Depuis l’élection de Donald Trump, inquiétudes au sujet de la neutralité du Net
Depuis l’élection de Donald Trump, inquiétudes au sujet de la neutralité du Net
Le président élu vient de nommer deux fervents opposants à la neutralité du Net dans son équipe de transition.
Les défenseurs de la neutralité du Net se réjouissaient ces derniers mois de voir ce principe progresser aux Etats-Unis et en Europe. Mais depuis l’élection de Donald Trump, les inquiétudes grandissent. Lundi 21 novembre, le président élu a nommé dans son équipe de transition deux fervents opposants à la neutralité du Net, pour prendre en charge les questions liées aux télécommunications.
La neutralité du Net est un principe qui garantit un accès technique égal à Internet, quel que soit l’utilisateur et quel que soit le service auquel il se connecte. Par exemple, la neutralité du Net interdit aux fournisseurs d’accès de faire payer davantage à leurs clients pour qu’ils bénéficient d’un meilleur débit sur YouTube ou Netflix par exemple – ou de faire payer YouTube ou Netflix pour offrir un meilleur débit à leurs utilisateurs. Ce principe qui régit Internet depuis ses débuts consiste tout simplement à traiter toutes les données de la même manière, sans discrimination.
Une « attaque d’Obama sur Internet »
Aux Etats-Unis, un grand débat a eu lieu ces dernières années autour de cette question, qui a donné lieu à une victoire en février 2015 des défenseurs de la neutralité du Net. La Federal Communications Commission (FCC), le régulateur des communications américain, a décidé que l’Internet américain devait être considéré comme un « bien public », au même titre que le réseau téléphonique, ce qui lui a donné le pouvoir de faire appliquer ce principe sur le territoire américain. Les opérateurs de télécommunication étaient opposés à cette décision, arguant que cela nuirait au développement, coûteux, de leur réseau.
Malgré cette victoire, actée en février 2015, les partisans de la neutralité redoutent un retour en arrière avec l’élection de M. Trump. Celui-ci a déjà fait part, sur Twitter, de ses réserves à l’encontre de ce principe, alors que le débat battait son plein aux Etats-Unis, dénonçant une « attaque d’Obama sur Internet ». Lundi, il a fait grandir leurs inquiétudes, en nommant dans son équipe de transition Jeff Eisenach et Mark Jamison pour le conseiller sur les questions relatives aux télécommunications.
« La neutralité n’a rien de neutre »
Le premier est un économiste, ancien consultant pour l’opérateur de télécommunication Verizon. Il a déclaré en 2014 devant le Sénat américain que « la neutralité du Net n’améliorerait pas le service aux consommateurs et ne protégerait pas l’intérêt public ». Il a aussi publié un texte à charge contre la neutralité du Net, dans lequel il estime qu’elle « n’a rien à voir avec la protection des consommateurs (…) ni celle de la liberté d’expression », mais qu’il s’agit, selon lui, de « copinage capitaliste pur et simple » profitant à des entreprises comme Netflix. « La neutralité du Net n’a rien de neutre », écrivait-il en guise de titre.
Le second, Mark Jamison, a travaillé comme lobbyiste pour l’opérateur de télécoms américain Sprint et a lui aussi bataillé contre la neutralité du Net. En juin, il estimait, dans un texte publié en ligne, qu’il est « temps de laisser la neutralité du Net de côté », pour développer une politique « qui permettrait à nos industries d’être leaders sur le plan mondial ». Ce qui, poursuit-il, signifie de « laisser l’industrie prendre ses propres décisions commerciales ».
« Tout ce que nous avons accompli ces dix dernières années est aujourd’hui en danger », a confié au site Motherboard Malkia Cyril, directrice du Center for Media Justice, une organisation consacrée aux libertés numériques. A peine le candidat républicain élu, ce site spécialisé affirmait-il que « le président Trump pourrait détruire la neutralité du Net ». Après ces nouvelles annonces, le site de référence TechCrunch, lui aussi spécialisé dans les nouvelles technologies, a évoqué une volonté de « démanteler la neutralité du Net ». « Il semble que ce ne soit plus qu’une question de temps avant que l’on revienne sur ces règles », concluait-il.