« Pendant longtemps, les entreprises ont attendu d’être bien implantées sur leur marché local avant de se tourner vers l’export », constate Germain Dufor, professeur à l’Institut national des sciences appliquées (INSA) de Toulouse. « Mais l’émergence de start-up innovantes change la donne, poursuit-il. Avec des offres pointues, elles doivent d’emblée raisonner à l’échelle internationale pour constituer leur portefeuille de clients, d’où un besoin croissant d’ingénieurs d’affaires. »

Embauchés avant le diplôme

Responsable d’un mastère spécialisé (MS) dans ce métier, il dit n’avoir aucun mal à placer ses promotions. « La plupart des participants sont embauchés avant d’avoir terminé leur cursus, en septembre », précise-t-il, citant l’exemple d’une jeune diplômée de 2016 entrée en CDI chez Thalès dès le mois de juin 2016. D’autres ont accédé à des parcours mis sur pied par de grands groupes pour de hauts potentiels, notamment chez Renault ou Cisco.

Recrutés après une école d’ingénieurs ou un autre bac + 5 scientifique, ces diplômés sont capables d’analyser les enjeux techniques d’un appel d’offres et ont appris, grâce à un an de formation dans le MS d’ingénieur d’affaires, à négocier les prix et les délais ainsi qu’à jongler avec les questions juridiques.

Centré sur la vente, le cursus toulousain n’est pas le seul à s’adresser à des ingénieurs débutants, désireux de faire carrière hors des bureaux d’études ou des laboratoires. Toute une série de programmes, estampillés par la Conférence des grandes écoles et calés à bac + 6, leur proposent de se doter d’une compétence en gestion avant d’entrer sur le marché du travail. « Ces suppléments peuvent aider des jeunes qui sortent de formations très pointues, en électronique ou en chimie, par exemple », estime Fatine Dallet, directrice de la division ingénieurs au sein du cabinet de recrutement Michael Page.

« Evoluer plus vite ensuite »

En suivant le mastère spécialisé « management de grands projets », porté par HEC Paris et l’Institut supérieur de l’aéronautique et de l’espace (ISAE) de Toulouse, on apprend ainsi à « organiser une mission en différentes étapes, à s’assurer de sa rentabilité, à solliciter les compétences nécessaires et à déléguer les tâches », résume Philippe Girard, coresponsable du cursus. Autant de talents qui s’acquièrent en situation : avant même de conclure leur année par un stage de quatre mois, les élèves effectuent, deux jours par semaine, des audits en entreprise, tout en préparant le dossier de création d’une jeune pousse.

« Même avec un mastère spécialisé, il est très rare d’accéder d’emblée à une fonction managériale, qui requiert un certain leadership et de l’expérience », prévient l’experte en recrutement Fatine Dallet.

Créé par Télécom Paris-Tech et l’Essec, le MS « management de projets technologiques » revendique, lui aussi, « un lien très étroit avec les entreprises ». « A travers des voyages d’études, des visites de terrain ou des interventions de groupes comme IBM ou Air France, les élèves se constituent une palette de références concrètes », dit Anne-Claire Pache, directrice adjointe de l’école de commerce de Cergy-Pontoise.

Quelles prétentions ces qualifications supplémentaires permettent-elles à l’entrée sur le marché du travail ? « Même avec un mastère spécialisé, il est très rare d’accéder d’emblée à une fonction managériale, qui requiert un certain leadership et de l’expérience », prévient l’experte en recrutement Fatine Dallet. Le bac + 6 et l’ingénieur n’ayant pas complété sa formation auraient donc les mêmes chances d’accéder à un poste en gestion de projet. Mais le premier « aura accumulé des connaissances et des outils qui lui permettront peut-être d’évoluer plus vite ensuite », poursuit-elle.

Un coût de 9 000 à 19 000 euros

« Certaines entreprises embauchent nos diplômés en management de grands projets au même salaire que des ingénieurs entrés sur le marché depuis trois à cinq ans, mais c’est en général plus tard, au bout de cinq ans, que la plus-value apparaît clairement », constate Philippe Girard. Certains utiliseraient plutôt leur mastère pour s’ouvrir de nouveaux horizons, comme ces anciens de l’Institut d’optique qui, après le MS de HEC-ISAE, sont entrés chez L’Oréal.

L’investissement dans ces MS est élevé, oscillant entre 9 000 et 19 000 euros, selon les écoles. Mieux vaut donc faire une solide étude de marché avant de s’inscrire. Les critères à pister auprès des établissements ? « Les partenariats, la solidité du réseau d’anciens et l’ouverture internationale, qui peut faire la différence », répond Meredith Alaïs, consultante au cabinet de recrutement Hays Industrie & Ingénierie. Sans oublier, bien sûr, de bien sonder son projet personnel.

Un supplément et un salon du « Monde », pour tout savoir sur les masters, MS et MSc

Etudiants en licence ou d’ores et déjà diplômés bac + 5, retrouvez un supplément de 16 pages sur les masters de l’université, ainsi que sur les mastères spécialisés et masters of science proposés par les grandes écoles, dans Le Monde daté du 26 janvier, puis sur Le Monde.fr.

Suivra, samedi 28 janvier, le 13Salon des masters et mastères spécialisés (SAMS) organisé par Le Monde, à la Cité de la mode et du design à Paris, permettant de découvrir plus de 4 000 programmes bac + 5 et de participer à des conférences organisées par nos journalistes (entrée libre, préinscription recommandée).