Les protagonistes de « Boangwan » : un businessman véreux (interprété par Kim Sung-kyun, en haut à g.), un shérif téméraire (Lee Sung-min, en bas à g.) et son beau-frère (Cho Jin-woong, en bas à dr.). | Captures d'écran Web

C’est un des succès surprises du printemps en Corée du Sud. Fin mai, à peine un mois après sa sortie, la comédie policière Boangwan (« shérif ») avait attiré plus de 2,5 millions de spectateurs en salle. Un chiffre d’autant plus éloquent que la fréquentation des cinémas est traditionnellement plutôt faible à cette période de l’année, à l’exception des blockbusters hollywoodiens. Mais le troisième film de Kim Hyung-ju, 36 ans, a fait jeu égal avec les superproductions américaines Les Gardiens de la galaxie 2 et Baby Boss. Le succès confirme la réussite du cinéaste, dont les deux premiers longs-métrages, les thrillers Yongseoneun Eupda (« sans pitié », 2010) et Gantongeul Gidarineun Namja (« l’odeur », 2012), avaient attiré plus d’un million et demi de spectateurs.

Le riche ambitieux et le tendre « shérif »

Boangwan se déroule à Gijang, tranquille bourgade près de Busan, le grand port du sud-est du pays, connue pour ses jolies plages. Ancien détective renvoyé de la police, Dae-ho (interprété par Lee Sung-min) s’y est autoproclamé « shérif ». Très fier-à-bras et assez maladroit, il exerce son petit magistère jusqu’au retour d’un enfant du pays, Jong-jin. Ce dernier a fait fortune à Séoul et revient avec l’ambition affichée de transformer Gijang en station balnéaire de première importance. Mais ses manières suaves, destinées à attirer le soutien de la population, réveillent l’instinct du détective Dae-ho, qui enquête pour savoir si les activités de Jong-jin ne dissimulent pas une sombre affaire de trafic de drogue.

L’intrigue du film, qui oppose un riche ambitieux à un tendre voyou, a trouvé un écho dans la société sud-coréenne. Après des décennies de développement économique à tout prix, le pays aspire à une pause et nourrit une défiance envers les riches entrepreneurs aux pratiques souvent malhonnêtes, comme en attestent les nombreux scandales politico-financiers.

The Sheriff In Town (보안관) | Trailer

Mais le succès de Boangwan tient aussi à un duo d’acteurs très populaires : Cho Jin-woong, valeur sûre du cinéma sud-coréen qui avait un rôle important dans la série policière Signal, l’un des plus gros succès de 2016 ; et Kim Sung-kyun, qui assure la réussite de tous les films où il apparaît. La rivalité entre deux personnages de machos est un motif qui s’est retrouvé dans les succès du premier semestre de l’année en Corée du Sud : Peurizeun (« la prison »), Imgeumnimui Sagunsoocheob (« les notes du roi ») et Teukbyeolsimin (« le maire »). En avril, l’agence de presse Yonhap analysait le phénomène et expliquait que « montrer “des mecs qui sont des mecs” reste très populaire auprès d’une large partie du public, notamment les jeunes femmes, qui sont toujours les plus nombreuses à fréquenter les salles de cinéma ». À voir si le film, dont le titre anglais — destiné aux ventes à l’étranger — est The Sheriff in Town, profitera de l’attrait actuel des spectateurs occidentaux pour le cinéma sud-coréen.