Le sport peut-il se muer en outil de développement ? C’est en vue d’aborder cette problématique que des membres du monde du sport, plus particulièrement du basket, et des dirigeants d’organisations non gouvernementales se sont rassemblés le mardi 4 juillet, au siège de l’Agence Française de Développement (AFD), à Paris.

L’AFD, dont la mission est de lutter contre la pauvreté, a décidé d’entrer dans la danse, alors qu’elle a ignoré, pendant de nombreuses années, le rôle du sport dans la réalisation de ses actions. « Jusqu’à présent, les banques de développement n’ont pas assez mesuré l’importance du sport en tant qu’accélérateur de développement », déplore Rémy Rioux, directeur général de l’agence. À présent, la plus ancienne banque de financement du monde souhaite réunir des sphères qui « ne se connaissent pas, voire s’ignorent », afin de s’attaquer à trois axes qu’elle considère majeurs : « le sport et l’éducation, le sport et le développement urbain, le sport et la création d’emploi ainsi que le sport et la sortie de crise » précise le directeur général. Ces opérations sont destinées aux pays en voie développement, notamment en Afrique. Les intentions sont là mais aucune action concrète n’est prévue pour l’instant et le budget n’est pas encore fixé. Cette réunion est seulement « le point de départ d’une collaboration commune », explique David Blough, directeur exécutif de l’ONG « Play International ».

« Les grosses ligues et les fédérations ont besoin de muscler leur expertise. »

« Le sport doit occuper une place prépondérante dans les politiques des pays » assène Amadou Gallo Fall, directeur général de la NBA Afrique et vice-président de la NBA. Le mot d’ordre est clair. Utiliser ce langage universel pour développer des programmes en faveur des populations démunies. « Plus de 600 000 enfants ont pu bénéficier des dispositifs » souligne David Blough. L’ONG utilise une méthode développée par ses soins et nommé « playdologie ». Ce procédé consiste à s’appuyer sur « un jeu sportif comme support éducatif afin de sensibiliser les enfants sur les enjeux sanitaires, sociaux et environnementaux » signifie le site de l’association.

L’envers du décor n’est pas toujours à la hauteur des effets d’annonce. Même si les acteurs prétendent que le principal objectif est « d’inculquer des capacités de vie courante à la jeunesse », la réalité du terrain est parfois tout autre. Certaines organisations sportives installent des structures de formation ou nouent des partenariats avec des clubs originaires de ces territoires, en projetant un développement qui va au-delà de la simple pratique d’une activité sportive. Mais dans les faits, il existe quelques fois, une vaste entreprise de pillage des talents locaux. Le directeur de « Play International » assure « être vigilant » face à ces dérives.

Pour lutter efficacement contre ces abus « les grosses ligues et les fédérations ont besoin de muscler leur expertise » estime David Blough. À cette démarche, « les autorités publiques doivent imposer un cahier des charges » ajoute Jean-Marc Adjovi-Boco, directeur général de « Diambar », une académie africaine qui forme des footballeurs. Malgré ces excès, l’ancien footballeur béninois est « intimement convaincu que le sport est un vecteur de développement formidable. » Il assure que grâce à la structure « un jeune qui ne savait ni lire, ni écrire, a obtenu son bac avec mention à la fin de son cursus. » Un autre, « rêvait de devenir footballeur professionnel mais a finalement opté pour un master en finance. » Aujourd’hui, il occupe un poste de cadre au sein de l’organisation.

Des sportifs sur le front médiatique

Pour donner une plus grande caisse de résonance aux initiatives, des sportifs de haut niveau viennent s’y greffer. Ronny Turiaf et Emmeline Ndong, le premier ambassadeur de la NBA auprès de la jeunesse et la seconde ambassadrice de « Play International », assurent vouloir « partager leur histoire pour montrer que les efforts fournis peuvent apporter aux plus jeunes. » D’après l’ex internationale française, ils ne sont pas les seuls. « Tous les sportifs sont convaincus » du bien-fondé de ce genre d’actions, souligne l’ancienne championne d’Europe. Si bien qu’une « grande majorité a des fondations », certifie le vainqueur de la NBA.

Pour autant, les athlètes ne sont que la partie visible de l’iceberg. L’action humanitaire ne se limite pas à des campagnes de communication portées par des gloires du sport. « Ils sont une minorité sur le terrain » rappel le directeur exécutif de « Play International ». L’idée est de « créer une industrie du sport » à part entière dans ces pays, précise Amadou Gallo Fall, afin d’accroître leur indépendance, et éliminer à terme, ce type de programme.