Ségolène Royal critiquée pour son éloge sans nuances de Fidel Castro
Ségolène Royal critiquée pour son éloge sans nuances de Fidel Castro
Le Monde.fr avec AFP
La ministre de l’environnement a salué « un monument de l’histoire », semblant oublier les atteintes aux droits de l’homme perpétrées aujourd’hui encore par le régime cubain.
La ministre française de l’environnement, Ségolène Royal, a salué samedi 3 décembre à Santiago de Cuba la mémoire de Fidel Castro, « un monument de l’histoire », rejetant les accusations de violations des droits l’Homme à son encontre.
Mme Royal a estimé que l’ancien président, décédé le 25 novembre à l’âge de 90 ans, était « le symbole d’une amitié très profonde entre Cuba et la France ». « Grâce à Fidel Castro, les Cubains ont récupéré leur territoire, leur vie, leur destin. Ils se sont inspirés de la Révolution française sans pour autant connaître la terreur qu’il y a eue pendant la Révolution française », a-t-elle estimé.
Interrogée sur les violations des droits de l’homme reprochées par l’ONU et l’opposition au régime cubain, Ségolène Royal a dénoncé la « désinformation » et souligné au contraire l’existence sur l’île d’« une liberté religieuse » et d’« une liberté de conscience ». « Donc il faut savoir regarder les choses positivement même si ça dérange », a-t-elle ajouté, estimant que « la France n’a pas à donner de leçon » à Cuba.
Des violations répétées des droits de l’homme
Dans son rapport 2015/2016, l’ONG Amnesty International dressait pourtant un tout autre portrait du régime cubain, malgré son ouverture progressive et sa réconciliation avec les Etats-Unis :
- les détracteurs du régime sont toujours « victimes de manœuvres de harcèlement, d’“actes de répudiation” (manifestations organisées par des partisans du régime avec le concours d’agents des services de sécurité), ainsi que de poursuites pénales motivées par des considérations politiques » ;
- les arrestations politiques sont encore monnaie commune : la Commission cubaine des droits humains et de la réconciliation nationale (CCDHRN) en a dénombré 8 600 en 2015 ;
- les autorités continuent de « contrôler l’accès à Internet, bloquant et filtrant certains sites, ce qui restreignait l’accès à l’information et les critiques antigouvernementales » ;
- Amnesty « n’a pas été autorisée à pénétrer sur le territoire cubain depuis 1990 ».
Un constat visiblement contesté par la numéro trois du gouvernement français, qui a expliqué qu’« il y a toujours du positif et du négatif dans les histoires, mais certains ne vont pas se rhabiller à bon compte au nom des droits de l’homme alors qu’on sait qu’ici, quand on demande des listes de prisonniers politiques, on n’en a pas ». « Et bien, fournissez-moi des listes de prisonniers politiques, à ce moment-là on pourra faire quelque chose », a-t-elle ajouté.
Salve de critiques, jusqu’au PS
Ces déclarations ont été vivement critiquées par l’opposition, de François Bayrou (Modem) à Florian Philippot (FN) en passant par Roger Karoutchi, Thierry Mariani et Guillaume Larrivé (Les Républicains). Dimanche, le sénateur PS de Paris David Assouline a pris ses distances avec les propos de la ministre, en tweetant que « notre pays rayonne dans le monde parce qu’il a inventé la déclaration des droits de l’homme et du citoyen, pas pour son soutien aux dictateurs ».
Ségolène Royal, envoyée à La Havane par François Hollande pour le représenter alors qu’il est en déplacement à Abou Dhabi, est la seule membre d’un gouvernement européen, avec le premier ministre grec Alexis Tsipras, à avoir fait le déplacement à Cuba à l’occasion de la semaine de deuil national consacrée à l’ex-président cubain.