L’idée d’une armée européenne fait son chemin en Europe centrale
L’idée d’une armée européenne fait son chemin en Europe centrale
Par Jakub Iwaniuk (Varsovie, correspondance)
Les dirigeants du groupe de Visegrad ont rencontré Angela Merkel à Vasorvie, vendredi, pour réfléchir à la relance de l’Union européenne après le vote en faveur du « Brexit ».
De gauche à droite : le premier ministre slovaque Robert Fico, la chancelière allemande Angela Merkel, le premier ministre polonais Beata Szydlo, le premier ministre hongrois Viktor Orban et le premier ministre tchèque Bohuslav Sobotka, le 26 août, à Varsovie. | JANEK SKARZYNSKI / AFP
L’Union européenne post- « Brexit » se dotera-t-elle d’une armée commune ? Les pays du groupe de Visegrad (Pologne, Hongrie, République tchèque, Slovaquie) pourraient voir dans cette vielle idée un des moyens de relancer la construction européenne. C’est un des messages qu’ils ont voulu faire passer vendredi 26 août, à l’occasion d’un sommet commun à Varsovie avec la chancelière allemande Angela Merkel.
« Il faut que l’UE se concentre en priorité sur les affaires de sécurité, et nous pouvons commencer à envisager la création d’une armée européenne commune », a déclaré à cette occasion le premier ministre hongrois, Victor Orban, rejoint part le chef du gouvernement tchèque, Bohuslav Sobotka. Le premier ministre slovaque, Robert Fico, a été plus évasif, en affirmant que « l’UE devait se renforcer en tant qu’acteur global ».
La veille, le ministre des affaires européennes polonais, Konrad Szymanski, avait souligné dans un entretien au journal Rzeczpospolita que la Pologne « n’est pas contre le développement des capacités militaires européennes, à condition qu’il n’y ait pas de dissonances avec l’OTAN ».
Critiques à l’égard de Bruxelles
Cette position du groupe de Visegrad reste quelque peu paradoxale : les pays d’Europe centrale avaient plaidé, en juillet, pour une Europe où les Etats membres « reprendraient contrôle » du processus d’intégration, au détriment des institutions de Bruxelles, qu’ils accusent d’empiéter sur la souveraineté des capitales. Victor Orban a d’ailleurs réitéré ses virulentes critiques à l’encontre de la Commission européenne, martelant que cette dernière devrait « arrêter ses jeux politiques » pour se concentrer sur son rôle de gardienne des traités.
Ce point de vue reste largement partagé par Varsovie, Prague et Bratislava et constitue un point de clivage avec le couple franco-allemand. Reste à savoir si un projet de défense européenne est compatible avec cette vision d’une Europe à l’exécutif affaiblit, alors que l’idée avait jusqu’à présent été envisagée dans une perspective fédérale.
« De grandes différences de points de vue entre les Etats »
La rencontre de Varsovie était une étape supplémentaire du marathon diplomatique d’Angela Merkel en préparation du sommet européen qui se tiendra à Bratislava le 16 septembre, sans le Royaume-Uni, réunion censée être la première étape de la reconstruction de l’UE après le « Brexit ». « On peut faire davantage en matière de sécurité et de défense, le traité de Lisbonne nous donne beaucoup de marge de manœuvre pour initier et planifier des actions communes », a soutenu la chancelière allemande.
« Il y a de grandes attentes vis-à-vis du sommet de Bratislava, mais aussi de grandes différences de points de vue entre les Etats, a pour sa part admis Robert Fico. Des espoirs déçus lors de ce sommet seraient la pire des choses. Bratislava doit être le début d’un long et profond processus de réforme l’UE. »
Au-delà d’une réaffirmation de principe sur la nécessité de contrôle des frontières extérieures de l’UE, la thématique migratoire, principale pomme de discorde entre les pays du groupe de Visegrad et Berlin, a été soigneusement évitée à Varsovie. Mais la rencontre a été précédée de l’annonce par Victor Orban de la construction d’une seconde barrière capable de retenir « des centaines de milliers de migrants » à la frontière serbe. La Hongrie redoute l’éventuelle rupture de l’accord migratoire UE-Turquie si Ankara venait à concrétiser ses menaces, en cas de non obtention de la libéralisation des visas que le gouvernement turc réclame pour ses concitoyens.