La ministre de l’éducation nationale, Najat Vallaud-Belkacem, a réaffirmé devant les présidents d’université, le 29 août, vouloir « réorganiser » le cycle de master afin de concilier les contraintes des formations et le droit à la poursuite d’études des diplômés de licence. | Julien Daniel/MYOP

Nouvel épisode dans les recours contre la sélection en master : alors que ces dernières années, la justice a statué, à maintes reprises, contre des refus d’admission d’étudiants en deuxième année de master (M2), une étudiante refusée en première année (M1) a obtenu gain de cause, vendredi 2 septembre. Le tribunal administratif de Lyon a ainsi « enjoint à l’université Jean-Moulin - Lyon-III d’inscrire » une étudiante titulaire d’un diplôme d’infirmière, en master « droit de la santé ». Prononcée en raison de l’urgence créée par la proximité de la rentrée universitaire, l’inscription en master « droit de la santé » est valable « à titre provisoire et jusqu’à ce qu’il soit statué au fond ».

La candidature de l’étudiante avait bien été jugée « recevable », « les candidats titulaires d’un diplôme d’infirmier ne voyant pas leur demande écartée par principe », comme l’a reconnu l’université auprès du tribunal. Le diplôme d’infirmière est en effet reconnu comme un premier cycle conférant le grade de licence. Néanmoins, l’université s’était estimée en droit de la refuser. Elle s’appuyait sur l’arrêté du 25 avril 2002 créant le diplôme de master, arguant que l’inscription n’est pas de droit lorsque le diplôme de premier cycle ne relève « pas du même domaine que le master sollicité ».

Pas de fondement légal

Le tribunal a, pour sa part, estimé que la sélection à l’entrée du master n’a pas de fondement légal. Il existe bien un décret, publié le 25 mai, autorisant 1 306 formations (42 % des bacs + 5 universitaires), y compris le master droit de la santé de l’université Lyon-III, à sélectionner sous certaines conditions leurs étudiants, mais il ne concerne que le passage du M1 au M2.

« En l’absence de décret applicable aux étudiants voulant intégrer le cycle de master, aucune sélection ne dispose d’une base légale suffisante, peu importe le domaine d’origine du candidat », se félicite l’avocat de l’étudiante lyonnaise, Me Florent Verdier.

Ce jugement intervient alors que le gouvernement a lancé une concertation informelle sur le cycle master, le décret du 25 mai n’étant qu’une solution présentée comme provisoire, et qui n’a pas tout réglé : deux décisions de justice estivales ont été favorables à des étudiants contestant un refus d’admission en M2, à Bordeaux et à Montpellier.

Un sujet délicat marqué par des crispations

Depuis l’adoption du système LMD, avec les cycles licence (bac + 3), master (bac + 5) et doctorat (bac + 8) (LMD), le master devrait être comme un « bloc » de quatre semestres. Pourtant, l’ancienne maîtrise (bac + 4) survit virtuellement sous le nom de M1, tout comme la sélection autrefois pratiquée à l’issue de cette maîtrise. La moitié des étudiants rejoignent un nouvel établissement entre la licence et le M1. Puis la moitié des étudiants ayant validé leur M1 changent encore d’université pour accéder à un M2.

Pour respecter le système LMD, il convient d’organiser les parcours des étudiants après la licence. Ce sujet délicat – puisqu’il touche à la sélection ou à l’accompagnement financier de la mobilité géographique des étudiants – est au centre de la concertation menée par le ministère depuis le début de l’été, marquée par des crispations.

Jean-Loup Salzmann, président de Conférence des présidents d’université (CPU) a ainsi déclaré avoir « perdu confiance » et avoir « claqué la porte ». Mercredi 31 août, la ministre, Najat Vallaud-Belkacem, a invité la CPU, lors de son université d’été, à s’investir dans les discussions. Elle a expliqué viser un « équilibre délicat » : « Un modèle dans lequel on permette que soient recrutés les bonnes compétences et les bons profils dans ces masters ; un modèle dans lequel on tienne compte des capacités d’accueil de ces masters, et, en même temps, dans lequel on offre à chaque étudiant qui le souhaite la possibilité de poursuivre ses études au-delà de la licence. »

« En réalité, ce n’est pas un problème de sélection mais d’orientation. Il y a globalement assez de places en master, mais tout le monde ne peut pas avoir une place dans le master qu’il souhaite », souligne un président d’université, partisan de ne pas bouder les discussions. Un point doit être fait à la fin du mois de septembre. Si un consensus est alors en vue, une consultation formelle sur un projet de réforme du master serait lancée, le droit mis en cohérence. Presque quinze ans après avoir été institué formellement, le système LMD pourrait alors entrer véritablement dans les faits à la rentrée 2017.