Une étude révèle une hausse inquiétante du taux de mortalité chez les jeunes Américains
Une étude révèle une hausse inquiétante du taux de mortalité chez les jeunes Américains
Par Stéphane Lauer (New York, correspondant)
L’ampleur d’une telle hausse, pour beaucoup due à la drogue et l’alcoolisme, serait comparable au sommet de l’épidémie de Sida des années 1980-1990 aux Etats-Unis.
Des jeunes américains lors de la course hippique « Far Hills Race » à New Jersey, le 17 octobre 2015. | STEPHANIE KEITH / REUTERS
C’est une tendance inédite pour un pays développé. Selon une enquête publiée le 26 janvier par la revue scientifique The Lancet, le taux de mortalité des jeunes Américains âgés de 25 à 35 ans a connu une progression entre 1999 et 2014, alors que ce taux n’a cessé de baisser dans l’ensemble des pays les plus riches depuis quarante ans.
L’origine de ce bond de la mortalité est encore plus troublante. Ce sont principalement les jeunes femmes blanches, qui tirent les chiffres à la hausse et, dans une moindre mesure, les Indiens Américains et les natifs de l’Alaska. Ainsi, l’analyse des statistiques collectées auprès du National Center for Health Statistics, montre que le taux de mortalité des femmes blanches de 25 ans a connu une progression moyenne annuelle de 3 % pendant les quinze années prises en compte et de 2,3 % pour la catégorie des trentenaires. Pour des garçons du même âge, la croissance annuelle du taux de mortalité s’élève à 1,9 %. Concernant les Indiens Américains âgés de 30 ans, la hausse atteint même 4,3 %, tandis que pour les jeunes originaires de l’Alaska le chiffre est de 1,9 %.
« Une augmentation de la mortalité de 2 % à 5 % par an est rarement observée dans les pays développés. L’ampleur d’une telle hausse est comparable à celle de deux cas d’urgence sanitaire observés dans le passé : la progression substantielle de la mortalité en Russie au cours des années 1990 et la hausse de la mortalité des individus âgés de 20 à 40 ans au sommet de l’épidémie de Sida du milieu des années 1980 au milieu des années 1990 aux Etats-Unis », souligne le rapport.
Overdoses, alcoolisme, suicides et homicides
L’origine des décès prématurés est très parlante du mal-être que traversent ces populations. Il s’agit essentiellement d’overdoses, de maladies du foie (cancer, cirrhoses) provoquées le plus souvent par l’alcoolisme, de suicides et d’homicides. Ces résultats corroborent ceux d’une autre étude publiée récemment qui montrait que les morts causées par une overdose d’héroïne ont quadruplé entre 2010 et 2015 pour les jeunes âgés de 25 à 34 ans.
Le phénomène est d’autant plus atypique qu’il ne touche pas les autres minorités. Les morts prématurées pour les Hispaniques et les Asiatiques restent orientées à la baisse. Pour les Afro-Américains, le recul du taux de mortalité est encore plus spectaculaire avec une baisse de 3,9 % par an. A noter toutefois que le taux de mortalité des Noirs reste encore 1,5 fois plus élevé que celui des Blancs.
L’étude de The Lancet est publiée un peu plus d’un an après celle réalisée par le Prix Nobel d’économie, Angus Deaton et Anne Case, qui montrait que le taux de mortalité de la population blanche américaine la moins éduquée, âgée de 45 à 54 ans, a augmenté de façon inédite au cours de la dernière décennie, alors que là encore, le chiffre reste orienté à la baisse pour les Noirs, les Hispaniques ou les Asiatiques.