Google lance Duo et chasse sur les terres de FaceTime et de Skype
Google lance Duo et chasse sur les terres de FaceTime et de Skype
LE MONDE ECONOMIE
La firme de Cupertino tente de rattraper son retard sur le marché de la conversation vidéo sur mobile.
L’application de conversation Google Duo. | GOOGLE PLAY
C’était le 15 juillet. Alors qu’il était menacé par un coup d’Etat mené par une partie de son armée, le président turc, Recep Tayyip Erdogan, en vacances à Marmaris, appelait ses partisans à descendre dans la rue lors d’une interview en direct à la télévision réalisée par… FaceTime, le service d’appel vidéo de l’iPhone d’Apple. La preuve que les applications de vidéoconférence sont aujourd’hui de plus en plus ancrées dans nos usages. Et ce n’est pas Google qui affirmera le contraire. Le géant de l’Internet a dévoilé, mardi 16 août, sa toute nouvelle application mobile entièrement consacrée aux appels vidéo, baptisée Duo.
Annoncée en mai lors de la traditionnelle conférence annuelle des développeurs de la firme, l’application, que le groupe de Cupertino décrit comme « simple », « rapide » et « fiable », est désormais disponible sur Android et iOS aux Etats-Unis et devrait très prochainement débarquer en France. Elle vient directement concurrencer les applications de messagerie comme WhatsApp et Skype et des services tels que FaceTime. Pour promouvoir sa nouvelle application, Google met notamment en avant la qualité de la vidéo lors des appels passés et mise sur une fonctionnalité originale, Knock Knock (« toc toc »), qui permet d’avoir un aperçu vidéo de son interlocuteur lors de son appel avant même de décrocher.
Cela sera-t-il suffisant pour détrôner ses rivaux ? WhatsApp, qui permet à la fois d’envoyer des messages écrits et de tenir des conversations vidéo, compte déjà plus d’un milliard d’aficionados, tandis que Skype, utilisable tant sur téléphone portable que sur ordinateur, en revendique plus de 300 millions.
« Stratégie illisible »
Selon le Financial Times, Nick Fox, responsable des applications mobiles de communication au sein de la société, ambitionne pourtant bien de propulser Duo en tête des applications de conversation vidéo sur les smartphones fonctionnant sous Android, le système d’exploitation du groupe.
« Cela paraît plutôt compliqué. Google va avoir du mal à convaincre les utilisateurs de smartphones Android, habitués à utiliser d’autres applications comme WhatsApp ou Skype, à basculer tout à coup sur Duo, souligne toutefois Roberta Cozza, du cabinet de conseil Gartner. Quant aux utilisateurs d’iPhone, il est peu probable qu’ils aient envie de s’encombrer d’une nouvelle application alors qu’ils ont déjà FaceTime d’intégré. »
En marchant sur les plates-bandes d’Apple (FaceTime), Microsoft (Skype) ou Facebook (WhatsApp), Google entend surtout ne pas se retrouver à la traîne face à ses concurrents sur un marché en pleine croissance et profiter de l’éventuel succès de son application pour élargir sa notoriété et son audience.
La firme a en effet pris du retard et peine à s’imposer comme une référence dans le domaine des communications mobiles. « Pour l’instant, elle n’a pas réussi à transformer le succès de Gmail [son service de mail] dans l’univers des “app” de messagerie et de vidéo. Entre Google Voice, Hangouts, Google +, sa stratégie sur les nouvelles formes de communication et de messageries sociales est illisible et s’est soldée par un échec », note Thomas Husson, analyste chez Forrester.
Hangouts cantonné au monde du travail
Hangouts, sa plate-forme de visioconférence, lancée plus tardivement dans la course que ses concurrents, offre pourtant déjà un service similaire à Duo. L’obligation de s’y connecter par une adresse mail du groupe a toutefois découragé de nombreux utilisateurs. Une erreur que le géant de l’Internet a corrigée dans Duo : l’identification préalable pour utiliser l’application ne s’effectue plus par le biais d’un compte Google mais simplement par le numéro de téléphone.
Hangouts, qui a surtout rencontré du succès dans les entreprises en facilitant les échanges internes, devrait donc quant à lui se cantonner à ce créneau spécifique.
Derrière l’arrivée de Duo se cache également un autre enjeu de taille. Les applications de messagerie mobile, très populaires auprès des utilisateurs, évoluent de plus en plus vers des plates-formes intégrant une multitude de services périphériques, sources de profits supplémentaires. « Des applications comme WeChat ou Line ont montré qu’elles avaient réussi à pivoter vers de véritables plates-formes e-commerce et marketing », souligne M. Husson. Au-delà des communications, Duo va donc devoir aussi batailler sur le terrain commercial.