Primaire à gauche : l’ouverture de la PMA aux couples de femmes divise les candidats
Primaire à gauche : l’ouverture de la PMA aux couples de femmes divise les candidats
Par Gaëlle Dupont
Si Vincent Peillon, François de Rugy, Benoît Hamon et Sylvia Pinel sont pour, ni Jean-Luc Bennahmias, ni Arnaud Montebourg, ni Manuel Valls ne s’engagent sur le sujet.
Il fut un temps où les sujets sociétaux faisaient l’unanimité à gauche, tout en lui permettant de marquer sa différence avec le camp d’en face. C’était en 2012, avec la promesse de l’ouverture du mariage et de l’adoption aux couples homosexuels, symboles d’égalité et de modernité qui faisaient partie des 60 engagements de François Hollande.
Interrogé par plusieurs associations, le candidat socialiste s’était également prononcé en faveur de l’ouverture de la procréation médicalement assistée (PMA) aux couples de femmes pendant la campagne, comme le prônait le Parti socialiste (PS). Un engagement non réalisé, sous la pression de la Manif pour tous, qui a fait de la défense de la filiation père-mère-enfant son principal cheval de bataille depuis 2013 et le vote de la loi sur le mariage pour tous.
Cinq ans plus tard, les temps ont changé. Certes, une partie des candidats de la primaire à gauche promet toujours d’ouvrir la PMA aux couples de femmes. C’est le cas, par exemple, de Vincent Peillon et de François de Rugy. Ce dernier précise que l’acte serait pris en charge par la Sécurité sociale. Certains vont plus loin en incluant les femmes célibataires, comme Benoît Hamon ou Sylvia Pinel. « Il faut mettre fin à l’exil procréatif qui pousse nombre de femmes à l’étranger pour avoir accès à ces techniques », justifie cette dernière. L’insémination artificielle avec donneur (connu ou anonyme) est autorisée en Belgique et en Espagne, où des Françaises se rendent pour en bénéficier.
Valls fait le choix de la prudence
Cependant, tous les candidats ne s’engagent pas aussi nettement. Ni Jean-Luc Bennahmias, ni Arnaud Montebourg, ni Manuel Valls ne mentionnent le sujet dans leur programme. Interrogé par Le Monde. fr, M. Bennahmias se dit favorable à la réforme. Tout comme Arnaud Montebourg, qui fait une très brève réponse positive à ce sujet à un lecteur de Libération lors d’un échange le 9 janvier.
Egalement interrogé par Libération, Manuel Valls se montre circonspect. « Je suis favorable à titre personnel à ce que l’on avance sur la PMA pour les couples homosexuels (…), déclare-t-il dans l’édition du 17 janvier. Elle touche des sujets éthiques, complexes et délicats, car cela concerne immédiatement la filiation. Je propose que l’on se donne le temps de la réflexion. J’assume d’ouvrir ce débat malgré les lobbys (…). »
L’ancien premier ministre reste fidèle à la ligne suivie sous le quinquennat en faisant le choix de la prudence. Il avait lui-même annoncé, en tant que ministre de l’intérieur, l’abandon de la loi sur la famille au lendemain d’un nouveau défilé de la Manif pour tous dans les rues de Paris, en février 2014. Le risque de voir l’ouverture de la PMA adoptée par un amendement du groupe socialiste de l’Assemblée était trop grand.
De plus, la question ne fait pas l’unanimité parmi les socialistes : une partie seulement des députés et des ministres sont favorables à l’élargissement de l’accès à la PMA (dont la ministre de la santé, Marisol Touraine, et la ministre des familles, Laurence Rossignol).
« Je suis frappée de constater que dans leurs programmes, les deux candidats présentés comme les mieux placés n’ont souhaité ni l’un ni l’autre s’engager sur le sujet, analyse la sociologue de la famille Irène Théry, sollicitée par le gouvernement en 2014 pour proposer des réformes finalement enterrées. Ils sont encore tétanisés par la Manif pour tous, alors que ce courant est minoritaire dans le pays. La gauche semble toujours incapable de prendre au sérieux la famille, alors que nous avons besoin plus que jamais d’un discours progressiste, qui propose un autre récit de ses changements que celui de la droite. »
Tous, ou presque, contre la GPA
Le candidat Les Républicains à la présidentielle, François Fillon, a d’ailleurs placé la protection de la famille traditionnelle et la politique familiale au cœur de son programme. Un thème globalement peu présent dans les projets des candidats de la primaire à gauche. Seule proposition originale : Vincent Peillon envisage le versement des allocations familiales dès le premier enfant.
Quelles que soient leurs promesses, les candidats à la primaire risquent de se heurter au scepticisme au sein d’une partie de leur électorat. L’abandon de cette mesure, maintes fois promise et maintes fois repoussée, a créé une forte déception parmi les électeurs et électrices sensibles au sujet, comme en témoigne Lise Lebœuf, fondatrice du collectif associatif PMA pour toutes :
« Ils ont mené les gens par le bout du nez. Comment croire les candidats ? Il y a tellement de divergences au sein du PS que, même si quelqu’un qui se présente comme “pour” l’emporte, rien ne dit qu’il le fera. »
La gestation pour autrui (GPA) continue, en revanche, de faire quasiment l’unanimité contre elle. Manuel Valls, qui y fut un temps favorable, a redit son hostilité à cette pratique. Seul François de Rugy s’engage à l’autoriser d’ici à la fin du quinquennat, « dans les conditions d’encadrement strict garantissant un choix éclairé de la femme porteuse et excluant toute transaction de nature commerciale ». Il est également le seul à se déclarer en faveur d’une transcription automatique de l’état civil d’enfants nés par GPA à l’étranger.