Le gouvernement livre son testament budgétaire
Le gouvernement livre son testament budgétaire
LE MONDE ECONOMIE
Le programme de stabilité des finances publiques, présenté mercredi en conseil des ministres, prévoit un déficit public à 2,8% du PIB en 2017, sous la barre des 3 %.
Le ministre de l’économie et des finances Michel Sapin et le secrétaire d’Etat chargé du budget Christian Eckert à la sortie du palais de l’Elysée le 5 avril 2017. | BERTRAND GUAY / AFP
C’est, en quelque sorte, le testament budgétaire du gouvernement sortant. Mais un testament qui entend laisser aux héritiers un legs bien ordonné : à charge pour eux de ne pas le dilapider. Le programme de stabilité 2017-2020, présenté mercredi 12 avril en conseil des ministres et qui sera transmis avant la fin du mois à la Commission européenne, constitue le dernier exercice de programmation des finances publiques du quinquennat de François Hollande.
C’est un exercice obligé, puisque chaque Etat membre de l’Union européenne doit transmettre au printemps ce document destiné à faciliter la coordination des politiques économiques et budgétaires. Mais aussi, par la force des choses, un exercice quelque peu théorique, puisqu’il risque d’être remis en question par les choix du futur président de la République et de sa majorité.
Pour autant, le ministre de l’économie et des finances, Michel Sapin, et le secrétaire d’Etat chargé du budget, Christian Eckert, entendent en faire « un document de référence ». « C’est un acte que nous voulons en cohérence avec l’action que nous avons menée, en conformité avec nos engagements européens et de référence pour nos successeurs », assure M. Sapin, qui insiste sur la « crédibilité » de ces prévisions.
Un scénario plus prudent
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Tout d’abord, pour 2017, l’objectif de déficit public a été révisé à 2,8 % du produit intérieur brut (PIB), contre 2,7 % dans la loi de finances. La révision tient compte, tout d’abord, du fait que le déficit 2016 a atteint finalement 3,4 %, au lieu des 3,3 % prévus. Elle intègre également une série d’ajustements. Ainsi, le résultat des négociations sur l’Unédic, le régime d’assurance-chômage, impose de retirer 1,5 milliard d’euros des économies prévues. En outre, le regain d’inflation et l’évolution des taux d’intérêt devraient accroître de 750 millions d’euros la charge de la dette. Au total, le déficit s’en trouverait alourdi d’environ 3 milliards d’euros.
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Pour atteindre les 2,8 % de déficit public en 2017, le gouvernement a donc inscrit 3,4 milliards d’euros d’économies supplémentaires, dont 1,5 milliard devra être pris sur les dépenses des ministères. Mais les organismes de Sécurité sociale et les collectivités territoriales seront également mis à contribution. Si ce redressement des finances publiques était tenu, la France sortirait de la procédure pour déficit excessif dans laquelle elle se trouve depuis 2009.
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Pour 2018, 2019 et 2020, les objectifs de croissance, fixés respectivement à 1,5 %, 1,6 % et 1,7 %, ont été légèrement revus à la baisse, avec une cible de déficit de 1,3 % du PIB en 2020. Après avoir considéré comme « plausible » la prévision de croissance pour 2017, le Haut Conseil des finances publiques (HCFP) estime que la révision à la baisse des hypothèses de croissance du PIB et d’inflation pour les années 2018 à 2020 « va dans le sens des observations formulées dans son avis sur le programme de stabilité d’avril 2016 ». Il estime que « ce scénario, plus prudent, peut constituer une base raisonnable pour la construction de trajectoires de finances publiques ». Toutefois, le HCFP relève, une nouvelle fois, « le caractère peu vraisemblable des estimations d’écart de production et de croissance potentielle présentées par le gouvernement », ce qui a pour effet de réduire artificiellement le déficit structurel.
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Pas de « cadavres dans le placard »
Le gouvernement s’en défend. « A partir du moment où nous repassons sous la barre des 3 % de déficit, nous respectons les principes européens de réduction du déficit structurel de 0,5 point par an, soutient M. Sapin. Pour atteindre cet objectif, il suffit de poursuivre la politique mise en œuvre jusqu’à présent. C’est possible, sans massacrer les dépenses publiques. »
Car la présentation de ce programme de stabilité prend bien l’allure d’une mise en garde vis-à-vis de ceux qui seront aux responsabilités après les prochaines élections. « On donne un guide de référence après trois ans d’exercice où nous avons respecté nos engagements, rappelle M. Eckert. Nous prolongeons par la même méthode. C’est dans ce sens que le 2,8 % de déficit pour 2017 est tout à fait crédible. Nous avons fait le travail avec sérieux. »
Sous-entendu : si ceux qui prendront la suite s’en écartent, ce sera de leur responsabilité. Un avertissement en bonne et due forme, en direction, notamment, du candidat de la droite François Fillon, qui prévoit, lui, un déficit de 3,7 % en 2017. De même, les ministres contestent fermement avoir laissé « des cadavres dans le placard » pour l’année suivante. « Toutes les mesures votées pour 2018 sont intégrées, même les mesures de trésorerie non reconductibles, pour un montant de 6 milliards d’euros, assure le secrétaire d’Etat. Qu’on ne nous dise pas qu’il y a des bombes à retardement. Ce n’est pas le cas. »
« Evidemment, tout gouvernement à venir pourra modifier cette trajectoire. Mais avec cette “charte de bonne conduite”, chacun pourra juger des effets des décisions qui seront prises. Le déficit, s’il dérape, ce ne sera pas de notre faute », anticipe M. Sapin. En ce sens, le ministre refuse le terme de « testament budgétaire ». « Nous serons vivants pour regarder ce que les autres feront », prévient-il.