Sélection galeries : Ha Chong-Hyun et Sturtevant
Sélection galeries : Ha Chong-Hyun et Sturtevant
Par Philippe Dagen
A Paris, une rétrospectice consacrée à l’artiste coréen , et des travaux photographiques de l’appropriationniste américaine.
Ha Chong-hyun à la galerie Almine Rech
On connaît peu en France l’artiste coréen Ha Chong-hyun. Ce n’est pourtant pas un nouveau venu : il est né en 1935. A partir des années 1970, dans le contexte politique et artistique de son pays, il construit une œuvre marquée par une sévère sobriété de moyens et la suggestion, latente ou explicite, de la destruction. On le voit enfin à Paris, rétrospective en abrégé. Elle commence par l’une de ses œuvres initiales où le fil de fer barbelé est le matériau principal. Elle se développe ensuite du côté de la peinture, terme ici presque impropre. Ha Chong-huyn peint moins qu’il ne dépose sur des surfaces aux textures rugueuses des traces d’une brosse chargée de blanc, de noir ou d’un gris de fer. Les couleurs échoient à couvrir le fond, de sorte que s’imposent des sensations de déchirure, d’émiettement ou, à l’inverse, d’enfouissement dans la terre. Ses grandes œuvres noires supporteraient aisément le voisinage de nombre d’artistes célèbres, d’Ad Reinhardt à Pierre Soulages. Il serait grand temps d’inscrire Ha Chong-huyn – et plus largement l’abstraction coréenne du mouvement Dansaekhwa – dans une histoire mondiale de l’art.
Ha Chong-hyun. Galerie Almine Rech, 64, rue de Turenne, Paris 3e. Tél. : 01-45-83-71-90. Du mardi au samedi, de 11 heures à 19 heures. Jusqu’au 3 juin.
Sturtevant, « Undeniable Allusion » à la galerie Thaddaeus Ropac
Sturtevant (1924-2014), qui ne voulait pas être appelée autrement, sans mention de son prénom féminin, est d’ordinaire classée parmi les appropriationnistes, ainsi nommés parce que leurs travaux citent minutieusement des œuvres antérieures et très connues. Ce n’est pas exactement le cas dans les travaux principalement photographiques ici réunis. La citation est certes omniprésente, et il n’est guère difficile d’identifier les allusions à Duchamp, Warhol ou Beuys, omniprésentes. Mais l’ironie l’est aussi. Sturtevant s’empare du Nu descendant l’escalier, Adam et Eve, le Coin de chasteté ou l’Objet-dard. Elle les déplace, répète, multiplie ou démonte. Elle, la fille, se déguise en Marcel D. et en Joseph B., ses maîtres. Pillage, collage, montage, maquillage : ce sont ses procédés, dont elle use avec une liberté que le droit d’auteur d’une part, le respect dû aux grands hommes d’autre part, rendraient aujourd’hui sans doute impossible. L’accrochage délibérément désordonné accentue le côté joueur de ces œuvres qui ne prennent rien trop au sérieux – et surtout pas l’histoire de l’art.
Undeniable Allusion, Galerie Thaddaeus Ropac, 7, rue Debelleyme, Paris 3e. Tél. : 01-42-72-99-00. Du mardi au samedi, de 10 heures à 19 heures. Jusqu’au 17 juin.