Geert Wilders, un candidat islamophobe sous haute protection aux Pays-Bas
Geert Wilders, un candidat islamophobe sous haute protection aux Pays-Bas
Par Jean-Pierre Stroobants (Bruxelles, bureau européen)
Le chef de l’extrême droite néerlandaise tente d’exploiter à son profit une affaire impliquant un membre de l’équipe chargée de le protéger en permanence.
Geert Wilders arrive au Sénat à La Haye, jeudi 23 février. | BART MAAT / AFP
Geert Wilders, le dirigeant du Parti pour la liberté (PVV), a décidé de suspendre ses activités de campagne après l’arrestation d’un agent du Service de protection et de sécurité (DBB), un organe policier chargé de la sécurité des responsables politiques, de la famille royale et des diplomates aux Pays-Bas.
Selon les premières informations diffusées par la presse néerlandaise mercredi 22 février, Farid K., appréhendé lundi 20 février, était membre de l’équipe chargée de la protection du leader d’extrême droite et il aurait fourni, via un intermédiaire et contre rétribution, des renseignements à des « groupes criminels néerlando-marocains ». Ceux-ci, spécialisés dans le recel et le blanchiment, auraient été informés sur l’état d’avancement de certaines enquêtes.
Il apparaît désormais qu’en fait cet agent était chargé de superviser et de sécuriser les lieux où se rendent diverses personnalités publiques. Le parquet avait réclamé son incarcération pour deux semaines mais un tribunal d’Amsterdam a décidé, jeudi 23 février, de le remettre en liberté dans l’attente de son procès.
Le gouvernement embarrassé
Se présentant comme un candidat « antisystème », ou victime de ce système, Geert Wilders va probablement exploiter cette affaire à son profit, même si rien ne démontre, à ce stade, que les renseignements transmis par l’agent du DBB le concernaient.
Le dossier est, quoi qu’il en soit, très embarrassant pour le gouvernement, et singulièrement pour le ministre de la justice qui aurait été informé, en 2016, d’une grave crise de confiance au sein du Service de protection et de sécurité.
Erik Akerboom, le responsable du DBB, déclarait, mercredi soir, que la sécurité des personnalités n’était pas menacée mais que l’enquête se poursuivait. Stef Blok, le ministre de la justice et de la sécurité, a pour sa part indiqué dans une lettre aux députés de la deuxième Chambre qu’il n’y avait « aucune indication » quant à de possibles menaces. « Nous sommes convaincus que M. Wilders peut poursuivre son travail en sécurité », ajoutait le ministre.
Le chef du PVV a toutefois jugé, sur Twitter, que sa situation était « inacceptable ». « Si je ne peux plus avoir une confiance aveugle dans le service chargé de me protéger, je ne peux plus fonctionner », affirmait-il. Il s’est entretenu, mercredi, avec le premier ministre Mark Rutte, son principal rival pour les élections législatives du 15 mars, et a assuré que le gouvernement prenait « au sérieux cette affaire sérieuse ». Deux hauts responsables de la police ont changé d’affectation jeudi mais un porte-parole affirme que ces mutations étaient prévues et ne sont aucunement liées à cette affaire.
Accompagné d’une demi-douzaine d’agents de sécurité
M. Wilders qui, affirme-t-il, prend désormais « le certain pour incertain » (ce qui signifie qu’il considère que sa sécurité n’est plus totalement garantie) ne reprendra, dit-il, ses activités que lorsqu’il possédera tous les détails sur les informations transmises par Farid K. Il a fait allusion à Pim Fortuyn, le leader populiste assassiné en 2002 à Hilversum, en soulignant qu’à l’époque aussi, celui-ci était censé bénéficier d’une protection. En réalité, le dirigeant de la Liste Pim Fortuyn, tué par un défenseur de la cause animale, ne bénéficiait que d’une surveillance policière très réduite.
M. Wilders, lui, est sous très haute protection depuis 2004, l’année où le cinéaste et satiriste Theo Van Gogh a été poignardé, à Amsterdam, par un islamiste radical. Il vit dans des maisons sécurisées et est accompagné en permanence d’une demi-douzaine d’agents de sécurité. A la Chambre des députés de La Haye, son bureau n’est accessible que via un sas ultra-protégé.
Avant ces révélations, le député avait déjà décidé de limiter fortement ses apparitions publiques. Il a refusé la plupart des débats télévisés auxquels il était convié et a annulé une distribution de tracts prévue, samedi 25 février, à Rotterdam. L’une de ses rares apparitions a eu lieu la semaine dernière dans une petite ville du sud du royaume, déclenchant une tempête médiatique, avec la présence de dizaines d’équipes de télévision néerlandaises et étrangères.