souviendra d’elle. » A moins qu’elle ne gagne contre Teddy Riner… à grand renfort de cuisses de poulet.

  • LUI BANDER LES YEUX

JUDO - HORS NORMES : Riner dans l'univers de Taurines
Durée : 03:30

En 2014, Teddy Riner s’était volontiers prêté au jeu. Sur le tatami de Levallois, son club, le champion du monde s’était bandé les yeux lors d’un entraînement avec le judoka malvoyant Julien Taurines, champion de France et médaillé de bronze handisport. En manque de repères, le champion olympique avait paru bien fébrile dans les mains de son alter ego chez les « non-valides ». Un grand moment de solitude.

  • LUI OPPOSER UN OURS

Teddy Riner, duo de gros nounours sur le tatami
Durée : 01:37

Si vous en êtes au point de penser qu’aucun humain ne peut raisonnablement envisager de battre Teddy Riner avant de nombreuses années, pourquoi ne pas aller chercher du côté des animaux ? En 2012, Paris-Match avait réalisé une séance photo mettant en scène Riner et l’ours noir Valentin. A vue d’œil, l’ursidé devait peser dans les 300 kg pour 1,90 m. Une belle bête… tout aussi impressionnante que Teddy lui-même. Problème : Valentin ne marche qu’aux marshmallows. Et quand l’enjeu est aussi important que les Jeux olympiques, Teddy Riner n’est pas du genre à donner des sucreries à ses adversaires.