Les syndicats affichent leurs divisions pour le 1er-Mai
Les syndicats affichent leurs divisions pour le 1er-Mai
Par Michel Noblecourt
A la différence de 2002, les organisations syndicales ne manifesteront pas ensemble contre l’extrême droite.
Philippe Martinez (CGT), à Aulnay-sous-Bois, le 26 avril. | BERTRAND GUAY / AFP
S’il fallait un signe supplémentaire pour montrer que la mobilisation contre la présence du Front national au second tour du scrutin présidentiel est très en deçà de celle de 2002, les syndicats viennent de le donner. Il y a quinze ans, tous les syndicats, à l’exception de FO, avaient manifesté ensemble contre l’extrême droite. En 2017, il n’y aura pas de défilé unitaire.
Lors d’une réunion intersyndicale à la FSU, lundi 24 avril, la CGT de Philippe Martinez a proposé un texte qui mentionnait le rejet des idées d’extrême droite mais ne contenait pas d’appel à battre Marine Le Pen, pour ne pas indisposer FO qui refuse toute consigne de vote. La CFDT avait présenté un contre-projet qui évoquait explicitement un vote contre la candidate frontiste et donc en creux en faveur d’Emmanuel Macron.
Le divorce était d’autant plus clair que la CGT et FO voulaient pointer la responsabilité des « politiques d’austérité » dans la montée de l’extrême droite et rappelaient, parmi leurs revendications, leur opposition à la loi travail soutenue par la CFDT… La centrale de Laurent Berger souhaitait s’inspirer de la déclaration signée le 5 juin 2015 par sept organisations – CGT, CFDT, CFTC, CFE-CGC, UNSA, FSU, Solidaires – pour « barrer la route au populisme, aux idées d’extrême droite et à la démagogie, et militer résolument pour les valeurs du syndicalisme et les principes républicains ».
Résultat : la CFDT organisera, le 1er mai, un « rassemblement républicain » à Paris (au métro Jaurès) avec l’UNSA et la Fédération des associations générales étudiantes pour « rejeter la vision réactionnaire et identitaire du Front national », et appeler à « voter massivement pour le candidat républicain ». Mercredi, M. Berger a affirmé que ce vote ne valait pas « acceptation » du projet de M. Macron et l’a invité à entendre « une aspiration à beaucoup plus de justice sociale ». « Nous combattrons M. Macron lorsque nous serons en désaccord, a-t-il averti, mercredi 26 avril, sur RTL, notamment sur sa conception du dialogue social. »
La CGT défilera le 1er mai à Paris, à partir de la place de la République, avec FO, la FSU, Solidaires, l’UNEF et des syndicats lycéens mais il n’y a pas d’appel commun. « Le message pour la CGT, c’est évidemment contre l’extrême droite – pas une voix pour le Front national – et en même temps pour le progrès social », a indiqué M. Martinez.
« Mauvais coups »
Mardi, la commission exécutive de la CGT a appelé à « faire barrage à l’extrême droite », « un danger pour la démocratie, la cohésion sociale et le monde du travail ». Mais elle souligne que le premier tour est le résultat « des politiques libérales, des lois régressives, des remises en cause des droits », citant parmi les « mauvais coups » la loi travail et la loi Macron. Le candidat d’En Marche ! n’est pas nommé, et « la CGT ne croit pas en l’homme providentiel ».
FO a diffusé son propre appel pour un 1er-Mai qui a « une dimension particulière ». La centrale de Jean-Claude Mailly réaffirme que « la crise [est] le terreau sur lequel prospèrent les idées d’extrême droite », et se déclare « opposée génétiquement au racisme, à la xénophobie et à l’antisémitisme ». « Les principes républicains de liberté, d’égalité, de fraternité, de laïcité, ainsi que la démocratie sont des valeurs incontournables », ajoute-t-elle. Mercredi, l’UNSA a appelé à « faire barrage » à Mme Le Pen « en utilisant le bulletin Macron ». En revanche, la CFE-CGC « s’abstient de toute consigne ou recommandation dans le choix souverain et confidentiel de chaque électeur ».
Un sondage Liaisons sociales quotidien-Harris interactive, réalisé le 23 avril auprès de 7 191 inscrits sur les listes électorales, révèle le vote de ceux qui affichent une proximité syndicale. Jean-Luc Mélenchon a obtenu les voix de 51 % des sympathisants de la CGT (39 % en 2012), 53 % de ceux de Solidaires (39 %), 32 % à FO (13 %) et 14 % à la CFDT (6 %). M. Macron obtient 48 % à la CFDT – 56 % pour François Hollande en 2012 –, 42 % à l’UNSA, 31 % à la CFE-CGC, 29 % à la CFTC, 15 % à FO et 12 % à la CGT. Quant à Mme Le Pen, 24 % des proches de FO ont voté pour elle (25 % en 2012), 15 % à la CGT (9 %), 14 % à la CFTC (15 %) et 7 % à la CFDT (12 %).