Neymar. | MARTIN BERNETTI / AFP

Au petit matin, on parlait déjà du match dans les bars de Rio de Janeiro. De ce match qui doit en finir avec les deux malédictions du foot brésilien : emporter l’or olympique - pour la première fois de l’histoire et laver l’humiliation de la déculottée encaissée en demi-finale de la coupe du monde de 2014, 7 à 1 face à l’Allemagne.

A 17 h 30, samedi 20 août, l’équipe olympique devra arracher un trophée encore inédit. Une aberration au pays du « futebol ». Le défi des onze menés par Neymar ne s’arrête pas là : la victoire tant attendue doit être obtenue face à l’Allemagne. Une équipe qui fait encore cauchemarder les supporters brésiliens, traumatisés depuis 2014.

L’or olympique est devenu une obsession

« On va gagner », croit savoir Luiz Lima Pedroza, un verre de Brahma à la main. Le tenancier du Bar Felgueiras à Leme quartier de la zone sud à l’extrémité de la plage de Copacabana connaît déjà le score « 2 ou 3 à 0 ». « C’est sûr le Brésil est meilleur », abonde son ami Luiz Fernando, avachi sur une chaise en plastique.

La pression est maximale. Les débuts poussifs de la Seleçao qui ont fait enrager les supporters sont oubliés. Pas le traumatisme de 2014. Après la défaite de l’équipe féminine emmenée par l’attaquante Marta face au Canada (1-2), lors du match pour la médaille de bronze, les supporters n’ont plus qu’à crier de nouveau dans le stade Maracana : « O Alemanha ! Pode esperar ! A sua hora vai chegar ! » (Allemagne, tu peux attendre, ton heure arrive), résumait le quotidien o Globo qui affichait en Une « A quelle heure l’Allemagne rentre à la maison ? ».

C’est le moment pour « ôter l’Allemagne de [notre] gorge », titrait aussi le quotidien Extra. « Aujourd’hui oui ? », interrogeait encore en Une la Folha de Sao Paulo, mentionnant plus bas, « Hier non », évoquant la défaite de l’équipe féminine la veille malgré tous les espoirs. Et le journal de remémorer les trois finales perdues : à Los Angeles en 1984 face à la France (2- 0) en dépit de Dunga, Milton Cruz et Gilmar ; Séoul en 1988 face à l’URSS (1-2) malgré certains cracks qui brilleront lors de la coupe du monde de 1994 comme Romario et enfin Londres en 2012 face au Mexique (1-2) avec déjà, Neymar.

L’or olympique est devenu une obsession pour la confédération brésilienne de football (CBF). L’arracher face à l’équipe honnie est vu comme une apothéose. Le match de la vengeance à même de laver l’honneur perdu. Trop d’attente ? La tension pourrait faire trembler les jambes de Neymar et de ses coéquipiers. « Nous n’avons rien à voir avec ça. Nous allons vivre notre histoire », tempère ainsi Rogério Micale, sélectionneur l’équipe cité par la Folha de Sao Paulo.

« On ne peut pas oublier »

Chez les jaunes et verts l’heure est à la concentration. Contrairement à l’avant 2014 où les stars de la Seleçao fanfaronnaient, s’exhibant hilares ou torse nus sur les réseaux sociaux, les joueurs de l’équipe olympique la jouent désormais profil bas. Toute démonstration d’arrogance pourrait, ils le savent, être retenue contre eux.

Le poids sur les épaules des onze do Brasil est immense. Mais si une défaite est inenvisageable, la victoire ne suffira pas à racheter le péché de la coupe du monde. « Nous n’auront jamais de rédemption, mais il est temps de surmonter le déni du 7 à 1 qui paralyse notre football », a tweeté dans la matinée l’écrivain Sergio Rodrigues, auteur de Dribble (ed. Seuil)

À l’instar de la plupart des Brésiliens, Luiz Lima Pedroza et son compère Luiz Fernando du bar de Leme, ne voient, eux, aucune revanche possible dans le match de ce soir. Les équipes ne sont pas les mêmes et l’enjeu olympique n’est pas celui d’une coupe du monde. « On ne peut pas oublier », dit le premier. « C’est à jamais gravé dans nos mémoires », se désole le second. Une victoire permettrait toutefois d’atténuer le traumatisme du Maracanazo.