Soldes à Paris, le 11 janvier. | PHILIPPE LOPEZ / AFP

Tout ne peut pas être la faute de la météo… Mais le fait est que l’hiver doux et le mois de mai gris et pluvieux n’ont pas soutenu les ventes de prêt-à-porter féminin en 2016. Elles ont donc reculé au cours des trois premiers trimestres avant de remonter en fin d’année. Les Françaises ont finalement dépensé 10,4 milliards d’euros pour renouveler leur garde-robe l’année dernière. C’est moins qu’en 2015 (– 2,6 %) dans un marché français global de l’habillement qui recule de 1,2 % en un an.

Derrière ces chiffres qui semblent de prime abord confirmer la morosité d’un marché victime des nouveaux arbitrages des consommatrices (moins de vêtements, plus de téléphonie, de voyages, de restaurants…) se cachent en fait de nouveaux comportements qui disent en filigrane l’attachement si particulier des Françaises à la mode.

Tout d’abord, leur téléphone mobile leur offre la possibilité d’un shopping vingt-quatre heures sur vingt-quatre heures, où qu’elles soient… voire dans une boutique ! « La réalité de l’e-commerce, ce n’est pas une femme qui passe commande sur son ordinateur chez elle à 22 heures ou le dimanche… La mobilité a tout changé », explique François-Marie Grau, délégué général de la Fédération française du prêt-à-porter féminin, qui a révélé les chiffres de son bilan économique 2016, mercredi 8 février.

Montée en puissance des « clicks and mortars »

« La cliente essaie en boutique, achète sur son portable dans la rue et se fait livrer chez elle. Cela exige évidemment des marques et des commerçants de gros efforts d’adaptation : une bonne gestion du stock pour avoir les références et tailles disponibles, une livraison rapide, la prise en charge des retours, bref, un meilleur service. Mais cet accès permanent à l’offre dynamise le marché », précise ce professionnel.

En 2016, tous produits et services confondus, les Français ont dépensé 72 milliards d’euros sur Internet (+ 14,6 %). L’habillement arrive en tête dans le classement des produits les plus achetés en ligne. La mode féminine y contribue largement : depuis 2008, les achats de vêtements pour femme ont été multipliés par trois sur la Toile, à 1,8 milliard d’euros. Et leur part ne cesse d’augmenter, passant de 4,7 % en 2008 à 16,5 % en 2015, puis à 17,4 % en 2016. Pas question non plus de croire que cela concerne les plus jeunes : seules les plus de 75 ans ne s’y sont pas vraiment mises.

Confirmant la fluidité et la complémentarité grandissantes des modes de consommation, les marques et enseignes qui développent en synergie leurs magasins physiques et sites d’e-commerce tirent mieux que les autres leur épingle du jeu. « On assiste à une montée en puissance de ces “clicks and mortars” qui représentent 37,5 % (+ 1,5 point) des ventes de prêt-à-porter féminin sur la Toile. Depuis 2008, le poids de ces acteurs traditionnels dans les ventes en ligne a été multiplié par 2,4 quand les pure players [activité uniquement sur Internet] représentent 22,4 % [+ 0,4 point vs 2015] et les spécialistes de la vente à distance 40 % [– 2 points] », précise M. Grau.

Le « bon produit » reprend de l’importance

Il est aussi intéressant de constater que si le lieu du shopping tend à se déplacer, le moment aussi. Les grandes périodes de soldes et les diverses promotions étalées sur l’année constituent de moins en moins des temps forts d’achat pour les Françaises. L’enquête de la fédération va même jusqu’à laisser entendre que le « bon produit » commence à reprendre de l’importance au détriment de la « bonne affaire » : en moyenne, les prix d’achat des articles sont en légère hausse (+ 0,4 % par rapport à 2015).

Entre 2008 et 2015, le poids relatif des soldes et promotions dans les dépenses de prêt-à-porter féminin est passé de 32,7 % à 44,1 %. L’année dernière, il recule à 42,2 %. Les premiers résultats des soldes d’hiver 2017 ne semblent pas contredire ce retrait : au cours des trois premières semaines des soldes, la consommation habillement-textile est en baisse de 4 % par rapport à la même période de 2016.

Parmi les « bons produits » qui ont particulièrement plu aux Françaises l’an dernier, les manteaux et imperméables enregistrent une progression significative (+ 13,3 % en volume), les doudounes et blousons résistent bien, eux aussi (+ 14,7 %). On assiste à un retour des tailleurs et ensembles pantalon (+ 3,9 %, à leur plus haut niveau sur la période 2008-2016), les shorts et bermudas plaisent toujours, notamment chez les plus jeunes (+ 16 %), au détriment des pantalons et leggings (– 16 % en volume), des jeans, qui restent un excellent produit basique mais baissent légèrement (– 1,3 %), et des jupes (– 19,3 %).

« Les manteaux ne se vendaient plus beaucoup, et c’est reparti… La France reste un pays de mode, sensible aux tendances », commente M. Grau. Et les plus sensibles restent les 13-24 ans, qui sont de loin les plus grandes consommatrices avec un budget annuel moyen de 575 euros, soit un marché de 2,6 milliards. Juste devant les 55-64 ans qui ont dépensé en moyenne 419 euros pour s’habiller l’an dernier.