Cette folle présidentielle réserverait-elle encore des surprises ? La victoire de Benoît Hamon, dimanche 29 janvier à la primaire organisée par le PS, fait tourner les têtes à Europe Ecologie-Les Verts. Certains rêvent désormais tout haut d’un rapprochement avec le député des Yvelines quand leur candidat, Yannick Jadot, est à la peine pour réunir ses 500 parrainages.

Un premier pas devait être franchi mardi midi : MM. Jadot et Hamon devaient se retrouver pour déjeuner. Lundi, sur BFM-TV, l’ex-responsable de Greenpeace n’a pas fermé la porte à des discussions avec le socialiste, à condition que ce dernier fasse preuve de « cohérence ». « Si Benoît Hamon est prêt à s’émanciper d’un Parti socialiste qui n’a jamais fait sa conversion écologiste (…), moi, je militerai, y compris au sein de ma force politique, pour que nous nous lancions aussi dans cette grande aventure – de l’écologie et du social », a-t-il affirmé.

Beaucoup s’agitent aussi en coulisse. Le député de Gironde, Noël Mamère, a ainsi déjeuné avant le premier tour de la primaire avec M. Hamon à la demande de ce dernier. Deux proches de l’ancien ministre étaient présents : son directeur de campagne pendant la primaire, Mathieu Hanotin, et l’ex-ministre de l’écologie, Philippe Martin.

« Yannick est un bon candidat, mais il paie à ses dépens la descente aux enfers des écolos et se retrouve aujourd’hui dans un piège, juge M. Mamère. Hamon nous a siphonnés. Il faut maintenant se poser la question de la pertinence d’un candidat écolo à la présidentielle, sans pour autant donner un chèque en blanc à Hamon. »

Il n’est pas le seul à se poser la question. Dimanche, Yannick Jadot, les parlementaires et la direction d’EELV se sont entretenus par téléphone. Rebelote lundi matin, où une réunion était organisée au nouveau siège du parti à Montreuil (Seine-Saint-Denis). Une rencontre à laquelle participait notamment l’ex-patronne du parti, Cécile Duflot, qui a eu, selon plusieurs sources internes, un échange tendu avec une autre députée, Eva Sas, qui codirige le conseil politique de campagne de M. Jadot. « Ce n’était pas houleux, mais on se trouve dans une situation nouvelle avec un socialiste qui veut sortir de la doxa productiviste, raconte Sandra Regol, l’une des porte-parole d’EELV. C’est déstabilisant pour tout le monde. »

« Hamon risque d’être prisonnier de ses amis »

Motif du différend ? « Cécile ne l’a pas dit comme ça, mais elle a fait comprendre que nos amis parlementaires aimeraient que Jadot se couche, rapporte une autre personne présente. Certains aimeraient avoir la main, mais ne l’ont pas. » Lundi après-midi, Mme Duflot a tenu une autre conférence téléphonique, cette fois avec ses proches. Y assistaient notamment Yves Contassot, conseiller EELV de Paris, Marine Tondelier, une dirigeante d’EELV, qui est également l’assistante parlementaire de la députée de Paris, ou encore M. Mamère. Le socialiste Philippe Martin devait y participer, mais a eu un empêchement de dernière minute.

Tout ce petit monde devait se retrouver à l’origine pour discuter de la Convention pour une République écologique, l’association lancée par Mme Duflot en décembre 2016, dont ils sont partie prenante. Mais la réunion s’est transformée en conseil stratégique. « Il y a une école qui estime qu’il faut aller vite, une autre que nous serons plus forts si nous avons les 500 parrainages, explique l’un des participants. Duflot est sur la première option : elle pense que si on ne bouge pas, Hamon risque d’être prisonnier de ses amis. »

Les proches de l’ex-ministre du logement aimeraient ouvrir rapidement des discussions avec M. Hamon autour de trois axes : le revenu universel, la transition écologique et les institutions. « L’idée, c’est de parler du fond et de regarder si on peut avoir un label commun pour les législatives afin de construire une majorité parlementaire, y compris avec le PCF qui s’interroge beaucoup », indique M. Contassot. Ce que deviendrait M. Jadot dans ce scénario est plus flou. « S’il y a un accord sur les législatives, ça relativise considérablement la présidentielle », balaie l’élu parisien.

Une tribune publiée mardi dans Le Monde, notamment cosignée par M. Mamère et Michèle Rivasi, députée européenne EELV, plaide pour « une candidature unique de la gauche progressiste et écologiste ». Cette initiative rejoint celle d’une pétition lancée il y a une semaine sur la plate-forme Change.org qui demande « une coalition entre Benoît Hamon, Jean-Luc Mélenchon et Yannick Jadot ». Soutenue lundi par la féministe Caroline De Haas, proche de Mme Duflot, la sociologue Dominique Méda, ou encore le socialiste Gérard Filoche, elle a connu un petit regain d’intérêt pour atteindre 25 000 signatures dans la soirée.