Comment l’Etat va opérer un tri entre les migrants du camp humanitaire de Paris
Comment l’Etat va opérer un tri entre les migrants du camp humanitaire de Paris
Par Maryline Baumard
Anne Hidalgo (4e au premier rang en partant de la gauche) visitant le centre d’accueil parisien des migrants, le 8 novembre. | CHRISTOPHE ARCHAMBAULT / AFP
Quel parcours pour les migrants qui sortiront du camp humanitaire parisien ? Pour éviter la paralysie du centre par l’afflux d’étrangers, l’Etat devra en sortir chaque jour au moins quarante personnes pour les installer dans des dispositifs plus pérennes, en province et ailleurs en Ile-de-France.
Certaines associations sont conscientes que tous les migrants ne seront pas traités de la même manière à la sortie du camp parisien. Elles craignent donc qu’il ne fonctionne comme un lieu de tri, facilitant ensuite le travail de l’Etat pour engager des reconduites à la frontière et des éloignements vers d’autres pays.
« Le premier accueil dans notre centre sera inconditionnel », martèle-t-on à la Mairie de Paris. L’inscription à l’entrée se fera sur une base purement déclarative. Mais il y aura bien un rendez-vous au cours de la prise en charge dans un bâtiment de la Préfecture de Paris, boulevard Ney. Là, fini le déclaratif, les migrants devront justifier de leur identité afin d’entamer les premières démarches de demande d’asile.
« Tous les migrants qui souhaitent s’inscrire dans une démarche de demande d’asile seront ensuite orientés au fur et à mesure vers des structures appropriées », souligne Dominique Versini, adjointe à la maire de Paris chargée des affaires sociales. L’Etat estime pouvoir sortir quarante personnes par jour du centre. A la préfecture de région, la secrétaire générale, Sophie Brocas, a pensé leur répartition dans la continuité du travail qu’elle mène depuis le début des évacuations des campements parisiens, en juin 2015.
« Nous avons déjà installé 50 étudiants en cité universitaire grâce à un accord passé avec le Crous. D’autres suivront », insiste la préfète. « Les autres primo-arrivants seront envoyés dans les centres d’accueil et d’orientation en province mais aussi dans leur équivalent en Ile-de-France. » Les migrants pourront y finaliser leur dossier de demande d’asile.
Une aide pour démêmer les situations compliquées
Pour d’autres groupes, ce sera moins simple. Les migrants déjà déboutés de l’asile seront orientés vers le 115 – le SAMU social. « Un dispositif qui relève de la responsabilité de l’Etat, qui est sous tension et doit être renforcé », insiste Mme Versini. Ces déboutés, le service d’assistance aux plus démunis les connaît bien, puisqu’ils constituent déjà 40 % des personnes prises en charge.
Le cas le plus délicat reste celui des « dublinés », ces migrants dont les empreintes ont été enregistrées dans leur premier pays d’arrivée en Europe, et qui devraient donc y être renvoyés pour y déposer leur demande d’asile, en vertu des accords de Dublin. « Les demandeurs d’asile dont la demande doit être prise en charge par un autre pays seront orientés vers des centres d’accueil dédiés », assure Mme Brocas.
L’Etat envisage de créer des centres d’accueil spécifiques avec assignation à résidence pour préparer l’éloignement de ces « dublinés ». De son côté, la Mairie de Paris souhaite leur permettre un séjour de quelques jours au sein du centre de premier accueil, avant le départ ou une orientation vers d’autres structures. Les exilés pourront y trouver une aide pour démêler des situations juridiques parfois compliquées.
Un logement social sera proposé
« En parallèle, ceux qui auraient changé d’avis et souhaiteraient rentrer dans leur pays seront orientés vers un centre d’accueil réservé aux retours volontaires », ajoute Didier Leschi, directeur général de l’Office français de l’immigration et de l’intégration. Lors du démantèlement de Calais, deux centres spécifiques leur avaient déjà été réservés.
Il reste certains migrants ayant déjà obtenu l’asile, mais qui, faute d’une insertion suffisante et d’un travail, se retrouvent à la rue. « Ils se verront proposer un logement social dans les villes de France, où des logements sont vacants. Une association les suivra sur place, afin d’aider à leur insertion », rappelle Mme Brocas.
En Ile-de-France, la préfète a déjà développé des partenariats entre l’Etat, Pôle emploi, l’AFPA et la fédération du travail temporaire pour augmenter l’employabilité de ces réfugiés. Une centaine d’entre eux bénéficient de cette formule, qui comprend un hébergement, quatre mois de français intensif et quatre mois de formation à un métier en tension. La ministre de l’emploi vient d’ailleurs d’annoncer l’extension de l’expérience.