Sélection albums : Hugues Dufourt, Sergueï Liapounov, Sting…
Sélection albums : Hugues Dufourt, Sergueï Liapounov, Sting...
A écouter cette semaine : des percussions lumineuses et poétiques, un compositeur russe à l’honneur, le retour rock d’un ex Police, ...
- Hugues Dufourt
Burning Bright
Les Percussions de Strasbourg.
Pochette de l’album « Burning Bright », d’Hugues Dufourt par Les Percussions de Strasbourg. | PERCUSSIONS DE STRASBOURG/L’AUTRE DISTRIBUTION
Inspirée d’un poème de William Blake dont deux mots sont repris dans le titre, Burning Bright (2014) est une œuvre fascinante et inclassable, deux qualités constantes dans la production d’Hugues Dufourt (né en 1943) qui, après avoir participé à l’avènement de la « musique spectrale » dans les années 1970, s’est rapidement démarqué des tendances collectives. Six percussionnistes jouant comme un surhomme renouvellent ici le cérémonial des sons émis pour exister. Partout, la résonance paraît plus active que l’attaque, et la pensée, plus marquante que le geste. Des rumeurs, des rugissements mais aussi des stations apaisantes balisent un monde sombre parfois traversé d’éclairs ou de poudres de comète. Pas d’articulation manifeste du parcours et pourtant nulle sensation d’errance dans ces allers et retours qui évoquent les révolutions d’une planète. Magistral. Pierre Gervasoni
1 CD Percussions de Strasbourg/L’Autre Distribution.
- Sergueï Liapounov
Novelette op.18. Barcarolle op.46. Humoresque op.34. Trois pièces op.1. Sept préludes op.6. Chant du crépuscule op.22. Variations et fugue sur un thème russe op.49. Fêtes de Noël op.41.
Florian Noack (piano).
Pochette de l’album « Works for piano vol. 2 », recueil d’œuvres pour piano de Sergueï Liapounov par Florian Noack. | ARS PRODUKTION
L’homme repose depuis 1924 au cimetière des Batignolles, à Paris, mais ne devra sa résurrection qu’au piano du jeune Florian Noack qui vient de lui consacrer un deuxième volume. S’il est vrai que la musique de Sergueï Liapounov (1859-1924) a laissé quelque écho en ce qu’elle suit les chemins transcendants de Liszt, le pianiste infirme la réputation du compositeur russe, dont il présente un programme riche et varié, expressif et nuancé, passionnant. Ainsi la magnifique et délicate Barcarolle, où passe l’ombre de Chopin, l’éruptive Novelette ou les Sept préludes qui témoignent d’une inventivité et d’une inspiration singulières. Nul doute que le talent du Bruxellois a trouvé de quoi nourrir sa passion des œuvres rares du postromantisme. Quant au sieur Liapounov, il ne pourra que remercier le piano musicien, splendide et généreux, de Florian Noack. La regrettée Brigitte Engerer ne s’y était pas trompée, qui l’avait distingué alors qu’il n’avait pas 15 ans. Marie-Aude Roux
1 CD ou 1 SACD hybrid Ars Produktion.
- Pierre de Bethmann
Medium Ensemble volume 2 – Exo
Pochette de l’album « Medium Ensemble volume 2 – Exo », de Pierre de Bethmann. | ALÉA/SOCADISC
En 2014, le pianiste Pierre de Bethmann proposait un premier volume de son Medium Ensemble, formation de douze musiciens, sorte de big band au sein duquel les pupitres de vents sont réduits. Après Sisyphe (récemment réédité) où, contrairement au mythe, Bethmann et sa troupe menaient la musique au plus haut de la montagne sans qu’elle en retombe, voici Exo. Avec un personnel quasi inchangé, Baptiste Germer au cor étant à la place de Camille Lebrequier et Karl Jannuska à la batterie à la place de Franck Agulhon. Les entrelacs de la voix de Chloé Cailleton avec le piano électrique, la flûte, la clarinette basse, le cor, la trompette, le bugle, les saxophones et le tuba constituent une nouvelle fois une bonne part de l’identité du Medium Ensemble. De plein lyrisme, raffinées et expressives, en contrastes constants densité-légèreté, écriture d’ensemble-interventions solistes, les compositions de Bethmann sont une fois encore magnifiées par cette forme orchestrale. Sylvain Siclier
2 CD Aléa/Socadisc.
- Sting
57th & 9th
Pochette de l’album « 57th & 9th », de Sting. | A&M/UNIVERSAL MUSIC
Premier single et titre d’introduction de 57th & 9th (nom du studio de Manhattan où a été enregistré l’album), I Can’t Stop Thinking About You donnait l’agréable illusion que Sting s’était rabiboché avec la guitare d’Andy Summers, la batterie de Steward Copeland et ce medium rock, que l’ancien bassiste de Police a tendance à prendre de haut depuis 1985 et la séparation du trio qui l’a rendu célèbre. Si ses anciens complices ne sont pas de la partie, l’essentiel de ce douzième album solo tente en effet de retrouver une urgence électrique que les prétentions musicales de l’Anglais avaient étouffée. Plus directes, ces chansons se mettent au service de l’engagement d’un artiste jamais avare de grandeur d’âme (comme le prouvait encore, le 12 novembre, le concert de réouverture du Bataclan). L’écologie (One Fine Day), le drame des réfugiés (Inshallah), la violence en Syrie (The Empty Chair), la fragilité de l’existence de rock star (un 50 000 très U2) font vibrer la voix maitrisée du grand blond. Malgré quelques progressions d’accords familières et une ou deux réussites (Down Down Down), ce parti-pris rock ne retrouve jamais la verve d’antan. Aux tensions « hardcore » de l’épouvantable Petrol Head, on préférera même les bâillements folks de Heading South On The Great North Road ou de The Empty Chair. Stéphane Davet
- The bongo hop
Satingarona PT1
Pochette de l’album, « The Bongo Hop », de Satingarona PT1. | UNDERDOG RECORDS/LA BALEINE/BELIEVE
En 9 pistes, le rêve du DJ paresseux, tendance « afro latino caribéen ». Trente-sept minutes de bonheur musical à guincher. Un peu court pour tenir la soirée, certes, mais vu la qualité des compositions, la chatoyante diversité rythmique, mélodique et vocale de ce cocktail, il y a de fortes chances qu’on lui réclame quelques bis. Groupe à géométrie variable, The Bongo Hop est une histoire de voyages, de belles rencontres et d’affinités, vécue par le trompettiste français Etienne Sevet, entre la Colombie (huit années passées à Cali) et Lyon, où il a jeté l’ancre. La Colombie a mis sur sa route un DJ, musicien et producteur anglais notoire, exilé volontaire là-bas, Will « Quantic » Holland, la chanteuse Nidia Gongora (Ondatropica, Quantic) et le rappeur Maikcel (le collectif de hip hop Zalama), puis des artistes colombiens installés en France (comme Paola Barreto, chanteuse du groupe Cumbia ya !). D’autres complicités se sont nouées à Lyon (le multi-instrumentiste et producteur Bruno « Patchworks » Hovart, qui signe les arrangements, le saxophoniste Olivier Granger, le batteur Remy Kaprielan…). Un premier album savoureux. On attend avec curiosité Satingarona Part 2. Patrick Labesse