JEAN-CHRISTOPHE VERHAEGEN / AFP

C’est l’histoire d’une carrière d’avocat qui tourne court. Mathieu T., 27 ans, étudiant de l’université Clermont-Auvergne, a été condamné, jeudi 6 avril, par le tribunal correctionnel de Clermont-Ferrand, à 3 ans de prison avec sursis, 500 euros d’amende et 500 euros de remboursement de frais de justice pour avoir dérobé les sujets d’examen d’entrée à l’Ecole de formation des avocats Centre Sud.

Culotté et imaginatif, l’apprenti escroc a fait également preuve de sang froid pour commettre son forfait. Pas d’effraction, pas de piratage Internet : c’est en manipulant un appariteur de l’université qu’il est parvenu à se faire remettre les sujets, à moins d’une semaine du jour de l’examen.

Un nouvel intervenant à l’école

Le 8 septembre, de bon matin, l’étudiant contacte par téléphone le service de reprographie de l’université. Il prend soin de télécharger sur son téléphone un logiciel qui masquera son numéro et se présente sous un faux nom, en qualité de nouvel intervenant de la faculté de droit. Sa requête : comprendre comment fonctionne le système de reprographie de la faculté. L’employé ne se méfie pas et l’invite à le rejoindre.

Mathieu T. débarque aussitôt sur le site. Un peu plus âgé que la moyenne des étudiants, élégant, il mystifie aisément le responsable de l’imprimerie, qui croit avoir affaire à un enseignant. La conversation s’engage, puis de fil en aiguille porte sur les sujets des épreuves juridiques. Pour endormir d’éventuels soupçons, l’étudiant cite le nom d’un cadre de l’université, comme preuve de sa connexion avec la hiérarchie de l’établissement. Quand il demande un exemplaire des sujets… on le lui donne, tout simplement. L’examen étant prévu pour le 14 septembre, l’apprenti juriste a six jours pour potasser et préparer.

L’escroquerie serait passée en douceur si une petite voix intérieure n’avait rapidement suggéré à l’imprimeur de passer un appel à une responsable de l’université afin de vérifier l’identité du nouvel « intervenant ». Lequel est évidemment inconnu de l’administration universitaire. Branle bas de combat ! L’université comprend que les sujets de l’examen a l’Ecole d’avocats ont fuité.

Inscription au casier judiciaire

Une plainte est déposée. La police enquête : si le logiciel utilisé par Mathieu T. permet de masquer son numéro à son interlocuteur, il n’empêche en rien de tracer l’origine de l’appel. C’est sans grand mal que les enquêteurs remontent la piste de l’étudiant en droit. Quant aux responsables des examens, ils redéfinissent les sujets prévus pour l’examen du 14 septembre et avertissent l’ensemble des candidats du changement. Mathieu T. ne s’y présentera pas. Convoqué par la police, identifié par l’imprimeur, il reconnaît les faits.

L’étudiant est une première fois sanctionné par une commission disciplinaire de l’université Clermont-Auvergne, qui prononce à son encontre, le 16 décembre, « une exclusion définitive de tout établissement public d’enseignement supérieur ». Mathieu T. a fait appel de cette décision.

A cette sanction s’est donc ajoutée la peine de prison avec sursis et 1 000 euros d’amende, ainsi que l’inscription de cette condamnation à son casier judiciaire. Une ligne qui pourrait lui fermer les portes d’un grand nombre d’établissements liés à la fonction publique et contraindre Mathieu T. à modifier son plan de carrière. Alors qu’il avait passé, peu après le vol des sujets de l’Ecole d’avocat, les concours de l’Ecole nationale des finances publiques puis celui de la Banque de France.