La marche en soutien à l’Université d’Europe centrale (CEU) a rassemblé au moins 60 000 personnes à Budapest, le 9 avril. | Janos Marjai / AP

Plusieurs dizaines de milliers de personnes ont manifesté à Budapest dimanche 9 avril en soutien à l’Université d’Europe centrale (CEU en anglais) financée par le milliardaire américain d’origine hongroise George Soros, contre laquelle le gouvernement de Viktor Orban a lancé une offensive.

A côté des étudiants et du personnel de l’Université, les manifestants de tout âge habillés en bleu (la couleur de la CEU) ont participé à la marche, qui a rassemblé près de 60 000 personnes, selon un photographe de l’Agence France-Presse (AFP), et jusqu’à 80 000 selon les organisateurs.

La Hongrie a adopté mardi une loi controversée susceptible de conduire à la fermeture de la CEU, établissement anglophone créé en 1991 à Budapest par George Soros, devenu la bête noire du premier ministre souverainiste Viktor Orban. La nouvelle législation prévoit notamment de priver de licence les instituts d’enseignement étrangers qui ne disposent pas de campus dans leur pays d’origine.

Cette disposition vise tout particulièrement la CEU, fondée peu après la chute du communisme pour promouvoir « la bonne gouvernance, le développement durable et la transformation sociale ». L’université située à Budapest a accueilli, depuis 1991, 14 000 étudiants du monde entier, triés sur le volet, pour étudier – en anglais – dans des conditions exceptionnelles, souvent jalousées par la communauté universitaire locale.

Lundi minuit

Le but de la manifestation de dimanche était de demander au président Janos Ader de ne pas signer la loi. Ce dernier à jusqu’à lundi minuit pour la signer ou la soumettre au Conseil constitutionnel s’il l’estime nécessaire.

Les medias hongrois indépendants ont affirmé qu’il s’agissait de la plus importante manifestation depuis 2014. | BERNADETT SZABO / REUTERS

Partis du château de Buda, les manifestants ont parcouru plusieurs kilomètres jusqu’au Parlement. Calquées sur l’affiche anti-UE « Arrêtons Bruxelles ! » du premier ministre Viktor Orban, des banderoles clamaient « Arrêtons Moscou ! » ou « Arrêtons Orban ! ». Les médias hongrois indépendants ont affirmé qu’il s’agissait de la plus importante manifestation depuis celle organisée contre un projet de taxation de l’Internet en octobre 2014, qui avait réuni entre 30 000 et 40 000 personnes. Le gouvernement avait alors battu en retraite.

Depuis plusieurs mois, M. Orban a intensifié son offensive contre George Soros, qu’il accuse de financer l’opposition. Parmi ses cibles figurent notamment les ONG de défense des libertés ou de protection des demandeurs d’asile, dont beaucoup sont en partie subventionnées par la célèbre fondation du milliardaire, l’Open Society Foundations (OSF). Des « activistes payés par des organisations internationales » pour « faire venir des centaines de milliers de migrants en Europe », a dénoncé M. Orban en février.

Lire le portrait : George Soros, l’ennemi idéal

Les menaces pesant sur l’établissement ont suscité un vaste mouvement de mobilisation. Plus de 900 universitaires de monde entier, dont 18 prix Nobel, ont signé une pétition exigeant le retrait de cette loi. Le département d’État américain, la commission européenne et plusieurs responsables européens, notamment français, ont exprimé leur préoccupation. M. Orban a assuré de son côté être « prêt à négocier avec les Etats-Unis » au sujet de l’avenir de l’université, qui a jusqu’à janvier 2018 pour se conformer à la nouvelle loi.