Lorsqu’un propriétaire rachète une entreprise, c’est rarement pour la diriger « comme avant ». Si de surcroît, le nouveau patron prend la tête d’une équipe rajeunie et met en pratique d’importantes innovations technologiques, on frôle la révolution. C’est ce qui s’est passé à l’intersaison pour la Formule 1, faisant souffler un vent de renouveau sur la compétition sportive. Alors que le championnat du monde débute ce week-end à Melbourne par le Grand Prix d’Australie, petit tour de chauffe des nouveautés, des protagonistes et de leurs réactions, avant le grand saut dans l’inconnu, dimanche 26 mars à 7 heures (à suivre sur Canal+ et l’Appli Canal+F1).

  • Aérodynamisme et motorisation

Bien avant la fin de la saison 2016, la Fédération internationale de l’Automobile (FIA) autorisa, à la demande conjointe des pilotes, qui « s’ennuient » au volant, et des écuries qui « rament » derrière les Mercedes, les ingénieurs à plancher sur les blocs moteurs et sur l’aérodynamisme. Le résultat a sauté aux yeux, lors des présentations officielles cet hiver : des ailerons à l’avant impressionnants, une aérodynamique provocante. Pour la première fois à contre-courant de l’évolution sécuritaire des dernières années, la FIA valide le fait que les monoplaces hybrides sont plus rapides dans les virages de 20 km/h ou 30 km/h. De 40 km/h même si l’on se fie aux essais de Melbourne des 23 et 24 mars. « Ce n’est pas ainsi qu’il faut communiquer, proteste Jean Todt, qui préside la FIA. Les voitures n’iront pas plus vite en ligne droite, et la piste est un lieu sécurisé. » Tous les circuits ont d’ailleurs dû rehausser leurs protections dans les virages. En filigrane, la motivation de ces améliorations est de rendre les courses plus spectaculaires, pour séduire le public.

  • 20 pilotes au top

Relookées, les monoplaces hybrides de cette saison sont également plus difficiles à conduire, ou « plus amusantes », c’est selon les caractères. C’était prévu. Aussi tous les pilotes se sont-ils préparés, physiquement, au pire. Régime adapté, entraînement intensif, ils ont tous pris en moyenne 5 kg de muscles.

  • Pirelli aussi

Critiqué l’an dernier pour avoir fourni des pneus qui manquaient de « grip » et s’usaient trop vite, Pirelli, qui a le monopole sur le championnat de F1, a promis des améliorations. Les pneumatiques ont suivi le mouvement. Plus spectaculaires, ils sont plus larges, de 60 cm à l’avant et 80 cm à l’arrière, d’où des voitures plus imposantes. Ce qui ne facilite pas vraiment les dépassements – surtout à Monaco.

  • Entre les pneus et le moteur…

Les suspensions Mercedes, soupçonnées d’être un tantinet « actives » sur les flèches d’argent et sur les Red Bull que le constructeur allemand motorise, la FIA clarifie la réglementation à la demande de la Scuderia : Mercedes et Red Bull revoient leur copie.

  • Jeune génération

Le pilote belge de McLaren, Stoffel Vandoorne, scrute les tableaux d’affichage, le 24 mars à Melbourne. | BRANDON MALONE / REUTERS

A 19 ans, Max Verstappen s’apprête à rouler sa 3e saison avec Red Bull. Révélation de 2016 à la conduite agressive, ce qui lui a d’ailleurs valu de nombreux points de pénalité, il est rejoint par un des rares pilotes qui peut se vanter de l’avoir battu – en kart : le jeune français Esteban Ocon. Pas vraiment rookie, celui-ci débute sa première saison complète sous les roses couleurs de Force India, après une demi-saison chez feu-Manor, écurie qui a déposé son bilan en janvier.

  • Liberty Media et Chase Carey

C’est la dernière fois que nous utiliserons le terme « nouveau » à leur égard : le groupe américain Liberty Media, « nouveau » propriétaire de Formula One depuis son rachat, autorisé le 16 décembre 2016, auprès du groupe d’investissement CVC Capital Partners ; Chase Carey « nouveau » patron de la F1 depuis qu’il devient, le 23 janvier, PDG de Formula One Group (FOG), évinçant par là même et plus vite que prévu, Bernie Ecclestone, 86 ans. L’immobilisme n’est plus de rigueur.

  • Que nous disent les tests hivernaux

Huit jours, du 27 février au 2 mars, puis du 7 au 10 mars, c’est peu pour tester autant de nouveautés. Une chose est sûre, les monoplaces sont plus difficiles à tenir. Il suffit pour s’en convaincre de voir la première cession d’essais de Lance Stroll, sorti de piste systématiquement. Esteban Ocon au volant de sa Force India confirme alors : « On va tellement vite dans les virages qu’il est difficile de trouver la limite. Et quand on commence à perdre la voiture, comme la voiture est plus lourde, la rattraper est plus dur, donc on peut sortir. Alors qu’avant, on avait une glisse” pendant laquelle on pouvait la rattraper. »

  • Bonus sur le Web

Le pilote Red Bull Daniel Ricciardo, avant le départ de la deuxième session d’essais, le 24 mars à Melbourne. | Rick Rycroft / AP

Cela pourrait avoir des conséquences plus importantes qu’on ne l’imagine… De très courtes vidéos des essais ont été diffusées sur les réseaux sociaux par certains pilotes et écuries, tel Daniel Ricciardo rentrant sa Red Bull dans les stands, ouvrant une minuscule mais réelle brèche dans l’exclusivité des droits de retransmission qui constitue la base du modèle économique créé et défendu par Bernie Ecclestone.

  • Les McLaren s’impatientent

Les monoplaces McLaren ont certes retrouvé leur couleur orange historique, celui des victoires, mais les essais de Barcelone sont « calamiteux », moteur cassé sur moteur cassé. Le directeur de course, le Français Eric Boulier, serre les dents. Le pilote vedette de l’écurie, le champion espagnol Fernando Alonso et son jeune coéquipier le Belge Stoffel Vandoorne, doivent se résigner. Le moteur Honda n’est pas compétitif. Mais à 35 ans, le double champion n’a pas l’intention de « finir » sa carrière en bas de classement. Même s’il est l’un des mieux payés du circuit, l’argent n’est pas tout. Une demande de moteur aurait été faite à Mercedes, celui initialement prévu pour Manor étant disponible. Mercedes n’a pas démenti, Mercedes qui a mis cinq ans avant de gagner son premier titre, alors que McLaren et Honda ne sont associés que depuis trois ans. Vendredi 24 mars, l’après-midi s’est enfin adoucie pour les deux McLaren-Honda qui n’ont connu aucun problème mécanique.

  • Brèves d’essais, de Melbourne

Sortie de piste pour la Sauberde Marcus Ericsson, le 24 mars à Melbourne. | JASON REED / REUTERS

Première surprise, les deux Force India sont passées au rose depuis l’accord passé le 14 mars avec un nouveau sponsor, BWT, leader européen du traitement de l’eau. Esteban Ocon s’en amuse et tweete une Panthère Rose… Le pilote français découvre le circuit et enchaîne les tours, obéissant aux ordres : surtout ne pas perdre le contrôle. Il fait le job. Moins de réussite en revanche pour le Britannique Jolyon Palmer, qui endommage sa Renault en début de deuxième séance. La Sauber du Suédois Marcus Ericson dérape dans les gravillons, sans abîmer le châssis.

  • Attendue Ferrari

Les mécaniciens Ferrari à l’arrivée sur le pit lane de l’Allemand Sebastian Vettel, le 24 mars à Melbourne. | RICK RYCROFT / AP

En cette année anniversaire – 70 ans –, Ferrari pourrait créer la surprise. Tout a été fait pour entretenir le suspens : une communication réduite à l’intersaison et totalement absente des paddocks du circuit Catalunya début mars alors que ses deux pilotes, Sebastian Vettel et Kimi Räikkönen dominaient les essais hivernaux. Rappelons toutefois qu’en 2016, les tests également prometteurs avaient été suivis d’une saison décevante. Sans présager de l’avenir – il peut y avoir une part d’intox –, les premiers essais de Melbourne ont vu un Lewis Hamilton surclasser cette fois encore ses poursuivants.

  • Mercedes : c’est qui le chef ?

La Mercedes du Finlandais Valtteri Bottas entre aux stands, lors des essais du 24 mars à Melbourne. | ANDREW BROWNBILL / AP

Alors qu’il a été un des premiers à avertir sur la difficulté de maîtriser les nouvelles monoplaces hybrides, le pilote britannique Lewis Hamilton semble avoir rapidement pris le coup de volant. Effacé début mars, il frappe fort les 23 et 24 mars. En tournant en 1 min 23 s 62’, il veut montrer à tous qui est le chef. Aux autres écuries d’abord, mais aussi en interne, face à son coéquipier, Valterri Bottas, venu de chez Williams remplacer le jeune retraité et champion 2016 Nico Rosberg. Le Finlandais ne cesse en effet, depuis son arrivée, de clamer qu’il « peut » puis qu’il « va » battre le triple champion. Luxe suprême, Hamilton bat au passage le record du tour détenu depuis 2004 par l’Allemand Michael Schumacher au volant d’une Ferrari : 1 min 24 s 125’. Décidément, un vent de renouveau souffle sur la F1 cette saison.

F1 : grille 2017 et classement 2016

Grille de départ 2017

Mercedes-AMG : Lewis Hamilton (GBR) et Valtteri Bottas (FIN, ex-Williams).
Red Bull Racing (moteur Renault) : Daniel Ricciardo (AUS) et Max Verstappen (NED), inchangé.
Ferrari : Sebastian Vettel (GER) et Kimi Räikkönen (FIN), inchangé.
Toro Rosso (moteur Renault) : Carlos Sainz Jr (ESP) et Daniil Kvyat (RUS), inchangé.
McLaren-Honda : Fernando Alonso (ESP) et Stoffel Vandoorne (BEL), inchangé.
Williams (moteur Mercedes) : Felipe Massa (BRA) et Lance Stroll (CAN, débutant).
Renault Sport F1 : Jolyon Palmer (GBR) et Nico Hülkenberg (GER, ex-Force India).
Force India (moteur Mercedes) : Sergio Pérez (MEX) et Esteban Ocon (FRA, ex-Manor).
Haas F1 (moteur Ferrari) : Romain Grosjean (FRA) et Kevin Magnussen (DEN, ex-Renault).
Sauber (moteur Ferrari) : Pascal Wehrlein (GER, ex-Manor) et Marcus Ericsson (SWE).

Classement 2016 des écuries

  1. Mercedes (765 pts)
  2. Red Bull (460 pts)
  3. Ferrari (398 pts)
  4. Force India (173 pts)
  5. Williams (138 pts)
  6. McLaren (76 pts)
  7. Toro Rosso (71 pts)
  8. Haas (29 pts)
  9. Renault (8 pts)
  10. Sauber (2 pts)
  11. Manor (1 pt)

Classement 2016 des pilotes

  1. Nico Rosberg (Mercedes, 385 pts)
  2. Lewis Hamilton (Mercedes, 380 pts)
  3. Daniel Ricciardo (Red Bull 256 pts)
  4. Sebastian Vettel (Ferrari, 212 pts)
  5. Max Verstappen (Red Bull 204 pts)