Don d’organe : quarante ans après la loi sur le consentement présumé, où en est-on ?
Don d’organe : quarante ans après la loi sur le consentement présumé, où en est-on ?
Par Anne-Aël Durand
La loi Caillavet du 22 décembre 1976 a encadré le don d’organes en France. Mais la législation évolue pour augmenter le nombre de greffes, toujours largement inférieur aux besoins.
Trois questions sur le don d’organes
Durée : 01:58
Il y a quarante ans, la loi Caillavet instaurait des règles encadrant le prélèvement d’organes humains en vue d’une greffe, un geste médical qui a permis de sauver des milliers de vies. Mais si le nombre de donneurs est en légère hausse en France ces dernières années, il ne permet pas de couvrir les besoins.
Des dons insuffisants pour couvrir les besoins
Depuis 2000, le nombre de donneurs d’organes a quasiment doublé parmi la population française, avec une forte hausse des prélèvements sur des personnes vivantes (notamment des greffes de rein), multipliées par cinq sur la même période.
En 2015, 571 personnes ont choisi de réaliser un prélèvement de leur vivant, alors que les organes de 1 824 personnes mortes ont permis de sauver des vies. Le don d’organes ne concerne en réalité qu’une toute petite partie des décès en France. Il faut en effet que les différentes parties du corps prélevées (foie, poumon, cœur, cornée…) soient en état d’être greffées, ce qui arrive dans le cas de mort cérébrale ou de certains arrêts cardiaques.
Malheureusement, cette hausse ne suffit pas à couvrir les besoins des patients, qui ont aussi doublé sur la même période, à cause du vieillissement de la population. En 2015, plus de 21 000 personnes étaient en attente de greffe. Là encore, le rein est l’organe le plus demandé.
En 2015, 553 patients sont morts alors qu’ils étaient en liste d’attente pour obtenir une greffe.
Le principe du consentement présumé
Selon la loi du 22 décembre 1976 sur le don d’organes, « des prélèvements peuvent être effectués à des fins thérapeutiques ou scientifiques sur le cadavre d’une personne n’ayant pas fait connaître de son vivant son refus d’un tel prélèvement ». Cela signifie que par défaut, hors cas particuliers (mineurs, personnes sous tutelle) tous les Français sont des donneurs d’organes potentiels, sans qu’ils aient à formuler leur consentement explicitement.
Dans les faits, les médecins consultent systématiquement les proches pour connaître les intentions du défunt. Ce qui aboutit à environ un tiers de refus de don (32,5 % en 2015), le plus souvent en raison des opinions de l’entourage plutôt que de la personne concernée.
On constate d’ailleurs un décalage entre les intentions – selon un sondage, 79 % des Français sont favorables au don d’organe – et la réalité : seuls 67 % de prélèvement chez les patients concernés.
En 2017, il faudra exprimer explicitement son refus
Si le cadre général ne change pas, un amendement introduit dans la loi santé et applicable au 1er janvier 2017 durcit les conditions de refus, en précisant que « le prélèvement d’organes post-mortem peut être pratiqué sur une personne majeure dès lors qu’elle n’a pas fait connaître, de son vivant, son refus d’un tel prélèvement, principalement par l’inscription sur un registre national automatisé prévu à cet effet ».
Les personnes opposées au don d’organes pourront s’inscrire par Internet sur le registre du refus, en joignant une copie de pièce d’identité (actuellement, ce n’est possible que par formulaire papier). Dans le cas contraire, le prélèvement sera réalisé, sauf si les proches attestent des circonstances précises du refus formulé par la personne, par un document écrit et signé.
Cette mesure, présentée par les députés comme une solution pour augmenter le nombre de greffes en France, a suscité des inquiétudes parmi le corps médical. L’Ordre des médecins et les associations pour le don d’organes et de tissus humains (ADOT) craignent d’affronter une « méfiance des familles » et paradoxalement, une remise en cause de la volonté d’être donneur.