Etudier les réseaux sociaux pour comprendre l’opinion, « ce n’est pas un sondage »
Etudier les réseaux sociaux pour comprendre l’opinion, « ce n’est pas un sondage »
Les sondages prétendant mesurer l’opinion à travers l’étude des réseaux sociaux ont fleuri pendant la campagne. Pour le directeur général délégué d’Ipsos, ils sont à manier avec grande précaution.
La question de Pixels : quelle valeur pour les "sondages alternatifs" ?
Durée : 06:58
De nombreux sondages « alternatifs » prétendant mesurer l’opinion à travers l’étude des réseaux sociaux ont fleuri pendant la campagne pour l’élection présidentielle. Ces travaux ont été largement partagés sur Internet, utilisés par certains candidats en difficulté dans les sondages classiques et même repris fréquemment dans la presse.
A tel point que la commission des sondages a émis un avertissement le 31 mars, estimant que ce type d’études ne « constituait pas des sondages » et « ne pouvait être présenté comme tel ».
Invité dimanche 16 avril de l’émission « Questions politiques », sur France Inter et en partenariat avec Le Monde, Brice Teinturier a critiqué ce type d’études, estimant que « ce n’est pas des sondages, au sens technique du terme, reposant sur des échantillons représentatifs (mais) des techniques qui mesurent autre chose ».
Pas de « valeur prédictive supérieure »
Le directeur général délégué de l’institut de sondages Ipsos a expliqué ne pas considérer que « ces acteurs aient une valeur prédictive supérieure » :
« Aux Etats-Unis, sur le Brexit et pendant la primaire, ces entreprises n’ont pas mieux prédit les choses que les enquêtes d’opinion. Elles font un autre travail qui n’est pas inintéressant, mais c’est autre chose. »
Loïc Blondiaux, professeur de science politique à l’université Paris-I Panthéon-Sorbonne, également invité de « Questions politiques », était sur la même ligne :
« Quelquefois, il y a concordance : si vous regardez Mélenchon, la présence sur le Net pour ce candidat correspond à la dynamique que l’on mesure dans les sondages, mais si vous prenez Asselineau, il devrait être beaucoup plus élevé. »
Pour M. Blondiaux, les citoyens dont les discussions politiques sont analysées ne représentent pas fidèlement la population française. « Les travaux universitaires montrent que sur les réseaux sociaux ceux qui se prononcent politiquement sont un miroir complètement déformé de la population », explique-t-il.
Un outil qui intéresse néanmoins les instituts
« A partir du moment où ces entreprises essaient de faire de la prédiction, elles devraient être soumises aux mêmes règles d’exigence méthodologiques et de rigueur » a jugé M. Teinturier, interrogé pour savoir si ce type d’enquêtes devait être encadré à la manière des instituts de sondages plus classiques.
M. Teinturier a concédé que ce type de travaux, qui analyse les discussions sur les réseaux sociaux, pouvait donner « un certain nombre de signaux », et a précisé que son institut s’intéressait déjà de près aux conversations en ligne :
« Nous devons répondre à des clients qui cherchent à évaluer leurs actions, à comprendre ce qu’il se passe dans la société. Pour cela, je pioche dans plein d’outils, les sondages d’opinion, le big data, l’ethnologie, les études qualitatives. L’enjeu est ensuite d’en tirer quelque chose de juste. »