Cannes monte à Paris (et ailleurs), retour sur les débuts de Polanski : notre sélection cinéma
Cannes monte à Paris (et ailleurs), retour sur les débuts de Polanski : notre sélection cinéma
Par Thomas Sotinel
Chaque mercredi, dans La Matinale, les critiques cinéma du « Monde » présentent les meilleurs films à découvrir sur grand écran.
Concourant pour la Palme d’or (et pour le prix d’interprétation masculine) la principale sortie de ce mercredi est un portrait de Rodin par MM. Doillon et Lindon. En attendant celle du trouble Amant double de François Ozon, lui aussi en compétition à Cannes, vendredi 26 mai, on verra un modèle du genre (le thriller érotique cauchemardesque), Répulsion.
Les Parisiens pourront aussi, du 26 au 28 mai, découvrir une bonne partie de la sélection cannoise. Et croyez m’en, mieux vaut laisser le capitaine Jack Sparrow cuver son rhum à fond de cale, pas besoin d’embarquer pour le cinquième tour de Pirates des Caraïbes.
Le grand homme et la glaise : « Rodin »
RODIN Bande Annonce (Vincent Lindon, Izïa Higelin - Cannes 2017)
Le Rodin de Doillon est dominé par Vincent Lindon, barbu comme le Bon Dieu, impérieux et fragile. La structure du film, découpé en tableaux, les dialogues qui accumulent les noms propres et le choix d’Izia Higelin pour incarner Camille Claudel, l’élève, la maîtresse, la victime et la Némésis de l’auteur du Penseur, ont divisé la critique.
Reste une formidable performance d’acteur et quelques séquences réellement touchantes qui mettent en scène Rodin et la mère de son fils, interprétée avec une force peu commune par Séverine Caneele.
Film français de Jacques Doillon, avec Vincent Lindon, Izia Higelin, Séverine Caneele (1 h 59).
Une femme sombre : « Répulsion »
Repulsion - Trailer (VO)
En janvier 1966, lors de la sortie parisienne du premier long-métrage tourné hors de Pologne par Roman Polanski, le critique du Monde Jean de Baroncelli écrivait que ce film « terrifie ou plus exactement horrifie. Mettons tout de suite les spectateurs en garde : ce n’est pas un ouvrage pour âmes sensibles ou cœurs délicats. On a demandé à Polanski de nous plonger dans un cauchemar. Il nous y plonge sans ménagement. Devant certaines images notre malaise peut aller jusqu’à la nausée. Le sang gicle dans Répulsion ; il gicle des crânes fracassés et des visages tailladés à coups de rasoir ; un lapin dépiauté sur lequel bourdonnent des mouches devient un immonde symbole de mort ; et l’amour se réduit à quelques râles obscènes ou à un viol incessant ».
Répulsion, c’est aussi le premier des rôles, avant Belle de jour ou La Sirène du Mississippi qui firent de Catherine Deneuve une interprète de l’étrange et du trouble, en plus d’être l’une des lumières du cinéma français.
Film britannique de Roman Polanski, avec Catherine Deneuve, John Fraser, Ian Hendry (1 h 45).
Gondry underground : « Zazie dans le métro » à la Cinémathèque
Bande annonce : Zazie dans le Métro
Tous les ingrédients d’un mémorable mercredi après-midi sont réunis : d’abord le film, Zazie dans le métro, de Louis Malle, mise en scène de l’aimable folie verbale de Raymond Queneau avec Catherine Demongeot et Philippe Noiret. On a reproché au film de Malle un peu trop de sagesse, mais on peut aussi y voir l’élégance du metteur en scène. Et pour expliquer aux enfants ce que c’est de porter à l’écran un texte réputé inadaptable, la Cinémathèque a eu recours aux services du metteur en scène de L’Ecume des jours, Michel Gondry, qui est aussi en mesure de leur dire pourquoi les wagons de métro étaient alors verts ou rouges.
Le 25 mai à 15 heures Cinémathèque française, 51, rue de Bercy, Paris 12e.
La Croisette à l’Opéra : Cannes à Paris
A deux pas du Grand Café, où eut lieu la première projection publique, le cinéma Gaumont Opéra proposera, du 26 au 28 mai, quatorze longs-métrages de la sélection officielle du 70e Festival de Cannes. Au moment où nous écrivons, certains des titres proposés, Une femme douce, de Sergei Loznitsa ou Good Time, des frères Safdie, n’ont pas encore été dévoilés à Cannes.
Parmi les recommandations sincères et fondées sur l’expérience : Faute d’amour, d’Andreï Zviaguintsev, portrait terrifiant d’une famille en voie de décomposition dans une Russie dont l’âme se défait par pans entiers ; 120 battements par minute, de Robin Campillo, chronique d’une lutte – celle des militants d’ActUp pour forcer la société française et ses institutions à accorder à l’épidémie de sida l’attention et les ressources qu’elle nécessitait – et d’un amour, celui de deux militants magnifiquement interprétés par Nahuel Perez Biscayart et Arnaud Valois ; et aussi L’Atelier, de Laurent Cantet, ou le documentaire tourné en Birmanie par Barbet Schroeder, Le Vénérable W.
Du 26 au 28 mai, Gaumont Opéra, 2, boulevard des Capucines, Paris 9e.